Dans un rapport publié le 15 novembre, l’Arcom fait le bilan d’une décennie de représentation à la télévision. Si les femmes sont un peu plus visibles à l’écran, les personnes racisées, précaires ou en situation de handicap sont encore très peu présentes.
À quoi ressemble la personne type à la télévision ? C’est un homme blanc, âgé de 35 à 40 ans, CSP+ et habitant en centre ville. Et bien sûr, c’est valable. Pour la mixité sociale, il y a encore du travail à faire. Le rapport, présenté le 15 novembre par l’Arcom, décrypte les contenus de 19 chaînes de la TNT de 2013 à 2023. Documentaires, journaux télévisés, films et émissions de télé-réalité sont scrutés. Les conclusions de l’étude sont mitigées. Le nombre de femmes représentées a augmenté. En revanche, les personnes racisées sont peu visibles, et la précarité et le handicap sont quasi inexistants à l’écran.
Encore quelques femmes
En 2022, un article publié dans Libération a déploré la représentation inégale entre les hommes et les femmes dans les médias. Le résultat n’a pas été glorieux, il tend désormais vers le meilleur. La proportion de femmes à l’écran est passée de 37 % à 40 % en une décennie. En 2023, on comptait même 45 % de femmes dans les programmes les plus audiences. Et même si la représentation des femmes diminue généralement avec l’âge, « 23 % des plus de 50 ans étaient des femmes en 2013 contre 28 % en 2023 », ce qui représente une nette augmentation. L’étude montre qu’ils restent cependant associés à des thématiques très genrées (éducation, loisirs, culture) et sont moins appelés à parler de science ou de politique.
15% de personnes non blanches
Le paysage audiovisuel est encore très blanc. Au cours des dix dernières années, 15 % des personnes perçues comme racisées ont occupé l’écran. Dans les programmes de fiction, ils incarnent des rôles positifs mais sont également assignés à des secteurs d’activité marginaux ou illégaux et cantonnés à des métiers peu qualifiés. Un constat appuyé par une étude du collectif 50/50 publiée cette année, qui constate que les personnages d’origine arabe dans le paysage fictionnel sont souvent des vendeurs, des concierges ou des femmes de ménage ; ou que les personnages noirs sont souvent cantonnés aux rôles d’agent de sécurité, de chauffeur de bus, de réceptionniste… Sur les chaînes d’information en continu, les non-blancs ne représentent que 10 % des effectifs, et y sont généralement présentés de manière négative. Lorsqu’il s’agit de parler de politique française, seuls 8% d’entre eux sont interrogés.
Le handicap est quasiment inexistant
Il est le grand absent des programmes télévisés. Entre 2013 et 2023, les personnes handicapées ne représenteront que 0,7 % des personnes à l’écran. Ils sont quasiment invisibles sur les chaînes d’information en continu, notamment CNews et BFM TV qui ne leur consacrent que 0,3 %. L’étude note également que, tous programmes confondus, « Les personnes identifiées comme ayant un handicap sont perçues un peu plus négativement que les personnes identifiées comme valides. » Cela signifie qu’ils incarnent davantage “méchants” que “héros”qu’ils agissent mal, qu’ils ont un mauvais comportement. Entre 2022 et 2023, les handicaps cognitifs étaient les plus représentés (40%), comme par exemple dans l’émission mensuelle les Rencontres Papotin sur France 2, animé par des personnes atteintes de troubles autistiques. A l’inverse, la surdité est le handicap le moins visible (2%).
Plus de quartiers populaires, mais moins de pauvres
Les centres-villes ont toujours le vent en poupe, mais les quartiers populaires ne sont pas en reste. Elles connaissent une forte croissance sur le petit écran, passant de 3 % du temps d’antenne en 2022 à 10 % en 2023. Les fictions à succès ont contribué à faire gonfler les chiffres. En revanche, à l’écran, la pauvreté devient une chimère. Alors que plus de 14 % des Français sont en situation de précarité selon l’Insee, seulement 1 % des personnes sont défavorisées dans les programmes télévisés. Ceux-ci occupent rarement les premiers rôles, sont souvent en retrait. L’année 2023 bat même des records d’invisibilité, avec seulement 0,8 % d’individus précaires.
Le gendarme de l’audiovisuel salue cependant les efforts de diversification dans la programmation la plus récente, notamment lors des Jeux olympiques de Paris 2024, mais constate que ceux-ci ne se traduisent pas encore dans le baromètre. Il faudra attendre les résultats de l’année prochaine pour en mesurer l’ampleur.