« J’ai bien fait de venir, hein. » Michel Barnier n’a pas fait son mieux jeudi et en s’exprimant en clôture du Congrès des maires à Paris, il l’a fait savoir. Les discours des maires ont été acides.
“Je connais vos inquiétudes”, a répondu le Premier ministre, “pas choqué”. Il s’est employé à résoudre les tensions avec les maires, en s’engageant à leur donner plus de liberté, en réduisant les normes par la réglementation. C’est technique, mais ça fait du baume aux oreilles des maires, tout comme la refonte du statut des élus, très attendue, ou une réflexion sur le retour du cumul des mandats pour les petites communes.
« Prêt » pour la censure
Michel Barnier sait qu’il ne peut pas signer de chèque et a exposé ses contraintes : 3 228 milliards d’euros de dette, soit 870 euros annuels pour chaque Français rien que pour les intérêts de la dette. « Je ne sais pas combien de temps il me reste. Cela dépend de la coalition des opposés à l’Assemblée », a rappelé de manière incisive Michel Barnier. Sur une éventuelle censure de la part de son gouvernement : « Je ne sais pas quand cela arrivera. Je suis prêt pour ça. Mais je sais que ce n’est pas ce que souhaitent les Français, qui souhaitent aujourd’hui stabilité et sérénité. » Au passage, il a flatté les élus locaux : « Vous donnez une bonne image du travail en commun. Je me prends à rêver qu’on retrouve ce genre d’ambiance à l’Assemblée nationale. »
En quelques mots, le Premier ministre a joué, comme il l’a souvent fait depuis deux mois et demi, sur l’opinion publique. Les Français veulent donc compenser leur manque de majorité à l’Assemblée et répondre aux voix discordantes qui commencent à se faire entendre au sein de son gouvernement. Mercredi soir, dans une interview avec parisienle ministre de l’Économie, le macroniste Antoine Armand, a mis en garde contre « trop taxer », en référence à l’effort demandé aux entreprises sur les charges sociales.
Combines vs intérêt général
Une sortie qui constituait clairement une prise de distance avec le Premier ministre et qui a été saluée par Gabriel Attal, patron des députés macronistes, comme étant « juste et responsable ».
Michel Barnier ne pouvait que répondre. Il l’a fait, sans élever le ton, en prenant son auditoire à témoin : « Quand on est fidèle, on a plus de chances de gagner », dit-il avec prudence. Puis, d’un air mi-accablé, mi-aiguisé : « Ce qui est important pour moi, c’est que les Français sachent qu’au-delà des querelles et des mesquineries, il y a l’intérêt général, l’intérêt du pays. » Les maires se sont levés pour l’applaudir. Ont-ils salué le rédacteur d’un budget difficile ou le Premier ministre qui, comme eux, croule sous les difficultés ? La réponse est probablement dans la question.