Cette étude inédite – la dernière remonte à 2006 – vise à actualiser les connaissances sur les comportements et habitudes des Français en matière de sexualité. Dans l’émission, on se demande quels sont les derniers tabous sexuels des Français, entre adultes consentants bien sûr… Quels sont les préjugés moraux, religieux et sociaux qui pèsent encore sur nos sexualités ?
Nous décortiquerons ce qu’est un tabou et quels sont les obstacles qui nous empêchent de les transgresser. Devons-nous nécessairement les transgresser ? Nous aborderons par exemple la question de la masturbation, longtemps réprimée mais qui peut encore rester un sujet de gêne et d’inconfort, notamment au sein des couples.
Quels tabous ?
Le dictionnaire historique de la langue française d’Alain Rey nous apprend que le mot tabou est emprunté à l’anglais « taboo », mot anglais lui-même emprunté au polynésien « tabu » et surtout à l’adjectif « tapu », qualifiant ce qui est interdit, sacré. Et c’est le nom de ce à quoi le profane ne peut toucher sans commettre un sacrilège. Les synonymes de tabou sont interdit, inviolable, sacré, interdit, intouchable.
Pour Guillaume Durand, maître de conférences en philosophie et bioéthique, il y a quatre caractéristiques de ce qui est tabou. « Le premier est l’interdit moral. La masturbation était interdite au sens moral du terme. Les parents attachaient les mains des jeunes garçons. Deuxièmement, des émotions fortes, comme le dégoût, la honte, la peur suscitées par l’indignation même si l’on parle de certains tabous comme la zoophilie ou l’inceste. Nous serons en fait indignés, voire rebutés par ce dont nous parlons. désir. Nous allons interdire ce qui suscite le désir. Le tabou est donc un objet de désir. Et la quatrième caractéristique, c’est le voile jeté sur le tabou, c’est ce qu’on ne peut même pas nommer. j’écrirai, là encore que la masturbation est un mal, elle est moralement condamnée par tous, et pour preuve, on ne peut même pas la nommer, on n’ose même pas en parler.
Pour Joëlle Mignot, psychologue clinicienne, il existe des tabous que l’on pourrait qualifier d’universels, insurmontables, qui sont l’inceste et le cannibalisme. “Il y a cette dimension de tabou qui est un interdit absolument fondamental qui rejoint le sacré.” Et puis elle explique qu’il y a les tabous qui viennent de notre histoire, qu’on a intégrés au fur et à mesure de notre évolution, qui sont les tabous familiaux, les tabous autour de la sexualité, qui sont très forts.
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Quelle évolution des tabous en France ?
Joëlle Mignot constate que dans ses consultations, les gens parlent beaucoup plus facilement de leurs pratiques sexuelles qu’avant. Mais aussi dans les médias : « Même dans votre émission, nous utilisons des mots qu’on n’utilisait pas il y a dix ans. Le mot masturbation, le mot cunnilingus, sodomie, je suis sûr qu’il y a dix ans, on n’utilisait pas ces mots dans une émission de service public, donc on voit bien que les mentalités changent, donc la sexualité est de moins en moins taboue.
Cécilia Commo, sexologue, partage cet avis, “cunnilingus ou sodomie, franchement, ce n’est plus du tout tabou en réalité.” Pour elle, les tabous reposent désormais notamment sur les infections sexuellement transmissibles, sur les difficultés sexuelles liées à certaines pathologies, ou encore sur les malformations sexuelles. Elle évoque par exemple la maladie de La Peyronie. “Chez les hommes de plus de 50 ans, apparaît subitement une courbure du pénis qui va énormément compliquer leur vie sexuelle.”
Selon elle, les nouveaux tabous se retrouvent dans tout ce qui n’est pas glamour dans la sexualité. Elle explique par exemple qu’on sait qu’il y a beaucoup de femmes qui souffrent de vaginisme, c’est-à-dire de contraction des muscles périnéaux qui empêche la pénétration. « Ils n’en parlent pas, ils ne le disent pas. Ils ont cette idée qu’il est normal de souffrir.
-> Pour en savoir plus sur les tabous en matière de sexualité, écoutez cette émission…
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Avec
- Cécilia Commo thérapeute de couple, sexologue clinicienne et psychanalyste. Elle est l’auteur du livre « Le couple parfait n’existe pas » publié chez Flammarion en 2022. Son podcast « L’intimité en questions » est à retrouver sur toutes les plateformes de streaming et en actualité sur son Instagram. Membre de l’American Psychological Association, ainsi que de la Société Française de Sexologie Clinique et référente au Syndicat National des Sexologues Cliniques.
- Guillaume Durandmaître de conférences en philosophie et bioéthique à l’Université de Nantes. Il est l’auteur du livre « Sexe et tabous » publié chez Hermann le 28 août 2024.
- Joëlle Mignotpsychologue clinicienne et sexologue. Co-titulaire de la Chaire UNESCO en santé sexuelle et droits humains et rédactrice en chef de la revue Sexualités humaines. Egalement responsable pédagogique au DIU de Sexologie Clinique et Sexothérapie (Université Paris-Cité, UFR Médecine), membre de la Chaire UNESCO en Santé Sexuelle et Droits de l’Homme ; professeur d’hypnose clinique; rédactrice en chef de la revue Sexualités humaines et présidente de l’ASCLIF (Association des sexologues cliniciens francophones). Elle est également auteur et directrice de collection aux Editions Complicités.
+ La rubrique « Les Français, Mode d’emploi » par Jérémie Peltier
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