le triomphe sans foule de l’extrême droite d’Herbert Kickl

le triomphe sans foule de l’extrême droite d’Herbert Kickl
le triomphe sans foule de l’extrême droite d’Herbert Kickl

Uune victoire historique et incontestable. Historique, car pour la première fois depuis 1945, un parti d’extrême droite arrive en tête aux élections législatives en Autriche. Les conservateurs (ÖVP) et les sociaux-démocrates (SPÖ), qui se passaient le flambeau depuis la guerre, ont enregistré de lourdes pertes. Indiscutable, car avec 29,2% des suffrages, le FPÖ d’Herbert Kickl fait un bond record de 12,6 points par rapport à 2019 et double franchement les conservateurs (26,5%, soit une baisse de 11 points) qui dirigeaient le pays depuis cinq ans avec leurs alliés les Légumes verts.

Herbert Kickl, le leader très radical du FPÖ, jubile peut-être ce matin, mais une chose est pratiquement sûre : il ne sera pas chancelier. Le chancelier sortant Karl Nehammer (ÖVP) a répété tout au long de la campagne que son parti refuserait d’être le partenaire junior d’une coalition dirigée par Herbert Kickl, qu’il décrit comme « risque de sécurité » en raison des affinités pro-russes du leader du FPÖ. Il est cependant difficile d’imaginer, après un tel triomphe, comment Herbert Kickl accepterait de se retirer et de céder la chancellerie aux conservateurs.

En Autriche, l’ÖVP s’est déjà associé à deux reprises au FPÖ pour gouverner au niveau fédéral. Mais les populistes de droite ne sont pas arrivés en tête des élections législatives et ont été contraints d’arroser leur vin. La situation est très différente aujourd’hui. Quant aux autres partis, des sociaux-démocrates aux Verts en passant par le petit parti libéral NEO, ils ont tous annoncé qu’ils ne s’allieraient pas avec le FPÖ.

Construire une « Forteresse Autriche »

Ce sont les positions radicales d’Herbert Kickl ce qui a repoussé les fêtes traditionnelles. Cet homme, réputé pour son goût de la provocation et son agressivité qui a séduit près d’un tiers des votants, est l’un des dirigeants d’extrême droite les plus radicaux d’Europe. Il exige non seulement la levée des sanctions européennes contre Moscou et l’arrêt des livraisons d’armes, mais il appelle également à des négociations avec Vladimir Poutine.

Eurosceptique, il souhaite dénoncer le Pacte européen sur les migrations, remplacer le droit d’asile par une « loi d’urgence », imposer la « remigration » de certains étrangers et citoyens naturalisés. Il rêve d’un retour à « l’homogénéité » de la société autrichienne. Virulemment anti-islam, il est le protecteur des valeurs chrétiennes. Il souhaite rétablir la peine de mort et abaisser l’âge de la responsabilité pénale de 14 à 12 ans. Herbert Kickl entend également réduire les dotations accordées à certaines institutions culturelles et exercer le contrôle sur l’ORF, la télévision publique. Son modèle : Viktor Orban en Hongrie.

Celui qui dirige avec succès le parti depuis 2021 veut faire de l’Autriche une « forteresse ». Herbert Kickl profita du grand mécontentement des Autrichiens. L’inflation élevée était le thème numéro un de la campagne, avant même l’immigration. Herbert Kickl a réussi à rassembler les frustrés de tous bords et à rallier tous ceux qui ont l’impression d’avoir été oubliés par « le système », c’est-à-dire les partis traditionnels. Il a su rallier les très puissants anti-vaccins en Autriche. Herbert Kickl, qui n’a pas hésité à propager des théories complotistes pendant la pandémie, exige aujourd’hui que justice soit faite après les mesures discriminatoires auxquelles les anti-vaxx estiment avoir été soumis.

A LIRE AUSSI Les affinités russes de l’extrême droite autrichienneCeux, notamment les Verts, qui espéraient que les graves inondations qui ont récemment dévasté l’Autriche inverseraient la tendance ont été déçus. Le thème du changement climatique, nié par le FPÖ qui qualifie les Verts d’« écocommunistes », n’a joué qu’un rôle mineur dans l’isoloir. Un scandale de dernière minute n’a pas non plus découragé les électeurs. Deux dirigeants éminents du FPÖ ont participé, deux jours avant les élections, aux funérailles d’un ancien conseiller local du FPÖ. L’hymne de SS armés, « Le Saint Empire allemand », fut entonné en chœur devant le tombeau.

Qui gouvernera l’Autriche ?

La formation d’une coalition capable de tenir fermement les rênes de ce pays profondément divisé s’annonce difficile. D’autant qu’Herbert Kickl ne cache pas ses ambitions. Il veut devenir le « Volkskanzler » (chancelier du peuple). Que ce nom ait déjà été donné à Hitler dans les années 1930 ne semble pas le déranger.

Le résultat du 29 septembre légitime cette ambition. Il sera difficile de faire obstacle à quelqu’un qui dispose de 29,2 % des suffrages. Le seul modèle possible pour contourner le FPÖ serait la formation de ce qu’Herbert Kickl ne manquerait pas d’appeler « une coalition des perdants » qui s’emparerait du pouvoir « comme si les élections n’avaient pas eu lieu ». Ou une alliance entre conservateurs et sociaux-démocrates qui rassemblent à peine un nombre de voix suffisant, avec un siège de plus que la majorité.

Mais la ligne très à gauche du SPÖ, qui veut rétablir l’impôt sur la fortune, est difficilement compatible avec le programme conservateur. Il est difficile de concilier des intérêts aussi divergents. Autre constellation possible : une coalition tripartite incluant le NEOS, le petit parti libéral qui a enregistré un score honorable (9%) et dont les positions sur l’économie sont proches de celles de l’ÖVP. Les discordes persistantes au sein de la coalition tripartite au pouvoir en Allemagne voisine ne constituent pas un exemple prometteur.

La victoire du FPÖ est d’autant plus spectaculaire que, il n’y a pas si longtemps, la presse et les analystes politiques autrichiens sonnaient le glas de ce parti miné par l’énorme scandale de corruption d’Ibiza. En mai 2019, une vidéo montrait Heinz-Christian Strache, vice-chancelier et leader du FPÖ, troquant des contrats publics en échange de financements illicites avec la nièce présumée d’un oligarque russe. Le chancelier Sebastian Kurz a limogé Herbert Kickl, alors ministre de l’Intérieur, provoquant ainsi la démission collective de tous les ministres d’extrême droite et la chute de sa coalition. On croyait alors que le parti ne se remettrait jamais de ce scandale. Cinq années ont suffi pour que le parti renaît de ses cendres.

 
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