Acculé de toutes parts et toujours sans équipe gouvernementale après des débuts critiqués, François Bayrou a proposé jeudi aux partis, hors RN et LFI, de rejoindre son gouvernement, se disant prêt à « reprendre » la réforme des retraites sans la suspendre, pendant l’après-midi. une grande rencontre de forces politiques.
Selon Matignon et plusieurs participants à ces discussions, le nouveau Premier ministre a tenté de convaincre la trentaine de responsables assis autour de lui avec deux propositions phares.
La première : une « offre publique de participation » au gouvernement, adressée à tous les partis présents autour de la table.
La seconde : « reprendre sans suspendre » la réforme des retraites adoptée en 2023 – que la gauche et le RN veulent abroger –, a indiqué Matignon. Avec un objectif, parvenir à “de nouvelles solutions” “d’ici septembre”, ont expliqué plusieurs participants à l’AFP. “Et si nous n’y parvenons pas, nous revenons à la réforme de 2023” qui a notamment décalé l’âge d’admission à 64 ans, a précisé Matignon.
Les discussions ont débuté peu après 14 heures, dans la salle du conseil de Matignon et autour d’une table recouverte de rouge. Étaient présents les présidents de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet et du Sénat Gérard Larcher, ainsi que « les présidents des partis et groupes qui ont eu la responsabilité des affaires du pays à une période ou une autre de la Ve République ».
Une formulation qui exclut le Rassemblement national et son allié, l’UDR d’Éric Ciotti, ainsi que La France insoumise, fondée en 2016.
Rien ne garantit toutefois que les propositions du Premier ministre feront bouger les lignes, tant l’accueil de cette réunion au sommet a été cool auprès de certains invités, même si tous ont honoré leur participation.
La réaction ne s’est pas fait attendre du côté de La France insoumise. “Normalement, les adultes ne croient plus au Père Noël”, a plaisanté son coordinateur Manuel Bompard sur X.
Assise à Matignon à la gauche de M. Bayrou – coïncidence du plan de table – la cheffe des écologistes Marine Tondelier n’a pas non plus mâché ses mots à son arrivée : « François Bayrou a sa censure entre les mains, c’est « c’est à lui de nous convaincre », a-t-elle déclaré.
“Il doit avancer sur les retraites”, “sur les services publics”, “sur les impôts, sur la solidarité”, avait prévenu plus tôt le président des députés PS Boris Vallaud sur la radio Sud.
– Un gouvernement dimanche ? –
Nommé vendredi, François Bayrou multiplie depuis les entretiens officiels ou plus informels.
Mais sa première semaine à Matignon a surtout été marquée par le barrage de critiques sur sa présence lundi soir au conseil municipal de Pau, ville dont il entend rester maire, alors qu’un cyclone vient de ravager Mayotte.
Il a dû s’en expliquer mardi pour sa première séance à l’Assemblée nationale, sans parvenir à faire taire les critiques. Le tout en multipliant les déplacements à l’Élysée pour la formation du gouvernement.
Emmanuel Macron étant à Mayotte jeudi, avant de se rendre ensuite auprès des troupes françaises à Djibouti, plusieurs acteurs parlent d’une annonce gouvernementale dimanche. Les deux chambres exécutives ne donnent aucune date.
Sans majorité à l’Assemblée, le centriste, qui prône depuis des décennies un gouvernement rassemblant diverses sensibilités, fait face à des revendications fortes des Républicains (LR) à droite et à des tentatives de censure croissantes à gauche.
Le format de la réunion n’est pas sans rappeler celui d’il y a neuf jours autour d’Emmanuel Macron à l’Élysée, où étaient évoqués des scénarios de non-censure des oppositions, en échange d’une absence de recours au 49.3 par le gouvernement ou en cas de dissolution par le président.
– « Une chimère » –
Mais les LR augmentent la pression. Mercredi, François Bayrou a reçu le ministre de l’Intérieur démissionnaire Bruno Retailleau, qui venait de déclarer que les conditions n’étaient « pas réunies » pour son maintien place Beauvau.
“Je n’ai pas de ligne rouge”, a toutefois précisé jeudi sur TF1 Gérard Larcher qui juge qu’il faut “apporter des remèdes sur le retour à l’équilibre budgétaire et la question de la sécurité”. “Il est urgent d’avoir un gouvernement”, a-t-il insisté.
Même critique à front inversé venant de la gauche : « S’il vient nous proposer le même budget que celui proposé par M. Barnier (…), nous censurons », a insisté le communiste Fabien Roussel.
La rencontre à Matignon est « une chimère », a lancé Mathilde Panot. La cheffe des députés de La France insoumise dit « croire » que les quatre composantes du Nouveau Front populaire (PS, PCF, Écologistes et LFI) voteront la motion de censure que son groupe déposera le 14 janvier, après François “Déclaration de politique générale Bayrou.
Le Premier ministre n’a obtenu que 36% de satisfaction selon un sondage Ifop pour Sud Radio jeudi, contre 52% et 53% pour ses prédécesseurs Michel Barnier et Gabriel Attal, lors de leurs débuts à Matignon.