Après un mois et demi de procès, l’heure est aux réquisitions contre Marine Le Pen, le Rassemblement national et 24 autres prévenus, accusés d’avoir détourné des fonds du Parlement européen au profit du parti d’extrême droite.
Les réquisitions à deux voix devraient débuter vers 9h30 mercredi, et durer toute la journée. Après des considérations générales, les deux représentants du parquet, Louise Neyton et Nicolas Barret, devraient commencer par développer leur analyse du « système » qui, selon eux, s’est mis en place au Front national (aujourd’hui Rassemblement national) entre 2004 et 2016.
Selon l’accusation, un « système de gestion centralisé » aurait été mis en place pour « vider » les enveloppes de 21 000 euros par mois auxquelles les députés avaient droit, pour rémunérer des assistants parlementaires « fictifs » qui travaillaient en réalité pour le parti (en tant que garde du corps, graphiste). designer ou secrétaire), en vue de « soulager les finances ».
Les procureurs devraient ensuite se concentrer sur le cas de chacun des prévenus : les neuf anciens députés européens frontistes, leurs 12 anciens assistants parlementaires, les comptables et le trésorier, et enfin le parti lui-même. Au total, ce sont 26 prévenus, jugés devant le tribunal correctionnel pour détournement de fonds publics, complicité ou recel de ce délit.
Enfin, en fin d’après-midi ou en début de soirée, les procureurs devraient annoncer les peines demandées à l’encontre de chaque personne.
Ils encourent des peines allant jusqu’à 10 ans d’emprisonnement, un million d’euros d’amende et une peine d’inéligibilité – ce qui pourrait sérieusement entraver les ambitions de Marine Le Pen pour l’élection présidentielle de 2027.
Si une telle peine était imposée, elle aurait « des conséquences extrêmement graves », a-t-elle soutenu à la barre. “Cela aurait pour effet de me priver d’être candidat à la présidentielle, c’est tout.”
« Derrière il y a 11 millions de personnes qui ont voté pour le mouvement que je représente. Donc demain potentiellement, des millions et des millions de Français seraient effectivement privés de leur candidat à la présidentielle », a-t-elle argumenté.
Innocence
Depuis l’ouverture de ce procès le 30 septembre, où elle a assisté à presque toutes les audiences, la triple candidate à la présidentielle a été interrogée sous plusieurs casquettes : celle d’ancienne députée européenne, pour expliquer les contrats contestés conclus avec certains de ses assistants parlementaires. , celle d’ancienne chef du parti (entre 2011 et 2016), et enfin en tant que représentante du Rassemblement national, jugée comme personne morale – elle disposait pour cela d’un pouvoir de l’actuel président Jordan Bardella.
A chaque fois, elle a clamé son « innocence », celle de son parti et de ses coaccusés. “Non” système, mais beaucoup de “mensonges”, de “fictions” et d'”incompréhensions”, a-t-elle juré à la barre, disant aussi son “sentiment” que l’avis du tribunal “était déjà fait”.
Tout au long du procès, elle a esquivé les questions gênantes, réécrivant parfois le dossier. Et s’est enflammée lors de longs monologues sur la « réalité » de la vie d’un parti politique, désireuse de l’expliquer encore et encore… Quitte à exaspérer le tribunal qui lui a dit sèchement et longuement qu’elle en avait marre -bol, lors de son dernier interrogatoire mercredi : « Ici, nous ne sommes pas en politique, nous sommes devant un tribunal correctionnel », lui a déclaré la présidente Bénédicte de Perthuis.
Lors des interrogatoires (une trentaine au total), les prévenus ont eu du mal à apporter des preuves de travail ou à justifier des échanges de mails compromettants – parlant de « mettre » une telle personne sous contrat, de « transférer » ou de « passer » d’un député à un autre – partagés. une défense similaire, « à la limite de l’absurde », comme l’a déclaré mardi l’avocat du Parlement européen Patrick Maisonneuve dans sa plaidoirie.
“La plupart des prévenus m’ont semblé tout à fait prisonniers d’un système de défense collective”, suivant en rang “la ligne fixée” par la dirigeante Marine Le Pen, a-t-il estimé.
Le Parlement européen a estimé son préjudice financier à 4,5 millions d’euros, mais n’en a réclamé que 3,4 millions (une partie ayant déjà été remboursée).
Après les plaidoiries finales, le procès reprendra lundi prochain, les plaidoiries de la défense étant prévues dans deux semaines.
(AFP)