« L’avantage de cette séquence, c’est qu’on peut faire du cirque. » La petite phrase, lâchée sans détour par un député RN, résume bien l’ambiance du moment. Une sorte de temps suspendu, sans aspérités. Les parlementaires se contentent de se rendre à Paris pour écouter, sans grande attente, le discours de politique générale de François Bayrou. Un travail législatif ? En veille. Une action du gouvernement ? Déjà condamné à l’échec par les élus de l’opposition. Dans les rangs du Rassemblement national, un climat de torpeur règne. Et pour cause, la fête à la flamme a à peine laissé des hommages à Jean-Marie Le Pen, dans une ambiance feutrée. Marine Le Pen, sereine, empreinte d’une certaine gravité, n’a rompu son silence que lors d’un entretien accordé à JDNews, centré sur deux sujets : son père et Mayotte.
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L’heure n’est pas à la politique, même si elle n’est jamais loin. Marine Le Pen a laissé à ses lieutenants le soin de tenir la ligne. Jean-Philippe Tanguy, président adjoint du groupe RN, entre sur scène après le discours de politique générale de François Bayrou. Sans surprise, il saccage le gouvernement Bayrou, accusant l’exécutif de « mentir sur tout à Mayotte » et laisser flotter l’idée d’une éventuelle censure. La tension monte d’un cran après la sortie du ministre de la Décentralisation, François Rebsamen, qui lâche sur BFMTV : « Je respecte les Insoumis. Je respecte toutes les forces politiques sauf le Rassemblement National. » Une déclaration qui heurte le RN, en pleine période de deuil. Le président du parti, Jordan Bardella, convoque François Bayrou pour rappeler son ministre à l’ordre. Sophie Primas, porte-parole du gouvernement, tente de ramener le calme : “Ce n’est pas la position du gouvernement”a-t-elle corrigé à la fin du Conseil des ministres, envoyant Rebsamen au piquet. Une séquence qui n’est pas sans rappeler celle de septembre dernier, lorsque Michel Barnier avait dû décrocher son téléphone pour rassurer Marine Le Pen après une déclaration maladroite de son ministre de l’Économie, Antoine Armand.
Une mauvaise manière qui ravive la tentation de censure chez plusieurs cadres du RN et parlementaires. Les plus proches lieutenants de Marine Le Pen rappellent opportunément que malgré les relations cordiales entre leur chef et François Bayrou, le sursis de l’exécutif ne dépend que de leur bonne volonté. Une menace reléguée bien réelle, même si elle a été en partie éclipsée par la rupture du PS avec LFI lors du vote de la motion de censure. Une scission au sein du Nupes observée par le RN est à regarder avec prudence. “On connaît bien le PS d’Olivier Faure, il reviendra sur le créneau insoumis avant les prochaines élections”ironise un proche de Marine Le Pen.
-La tension monte d’un crâne après le départ de François Rebsamen
Las. Le moment fort de la semaine pour le RN ne s’est pas joué à l’Assemblée, mais sous les voûtes de Notre-Dame du Val-de-Grâce, dans le Ve arrondissement de Paris. Jeudi 16 janvier, pour l’hommage religieux à Jean-Marie Le Pen, toute la famille s’est réunie. La vaste église était pleine, ses 450 places occupées, et la place rapidement envahie par les fidèles venus saluer le « Menhirs ». Marine Le Pen n’a pas pris la parole lors de la cérémonie avant de quitter l’église en silence, complétant ainsi la séquence d’hommages à son père. Une page se tourne dans l’histoire du parti. Il ne fait aucun doute que la politique reprendra rapidement sa place. Les députés RN s’apprêtent à se battre sur le budget, bien décidés à imposer leurs lignes rouges. Marine Le Pen se prépare à une nouvelle épreuve : le verdict du procès des assistants parlementaires du FN, le 31 mars.