Le gouvernement de Michel Barnier survivra-t-il cette semaine ? En ayant eu recours à 49.3 Ce lundi, pour faire adopter le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, le Premier ministre et son gouvernement s’exposent à deux motions de censure, soumises au vote mercredi à l’Assemblée nationale. Que se passera-t-il si le gouvernement tombe ? Que se passe-t-il si Michel Barnier est retenu ? France Bleu vous explique les différents scénarios futurs.
Deux motions de censure mercredi
Mercredi, le Premier ministre Michel Barnier sera confronté à deux motions de censure, débattues et soumises au vote des députés de l’Assemblée nationale. Celui proposé par le Nouveau Front Populaire sera examiné en premier, car c’est la gauche qui l’a présenté en premier. Celui soumis par le RN sera ensuite examiné. Les deux textes ont été soumis après recours à article 49.3 de la Constitution faire adopter le budget 2025 de la Sécurité sociale, ce qui engage la responsabilité de son gouvernement. Le Rassemblement national a annoncé qu’il voterait la motion déposée par la gauche. Si tous les députés de ces deux groupes votent la censure, le seuil de 289 députés qui constitue la majorité absolue à l’Assemblée sera atteint, et alors le gouvernement tombera.
Que se passe-t-il si le gouvernement tombe ?
Si le gouvernement de Michel Barnier venait à tomber, le Premier ministre démissionnerait alors, et son gouvernement cantonné aux affaires courantes, jusqu’à ce que son successeur soit désigné par Emmanuel Macron. Ce scénario ne s’est produit qu’une seule fois sous la Ve République, en 1962 sous Georges Pompidou. Mais à l’époque, le général de Gaulle, président de la République, pouvait décider de dissoudre immédiatement l’Assemblée nationale. En 2024, Emmanuel Macron sera limité dans ses choix pour former un gouvernement puisqu’il ne peut dissoudre l’Assemblée et convoquer de nouvelles élections législatives avant juillet 2025.
Il lui faudra donc nommer à Matignon quelqu’un avec le même rapport de force au sein de l’hémicycle, c’est-à-dire sans groupe majoritaire et réparti en trois groupes : gauche, centre-droit et extrême droite. Le futur gouvernement sera donc à son tour fortement exposé à une motion de censure.
Quel avenir pour le budget 2025 ?
Si le gouvernement de Michel Barnier tombe mercredi, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale sera donc rejeté. Si un nouveau gouvernement est formé en décembre, il aura alors la possibilité de présenter un nouveau texte pour le budget 2025. Le Parlement aura 70 jours pour l’examiner et le texte suivra la voie législative classique.
En revanche, si aucun gouvernement n’est nommé avant fin 2024, alors le gouvernement démissionnaire pourra déposer en 2025 un projet de loi spécial, renouvelant le budget 2024, en attendant le vote d’un nouveau budget. Cette disposition permet la continuité des dépenses et des recettes de l’État à compter du 1er janvier 2025.
Mais si ce projet de loi spécial devait être rejeté, alors la France connaîtrait une période sans précédent et risquerait le « shutdown », du nom de cette impasse budgétaire qui fait régulièrement la Une des journaux aux Etats-Unis. La situation serait bloquée et l’Etat se retrouverait sans budget. Emmanuel Macron pourrait alors user des pouvoirs exceptionnels conférés par l’article 16 de la Constitution, qui lui permettraient de prendre des décisions budgétaires sans passer par le Parlement. Une solution extrême, qui consisterait à mettre sur pause le fonctionnement démocratique de la France.
Un budget appliqué par ordonnance ?
Dernière hypothèse, si les débats autour du budget s’étendent au-delà des 70 jours prévus par la Constitution, le projet de loi de finances pourra alors être mis en œuvre par ordonnance, sans vote du Parlement, comme le prévoit l’article 47 de la Loi fondamentale. Cette année, la fin du délai constitutionnel interviendra le 21 décembre à minuit. En théorie, ce système permettrait au pays de continuer à fonctionner, mais un flou législatif demeure autour de ce texte, jamais utilisé jusqu’à présent. De nombreux élus seront tentés de considérer ce système comme un contournement du Parlement. Cela n’exclurait pas non plus la possibilité d’une motion de censure qui pourrait être déposée spontanément.
Que se passe-t-il si le gouvernement continue ?
Cette hypothèse semble compliquée, mais n’est pas impossible. Michel Barnier peut encore réussir à convaincre le Rassemblement national, mais il ne lui reste que 48 heures pour y parvenir. Dans ce cas, le gouvernement se maintient et le budget de la Sécurité sociale pour 2025 est adopté. Mais les complications ne sont pas encore terminées, puisque le gouvernement doit également voter le projet de loi de finances (le budget de l’Etat) et le projet de loi de finances de fin de gestion (l’ajustement budgétaire 202, pour clôturer l’année en cours). Deux textes sur lesquels il sera compliqué pour Michel Barnier de trouver des compromis à l’Assemblée, et risque donc de devoir recourir au 49.3 et de s’exposer à de nouvelles motions de censure.