Pierre Palmade, un procès par exemple ?

Pierre Palmade, un procès par exemple ?
Pierre Palmade, un procès par exemple ?

SSi l’on en croit les déclarations de culpabilité faites aux policiers sur son lit d’hôpital, Pierre Palmade devrait prendre ses responsabilités mercredi jusqu’à la barre du tribunal de Melun (Seine-et-Marne). En plein jour, avec des caméras et des flashs qui l’attendent au tournant après de longues périodes de moindre isolement, une entrée sur la scène judiciaire orchestrée à dix petits kilomètres du lieu de ce drame qui lui vaut quatorze ans de prison. Quand, sur le chemin ordinaire menant à un centre commercial, l’humoriste a fracassé sa voiture et sa réputation un soir d’hiver contre un autre conducteur et ses deux passagers grièvement blessés dans l’accident. Sauvés de la mort, près de deux ans plus tard, tous souffrent encore dans leur chair ou dans leur âme, notamment le plus jeune des victimes, un garçon aujourd’hui âgé de 8 ans. Moins touchée, sa mère Mila, en revanche, pleure l’enfant dont elle était enceinte de six mois.

« Fêtard débridé »

D’abord mis en examen pour cet homicide involontaire sur lequel le procureur a insisté, Pierre Palmade a néanmoins comparu devant ses juges exempté de cette accusation par la jurisprudence. Ainsi, un bébé mort-né ne pouvait être considéré comme autre chose qu’un fœtus, une requalification jugée « scandaleuse » par l’avocat des victimes. Sous l’influence de deux circonstances aggravantes, l’artiste encourt néanmoins de grands risques à l’issue d’un procès qui sera aussi celui de toxicomanie au volant. Positif aux stupéfiants et récidiviste après avoir été condamné dans une précédente affaire (1), l’artiste de 56 ans est décrit comme une grenade détachée lorsqu’il monte à bord de son véhicule en compagnie au nom modeste de « deux copains de fête ». D’après ces éléments fournis par le juge d’instruction dans l’ordonnance de renvoi, il reconnaîtra la consommation non-stop et à domicile d’une drogue de synthèse durant les 72 heures de débauche précédant l’accident. Du 3-MMC injecté toutes les heures environ par voie intraveineuse afin d’augmenter la libido et également de décupler le plaisir sexuel, c’est le fameux « Chemsex » et ses ravages révélés depuis à la face de la société française.

« Les drogues doivent être bannies de ma vie »

Jurant n’avoir aucun souvenir de la collision à son réveil en réanimation, Pierre Palmade a toutefois reconnu avoir conscience de la gravité de ses actes, avouant ensuite sa « honte » et ses regrets au juge. ‘instruction. «Je suis complètement dévastée d’avoir mis cette famille en danger, obsédée par cela et par le bébé qui est mort. Les drogues doivent être bannies de ma vie. »

Descente aux enfers

Loin d’être un accident, les dommages collatéraux de ses addictions plurielles et mortifères illustrent l’interminable descente aux enfers d’un homme perché depuis la vingtaine au sommet des paradis artificiels, âge auquel le brillant prépa HEC avait quitté Bordeaux pour faire connaître les gens. rire dans la capitale. Aussi talentueux sur scène que torturé en coulisses, l’ironie du sort judiciaire de Pierre Palmade résonne aussi avec la mort prématurée de son propre père, à l’été 1976. Alors qu’il revenait d’un accouchement dans la campagne landaise, ce jeune obstétricien n’avait pas a survécu à un accident de la route. Reste, selon l’expertise psychiatrique qu’a pu consulter « Sud Ouest », une « personnalité un peu fragile et une certaine immaturité le liant encore à l’enfance ». Se défendant devant les enquêteurs d’avoir l’habitude de conduire dans un état second, Palmade se souviendra également – ​​factures à l’appui – d’avoir pris le taxi le plus souvent possible en souvenir de ce traumatisme subi alors qu’il n’avait que huit ans.

Malgré de nombreuses et diverses cures de désintoxication interrompues prématurément, Pierre Palmade n’a néanmoins pas retenu toutes les leçons, creusant sa tombe autant que sa situation financière au fil des dérives. Où l’on apprend que une sœur résidant également à Bordeaux va même finir par lui proposer une mesure de tutelle. En vain. « Il alterne entre deux visages », insiste l’expert psychiatre. » Celle du comédien, travailleur acharné le ventre vide, et intéressé par les femmes mûres ; et celle d’un fêtard débridé, vivant son homosexualité de manière affichée et toute-puissante. Petit à petit, c’est le second qui prend le dessus, dans une recherche toujours plus grande d’hédonisme, au péril du reste de sa vie. » Et celui des autres, comme il le rappellera ce mercredi devant le tribunal.

Le fantôme de Bordeaux

Désormais obligé, selon certains témoignages, de gagner sa vie en écrivant sous un pseudonyme, rejeté par la plupart de ses camarades du monde artistique, c’est à Bordeaux que l’humoriste déchu poursuit discrètement son parcours médico-judiciaire depuis le printemps 2023. Sans passer complètement inaperçu, disons que sa silhouette haute, un peu engourdie, est devenue familière au fil des saisons. Quelques provisions chez le boucher et au supermarché du coin, parfois le mercredi un arrêt tardif au marché Barrière de Bègles, et c’est tout. Ainsi apparaît en surface la vie que mène Pierre Palmade dans l’ombre de ces banlieues, contraint par les juges autant que par les médecins à faire profil bas. Oublié notamment cette virée en boîte de nuit qui a enflammé les réseaux sociaux quelques mois après l’accident. Fini le temps où des automobilistes rieurs le filmaient en catimini, ou plutôt l’insultaient. Si ce n’est la bienveillance, du moins un relatif anonymat.

De paria à fantôme, si Palmade ne se cache plus, il se fait très discret en dehors des sorties liées à son contrôle judiciaire et de ses trois séances de soins hebdomadaires au CHU. « À ma connaissance, il ne consomme plus de drogue ni d’alcool », raconte son ami François Rollin, l’un des rares comédiens à ne pas lui avoir tourné le dos. « Une petite victoire dans un océan de désastres », poursuit-il, évoquant « son désir de demander pardon, d’être pardonné et de réparer. »

Alors qu’un pays aux 67 millions de procureurs rêvait de le voir condamné avant d’être jugé, nul doute qu’une partie de l’opinion attend néanmoins de son procès davantage une leçon de morale que de droit. Ni plus ni moins que ce qu’il mérite, les magistrats sauront rééquilibrer l’équilibre médiatique en tenant leurs débats autour d’une affaire comme elle est malheureusement jugée presque chaque jour devant nos tribunaux.

(1) En 2019, pour acquisition et consommation de cocaïne.

 
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