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“Pour une actrice, dès 45 ans, c’est le grand glissement vers l’oubli”

Pour elle, la vie n’a pas été un long fleuve tranquille. Révélée au grand public dans le film d’Étienne Chatiliez, « La vie est un long fleuve tranquille » (1988), grâce à son personnage de Marielle Le Quesnoy et des répliques cultes comme « ne jure pas Marie-Thérèse », Hélène Vincent a depuis a mené son bateau jusqu’à “Quand l’automne arrive”, le dernier en date du réalisateur François Ozon. A 81 ans, l’actrice se voit proposer un premier rôle qui lui convient. Celle de Michelle. A l’écran, elle livre une prestation époustouflante, pleine de tendresse et d’émotion. « Je me suis dit que ce rôle était un cadeau incroyable », nous confie-t-elle, touchée.

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Hélène Vincent a longtemps attendu un personnage comme celui de Michelle. « J’ai un parcours de vie assez intense, avec des hauts et des bas », déclare-t-elle à propos de son parcours (elle tourne depuis les années 1970). « Je pense que j’ai eu beaucoup de chance même si j’étais souvent en colère car j’avais l’impression que mon travail n’était pas considéré comme il devrait l’être », avoue-t-elle. “J’attendais et espérais régulièrement des grands rôles… Comme j’étais très gâté au théâtre, je n’étais pas préparé à être mis dans un rôle “mineur” au cinéma mais j’ai réussi.”

©2024 – FOZ- FRANCE 2 CINEMA – PLAYTIME

Malgré les déceptions, l’actrice tient bon. « J’ai fait quelques productions pour que le temps passe et m’améliore, pour continuer à apprendre. Et puis, de temps en temps, je jouais des trucs pour faire bouillir la marmite », confie-t-elle. “Devenir actrice, c’était un choix sur lequel j’ai parié (…) Mais je crois que j’ai eu une chance incroyable, d’où je viens, d’arriver à 80 ans et d’avoir cette offre de François Ozon. »

“Les femmes n’ont pas le droit de vieillir”

Il faut dire qu’un film dont le personnage principal est une retraitée aux cheveux argentés vivant dans une paisible commune de la Nièvre… « Ça n’existe pas, affirme l’actrice. “Dès 45 ans, c’est le grand glissement vers l’oubli”, ajoute-t-elle, dénonçant l’invisibilité des femmes au cinéma. « Dans ce film, mon rôle est unique. Donc, si cela pouvait inspirer d’autres personnes à vouloir raconter le monde à travers des personnages de femmes plus âgées, ce serait absolument merveilleux. C’est difficile d’espérer avec optimisme parce qu’on ne célèbre que la jeunesse (…) Et puis les femmes, surtout, n’ont pas le droit de vieillir. »

Pour décor de son nouveau long métrage, François Ozon opte pour les espaces verts de la Nièvre. Une région qu’Hélène Vincent connaît bien pour y avoir vécu plusieurs décennies. « C’est ici que je vis ma vie même si cela me paraissait un peu contradictoire avec mon envie de faire du théâtre et du cinéma… » nous explique-t-elle. « Mais je me suis donné les moyens de réaliser ce rêve : vivre à la campagne, dans le silence et malgré la solitude. Ce sont d’ailleurs des choses qui m’ont aidée à me connecter très rapidement à mon personnage car je sais ce qui se passe après le déjeuner, quand la maison est complètement silencieuse, quand il n’y a pas de bruit dehors. et on s’endort doucement… L’attente aussi. Celle de rendre visite aux enfants et petits-enfants. Je sais tout cela par cœur. »

©2024 – FOZ- FRANCE 2 CINEMA – PLAYTIME

Un rôle qui lui convient

Dans “Quand arrive l’automne”, le personnage d’Hélène Vincent attend avec impatience l’arrivée de sa fille Valérie (Ludivine Sagnier) et de son petit-fils Lucas pour les vacances de la Toussaint. Mais ce qui aurait dû être une belle réunion de famille tourne au drame à cause d’une poêle de champignons. Elle a joué de nombreux rôles maternels. « J’avais 41 ans lorsque j’ai commencé à travailler dans le cinéma, donc évidemment, on n’allait pas me proposer un jeune premier rôle », raconte-t-elle non sans humour. Pour les incarner, elle s’appuie sur ses expériences et notamment sa relation avec son fils. “Vous savez, quand on vit assez longtemps comme moi, la vie vous a apporté plein de choses qu’on a dans les poches, et c’est facile de les sortir à telle ou telle occasion”, explique l’actrice. « Mais là, dans le film de François Ozon, il s’avère que j’ai une relation de désenchantement absolu avec ma fille. Cela me frappe fort et c’est tragique. »

Désormais, vers quel désir cinématographique Hélène Vincent va-t-elle voguer ? Elle laisse l’avenir décider. « Si on continue à me proposer des rôles majeurs ou qui expriment des choses profondes sur la société dans laquelle nous vivons et sur le monde d’aujourd’hui, alors je suis intéressé. Mais si on ne me propose rien de plus, j’arrêterai. C’est la vie qui décidera et à l’âge que j’ai, c’est aussi la santé. »

« Quand l’automne arrive », en salles le 2 octobre 2024.

 
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