Exilé aux Etats-Unis à l’âge de 14 ans et peu connu du grand public, Moussa Diabaté a signé dans la nuit de mardi à mercredi le premier double-double de sa carrière NBA (12 points, 15 rebonds). Le Français des Charlotte Hornets tourne à plus de 13 rebonds de moyenne sur les trois derniers matchs et apparaît comme la belle surprise du clan tricolore.
Il est l’invité surprise de ce début de saison. Celui qu’on n’attendait pas particulièrement au bal français de la NBA… mais qui a décidé de mettre tous les projecteurs sur la grande scène du championnat nord-américain.
Dans la nuit de mardi à mercredi, Moussa Diabaté (22 ans, 2,08 m) a livré le meilleur match de sa jeune carrière. Face au Magic d’Orlando (défaite 114-89), l’intérieur des Charlotte Hornets a compilé 12 points (6/7 au tir), 15 rebonds et 3 contres, le tout en 30 minutes passées au sol. Il signe ainsi son tout premier double-double en NBA et valide un début de saison aussi inattendu que brillant.
13,6 rebonds en moyenne sur les trois derniers matchs
Si le basket français attendait plutôt Tidjane Salaün, sélectionné en sixième position lors de la dernière draft mais encore en apprentissage (3 points et 3,8 rebonds en 16,8 minutes en moyenne depuis le début de la saison), il n’a d’yeux que pour Diabaté depuis quelques jours. Le natif de Paris a joué plus de 27 minutes en moyenne sur les trois derniers matchs de Charlotte. Sur cette courte période, il a capté 13,6 rebonds par match, des stats dignes des meilleurs rebondeurs de la ligue. En dehors de ces chiffres, pour l’instant anecdotiques sur un si petit échantillon, il a surtout pu apprécier toute son intensité, son sens du rebond et sa polyvalence défensive.
« Il est phénoménal », résume Charles Lee, son coach chez les Hornets. « Il a compris tout ce que nous faisions et son esprit de compétition est contagieux pour toute l’équipe. Les gars adorent quand il prend tous les rebonds offensifs et contre les tirs. Il contribue dans de nombreux domaines. “
« Parfois, je dois même me retenir et me dire : il est dans les deux sens, calme-toi », sourit Charles Lee.
S’il marque actuellement beaucoup de points dans l’esprit du staff de Charlotte, Diabaté n’a en effet pas de contrat garanti. En début de saison, les Français ont signé sous forme de « two-way contract », un contrat qui permet à un joueur d’osciller entre l’effectif NBA et son équipe affiliée en G-League, l’antichambre de la Grande Ligue. Ces contrats « à double sens » stipulent que le joueur ne peut disputer plus de 50 matchs en NBA (sur 82 en saison régulière).
“Je ne savais pas jouer au basket, tous les autres joueurs étaient au-dessus de moi”
Déjà apparu 10 fois en NBA depuis le début de la saison, sur les 11 matchs disputés par les Hornets, Diabaté sait donc qu’il risque de revenir à un moment donné en G-League, même s’il continue d’être performant. Une perspective qui ne devrait pas effrayer le Français, habitué à devoir emprunter des chemins parfois sinueux depuis le début de sa carrière.
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Diabaté a commencé à jouer au basket à l’âge de 12 ans. Et au début, ce sport était loin d’être une évidence. « J’aimais courir, j’étais plus grand que tout le monde. Un de mes amis m’a dit de jouer au basket, mais je n’y suis jamais venu. Finalement, j’ai commencé, au Sporting Club Maccabi à Paris dans le 11e arrondissement, un petit club départemental. Je ne savais pas jouer au basket, tous les autres joueurs étaient au-dessus de moi”, racontait-il à BeBasket en 2019.
Exilé aux USA à 14 ans
Après ces débuts hésitants, Diabaté poursuit son apprentissage à Paris ou en proche banlieue, à l’USD Charonne (20e arrondissement) puis à Charenton-le-Pont, commune du Val-de-Marne qui a également vu passer un certain Evan Fournier. Il s’impose peu à peu comme un acteur dominant auprès des jeunes avant de réaliser un grand revirement en partant aux États-Unis… à 14 ans.
Rejeté au Pôle Espoirs, notamment en raison de ses notes, Diabaté opte donc pour l’exil américain. Il rejoint la Montverde Academy, un programme scolaire prestigieux situé en Floride et reconnu comme une usine à talents. Joel Embiid, Ben Simmons ou encore RJ Barrett sont passés par là.
Même s’il revient en France pour disputer des compétitions internationales avec les équipes de France de jeunes (Euro U16 en 2018 et Euro U18 en 2019), cet exil précoce fait de lui un jeune homme peu connu du public français. Pourtant, ce choix ambitieux lui a permis d’être un prospect reconnu sur le circuit américain. Élu parmi les meilleurs lycéens du pays et invité à la prestigieuse Jordan Brand Classic en 2021, il rejoint la même année l’université du Michigan, avec laquelle il découvre la NCAA, le championnat universitaire américain.
Malgré une saison plutôt discrète dans le Michigan, il intègre la draft 2022, où il est sélectionné en 43e position par les Los Angeles Clippers. En Californie, aux côtés des superstars Kawhi Leonard et Paul George, il se contente de restes et passe la majeure partie de son temps en G-League. Après avoir disputé 22 matchs en 2022-2023 (2,7 points et 2,3 rebonds en 8,9 minutes en moyenne), il n’apparaît qu’à 11 reprises sous le maillot des Clippers en 2023-2024 (2,6 points et 2,2 rebonds en 5,8 minutes). Il a presque atteint ce total en moins de trois semaines de la saison régulière avec les Hornets. De quoi donner lieu à de belles promesses pour la suite.
Félix Gabory Journaliste RMC Sport