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Le gouvernement Barnier parviendra-t-il à surmonter l’insuffisance de la réponse sécuritaire ?

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VALÉRY HACHE / AFP Le gouvernement parviendra-t-il à surmonter l’insuffisance de la réponse sécuritaire face à la drogue ? (photo de Retailleau et Barnier le 18 octobre)

VALÉRY HACHE / AFP

Le gouvernement parviendra-t-il à surmonter l’insuffisance de la réponse sécuritaire face à la drogue ? (photo de Retailleau et Barnier le 18 octobre)

POLITIQUE – Seul sur scène ? Alors que le gouvernement s’apprête à annoncer un nouveau plan de lutte contre le trafic de drogue, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau prend les devants en multipliant les déclarations martiales. Dans sa ligne de mire : les réseaux du crime organisé, bien sûr, mais aussi les consommateurs.

Plus discret, son collègue Didier Migaud est également aux commandes. Pour préparer les annonces qui devraient être faites en fin de semaine à Marseille, le garde des Sceaux reçoit ce lundi 4 novembre les deux auteurs d’un rapport parlementaire choc – les sénateurs Jérôme Durain (PS) et Etienne Blanc (LR) – , qui a appelé en mai dernier à un « un début nécessaire » verser « échapper au piège du trafic de drogue. »

Troisième homme de l’équation, Michel Barnier prendra ses décisions dans les prochains jours, avant la visite de ses ministres dans la cité phocéenne. En attendant ces conclusions, les indices laissés ici et là notamment par Bruno Retailleau, pointent vers un nouveau « tournant » la sécurité, dans une logique qui semble montrer ses limites.

Les coups de menton de Retailleau

Le ministre de l’Intérieur est passé à l’offensive. Alors que des fusillades ou des meurtres sur fond de règlements de comptes liés au trafic de drogue font régulièrement l’actualité en , le ministre de l’Intérieur promet un « guerre » campagne longue et impitoyable contre le trafic de drogue. Quitte à reprendre un discours parfois éloigné de la vérité et à inciter à une réponse tout à fait sécuritaire, sans doute incomplète.

Sur la forme, Bruno Retailleau estime que le pays est en train de « mexicanisation. » Or, s’il n’y a aucun doute sur la montée des violences et des drames imputables à ce trafic, une telle comparaison n’a guère de sens. Entre autres données, le taux d’homicides en France (1,5 pour 100 000 habitants) est par exemple vingt fois inférieur à celui du Mexique (28 meurtres pour 100 000 habitants). ” Les drogues ont le goût du sang, car s’il n’y a pas de demande, il n’y a pas d’offre », a-t-il insisté ce week-end, dans un discours qui occulte complètement les phénomènes d’addiction ou les causes (parfois complexes) conduisant à la consommation.

En bas, les coups de menton du « premier flic de France » réussissent en fait mal à cacher l’extension de la stratégie du gouvernement précédent. Vendredi dernier, alors qu’il était en déplacement à Rennes, ville où un enfant de cinq ans a été grièvement blessé par balle lors d’un règlement de comptes fin octobre, le ministre a expliqué vouloir « briser l’écosystème » trafic de drogue, notamment en s’attaquant aux consommateurs et « culture de banalisation. » Un air de déjà vu ?

La gauche fustige une politique qui “n’a aucun résultat”

Il est en effet difficile de trouver une différence entre ce discours et celui de son prédécesseur Gérald Darmanin, qui promettait de « harceler les consommateurs » au point d’envisager la possibilité d’imposer des tests sur la voie publique. Il est également difficile de voir le « bascule » vanté par Bruno Retailleau avec une politique répressive à l’œuvre depuis des décennies, et dont les résultats sont bien maigres.

Car c’est un fait : malgré la fermeté affichée par les ministres successifs, et un dossier érigé en mère des priorités au fil des années, la consommation de drogue n’a cessé d’augmenter dans le pays. La France est aujourd’hui le champion européen du cannabis, avec 5 millions de consommateurs annuels et 1 million de fumeurs quotidiens.

Pour la gauche, le gouvernement – ​​et les autres avant lui – est donc en échec. Invité de RTL, ce lundi 4 novembre, Raphaël Glucksmann a estimé que « envoyer la police pour traquer les drogués n’est pas la solution. » Dans la même logique, le coordinateur de la France insoumise Manuel Bompard a critiqué sur Public Sénat le « formules à l’emporte-pièce » du ministre de l’Intérieur. Et une stratégie qui “n’a aucun résultat”, tant sur les amendes forfaitaires que sur « transactions nettes de marché », organisé selon lui avec beaucoup de communication.

La question de « santé publique ” caché?

Dans ce contexte, que faut-il concrètement attendre du gouvernement ? Sans même évoquer la légalisation du cannabis, prônée par plusieurs partis politiques, institutions ou rapports parlementaires, mais devenue taboue dans le camp présidentiel, la logique répressive voire martiale envers les consommateurs semble empêcher l’émergence d’une logique plus saine et préventive. Mais la ligne de Bruno Retailleau (particulièrement efficace pour faire du bruit politique) ne sera pas forcément adoptée dans son intégralité.

Michel Barnier a déjà pris l’habitude d’amortir les éclats de son ministre de l’Intérieur sur divers sujets, l’AME (Aide médicale de l’Etat) ou l’immigration par exemple. Surtout, le duo Migaud – Retailleau comptait s’inspirer du rapport des sénateurs Jérôme Durain et Etienne Blanc pour leur plan anti-trafic de drogue. Et force est de constater que cela porte largement sur les actions à entreprendre pour démanteler les réseaux et cibler le haut du spectre, les individus à leur tête.

Il préconise par exemple la création d’un parquet national anti-stupéfiants sur le modèle du parquet antiterroriste, ou des mesures plus techniques comme le changement du statut d’informateur en celui d’infiltré civil. Mais écrase les opérations très politiques carrés clairs, chères à Gérald Darmanin comme à Bruno Retailleau, qui reviennent à « videz l’océan avec une cuillère à café.

En outre, les auteurs du rapport reconnaissent implicitement que leurs recommandations ne peuvent pas représenter une politique complète en matière de drogue et de trafic. “ Nous n’avons pas voulu aborder la question de la consommation, de la dépénalisation, car cela nous aurait amené à parler de prévention et de questions de santé publique. »a expliqué le sénateur LR Etienne Blanc, mi-octobre, à Public Sénat, ajoutant : « Ce n’était pas exactement notre sujet. » Pour l’instant, ce n’est pas non plus celui du gouvernement.

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