« J’J’ai beaucoup souffert. J’ai été choqué, ces dernières années, par la rupture entre la base de la société française et le pouvoir. » François Bayrou, le nouveau Premier ministre, a tenu ces propos le 16 décembre lors du conseil municipal de Pau, ville dont il a choisi de rester maire, malgré sa nomination à la tête du gouvernement. Il a ensuite évoqué ce « mur de verre » qui alimente « une profonde méfiance à l’égard du monde politique, tous partis confondus ».
Tous les lundis à 11h30
Recevez en avant-première les informations et analyses politiques de la rédaction du Point.
Merci !
Votre inscription a été prise en compte avec l’adresse email :
Pour découvrir toutes nos autres newsletters, rendez-vous ici : MonCompte
En vous inscrivant, vous acceptez les conditions générales d’utilisation et notre politique de confidentialité.
Ce discours a suscité une polémique au sein de l’opposition. Si les ministres n’y sont pas contraints, la dernière loi en la matière, datant de 2014, interdit à un parlementaire (député ou sénateur) d’être à la fois maire, président d’un conseil départemental ou d’une assemblée régionale. Un non-sens pour le président de l’Association des maires ruraux de France, Michel Fournier. Selon l’Insee, en 2017, 30 775 communes françaises sont rurales. Ils représentent 32,8% de la population française.
Le point : Lors du conseil municipal de Pau, le nouveau Premier ministre, François Bayrou, a évoqué le non-cumul des mandats qui est, selon lui, « une erreur ». Qu’en pensez-vous en tant que président de l’Association des Maires Ruraux de France ?
Michel Fournier : Les maires ruraux estiment que le non-cumul des mandats, tel qu’il a été instauré, était une erreur fondamentale. Certains élus ne disposent plus de cette connaissance indispensable du terrain. La question n’est pas l’accumulation.
Mais pour pouvoir être représentant à l’Assemblée nationale ou au Sénat, c’est un véritable atout d’exercer ou d’avoir exercé un mandat local, pour ne plus se retrouver déconnecté de la réalité.
D’ailleurs, avant François Bayrou, Michel Barnier avait abordé la question, tout comme Richard Ferrand lorsqu’il était président de l’Assemblée nationale. Tout le monde le regrette. Certains projets de loi sont complètement déconnectés de la ruralité que nous vivons sur le terrain.
Avez-vous des exemples illustrant cette déconnexion ?
Il y en a tellement… Il y a eu des améliorations récentes, mais la première Assemblée nationale élue sous la présidence d’Emmanuel Macron a été un désastre. Il est très facile d’avoir ce que nous appelions autrefois des « chaussures ». Mais à un moment donné : si on n’a pas été maire, si on n’a pas été adjoint, si on n’a pas eu de responsabilité locale – cela est valable à d’autres niveaux, départements ou régionaux –, si on n’a pas vécu ce quotidien avec les obligation de prendre des décisions, de dire non, de trouver des solutions, on se rend compte que nous formons une génération d’élus déconnectés. Ceci est également valable pour les ministres ! À moins de faire preuve de dogmatisme, la grande majorité des élus vous diront que cette connaissance de la vie locale est fondamentale pour mener à bien leur mission.
A LIRE AUSSI Plan ruralité : les maires ruraux attendentPrenons l’exemple du « Zéro artificialisation nette » (ZAN). J’y suis favorable, dans sa conception comme protection des terres agricoles, mais aussi pour garantir que les bâtiments existants soient réhabilités et modernisés dans de nombreux villages. Mais empêchons toute forme de développement local… Que faire des villages peuplés d’agriculteurs qui ont de la terre et qui ont des enfants ? Ils ne peuvent plus construire de nouveaux logements… Cela semble inconcevable. Après, on vient me demander pourquoi certains citoyens finissent par se rabattre sur les votes protestataires.
Ce non-cumul vous impacte-t-il directement dans votre mandat d’élu local ?
Je suis maire depuis 1989 [des Voivres, dans les Vosges, NDLR]. J’ai trente-cinq ans d’expérience en tant que maire. J’ai toujours été élu dès le premier tour. Avec à chaque fois une liste d’opposition, qui n’est pas toujours la même. La démocratie, c’est aussi ça : on s’entend, puis on ne s’entend plus selon tel ou tel projet. Il y a la vie. Mais je reste maire de tout le monde : je ne fais aucune différence et tous les citoyens sont traités de la même manière, qu’ils aient voté pour moi ou non. Nous avons le devoir d’être impartiaux et de veiller à ce que la société fonctionne le mieux possible.
À découvrir
Kangourou du jour
Répondre
Quand Mathilde Panot, présidente du groupe La France insoumise à l’Assemblée nationale, évoque un « désaccord fondamental » avec François Bayrou sur la question des mandats non cumulatifs, considérez-vous qu’elle fait preuve de déconnexion ?
C’est une posture tellement facile de brailler comme ça, éternellement, sur tout. Je ne connais pas sa vie personnelle, mais il arrive souvent qu’il soit nécessaire d’adopter une attitude un peu plus conciliante. Quelles que soient les postures, de droite ou de gauche, elles ne sont pas dignes d’une représentation nationale.