Dans une salle d’audience pleine, sous le regard de sa famille et de ses proches, Adèle Haenel parle vite, élève parfois la voix, et s’excuse aussitôt. “Il n’arrête pas de me sexualiser, ça me dégoûte, comme si un enfant de 12 ans avait déjà eu le look d’une actrice pornographique !”, s’énerve-t-elle, reprenant les propos du réalisateur qui avait aussi évoqué sa “sensualité débordante” lors de tournage.
Aux commandes avant elle, Christophe Ruggia a tout nié. Les « baisers appuyés sur le cou », les « mains sur la cuisse »… « Elle a reconstruit les choses, elle a su réinterpréter », raconte-t-il. Les déclarations d’amour où il lui dit qu’elle est « une adulte dans un corps d’enfant », les attentats ? Un « pur mensonge ».
“Mais pourquoi te veut-elle autant de mal ?” demande le tribunal.
«Je pense qu’elle s’est radicalisée»… «Regardez son parcours ces cinq dernières années. Ça commence avec moi, puis ce sont les César avec Polanski”, puis “le cinéma dans son ensemble”, s’emporte-t-il.
En 2020, Adèle Haenel quitte avec fracas la cérémonie des César, les prix du cinéma français, pour dénoncer le sacre de Roman Polanski, accusé d’agressions sexuelles et de viols par plusieurs femmes.
Les tics de l’actrice – qu’on a vu sur son visage lorsque le tribunal a décrit les attentats –, ses troubles nerveux, sa dépression décrite par l’expertise psychologique, « d’où ça vient ?
«Je ne sais pas, je ne suis pas psychologue», déclare M. Ruggia. “Il fallait lancer un #Metoo en France et ça m’est tombé dessus.”
Le tribunal avait diffusé des extraits de son film, une histoire d’inceste entre un frère et une sœur autistes, abandonnés à la naissance. Sur grand écran, on voit Adèle Haenel sortir d’une douche et parcourir un long couloir complètement nue. Gros plans de ses seins de bébé pendant qu’elle se caresse et fait des mouvements de langue.
« Le film, quand je le regarde, je me dis, c’est ignoble de faire ça aux enfants. Mais le traumatisme, ce sont les agressions sexuelles”, a déclaré Adèle Haenel, qui avait détourné le regard lors de la projection. .
Aujourd’hui, après des années d’inconfort, elle « va bien ». Même si elle aurait aimé que quelqu’un « défende » l’enfant qu’elle était. « Ce n’était pas normal », insiste-t-elle. Et « c’était visible ».
Les avocats de Christophe Ruggia n’ont aucune question à lui poser. L’audience reprend mardi.
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