« Je crois aux possibilités illimitées du verre », écrit Max Ingrand, qui a passé sa vie dans ses ombres et ses lumières. D’abord en admirant les vitraux de Notre-Dame de Bressuire, sa ville natale dans les Deux-Sèvres. Ceux de Chartres (Eure-et-Loir), où il était lycéen, lui ont ensuite fait l’œil. Né en 1908, il arrive dans l’effervescence des années 1920. Après des études aux Beaux-Arts de Paris et à l’École nationale supérieure des artsdécoratifs, il est formé par Jacques Grüber, grand verrier des années suivantes. guerres.
Fais danser la lumière
Max Ingrand ouvre son propre atelier en 1931. Il expérimente dans tous les sens – comme avec ces tests de pose d’acide sur des plaques de verre, de quelques minutes à plusieurs jours. Il maîtrise la technique de la grisaille sur vitrail, l’enlèvement de matière, et l’association de couleurs souvent très vives. Sa ligne sait être souple et ronde, comme dans les assiettes en verre de Scène de bord de mer (1936) présenté au musée de Bressuire.
Cette pièce combine des techniques avancées de sablage, de gravure et d’ajout d’argent et d’or. Il s’agissait sans doute d’un échantillon destiné à attirer une riche clientèle sud-américaine. La communauté du Bocage a pu l’acquérir aux enchères.
L’établissement fait également place à Paule Ingrand, sa première épouse diplômée des Arts Décoratifs. Dans les années 1930, ils conçoivent les décors de la piscine du paquebot France, la décoration de l’église Sainte-Agnès à Maisons-Alfort et du Palais de Tokyo à Paris. ” Sa femme était très importante dans son travailexplique Morgane Turlik, médiatrice culturelle au musée. Ils ont créé beaucoup de choses ensemble. Lorsqu’ils se séparèrent après la guerre, elle poursuivit son travail personnel. »
Avec le partage 39-45, fini le laisser-aller. Il est resté prisonnier dans un camp en Allemagne pendant cinq ans. Max Ingrand produit différemment : les temps sont plus sombres et ses motifs plus torturés. Il accorde une grande attention aux vitraux détruits par les bombardements.
LA DATE
2007 : c’est l’année où le musée de Bressuire acquiert pour la première fois une œuvre de Max Ingrand. ” Nous les achetons chaque annéeexplique Stéphanie Pineau-Coulon, directrice du conservatoire de musique et des musées à Agglo 2B. Le plus gros achat a été le fonds du studio de Michel Durand à Orly (Val-de-Marne)en 2018. Il était le numéro deux de Max Ingrand, à qui il avait passé le flambeau. » Le musée possède ainsi une lampe réalisée par Fontana Arte, une maison de design italienne, dont il fut le directeur artistique. Il est toujours au catalogue.
-Jean-Pierre Blin, conservateur des Monuments historiques, et spécialiste de l’artiste, estime que « pour lui, le vitrail n’est pas un sous-genre de la peinture, c’est un art en soi avec ses règles, ses contraintes « . Dont il respecte la technique ancestrale.
Renouant avec les années 1930, Max Ingrand réalise en 1962 une pièce monumentale unique pour le siège de Saint-Gobain à Neuilly (Hauts-de-Seine), réalisée en pâte de verre moulée, retravaillée à l’acide, avec une couche peinte au dos en jaune- nuancier vert. Bressuire l’explique.
> Musée de Bressuire. Ouvert de 14h30 à 18h30 : 19, 22 et 29 janvier puis 1, 2, 5, 12, 15, 16, 26 et 28 février. Ateliers (sur réservation) mercredi 26 et vendredi 28 février, puis Mercredi 5 mars et vendredi 7 mars, à 15h30 ; sinon, l’établissement est fermé en mars. Réouverture le 2 avril. Entrée gratuite. Tel. 05.49.74.32.24.
Vitraux créés dans la région
Face aux besoins importants après la Seconde Guerre mondiale (1), Max Ingrand se spécialise dans la fabrication de vitraux destinés à remplacer ceux détruits par les bombardements – dans plus de deux cents projets. ” Il s’efforce de créer de véritables tapisseries de lumièreexplains Morgane Tyrlik, cultural mediator at the Bressuire museum. Son style s’adapte aux demandes de ses mécènes, que ce soit en imitation figurative ou en abstraction. » Il reproduit scrupuleusement les techniques du Moyen Âge, tant dans la structure que dans les détails.
Ses vitraux se retrouvent dans de nombreuses églises de notre région. Dans ses Deux-Sèvres natales, il restaure ceux de la chapelle du château de Thouars. Mais aussi en Indre-et-Loire, dans les églises de Villandry, Ballan-Miré, Azay-le-Rideau ou encore dans la chapelle Saint-Hubert du château d’Amboise (récemment restaurée) et celle du château de Chenonceau. A Tours également, la Psalette, la cathédrale Saint-Gatien et l’église Saint-Julien ont pu recevoir ses œuvres lumineuses. Dans le Loir-et-Cher, à Blois, il réalise pour la chapelle Saint-Calais du château, l’église Saint-Nicolas et la cathédrale Saint-Louis. Enfin, à Vienne, on lui doit les vitraux de l’église Saint-Denis de Jaunay-Clan.
(1) En 1939-1945, les leçons avaient pourtant été tirées de la Première Guerre mondiale, avec la suppression et la mise à l’abri de nombreuses verrières – comme les 2 600 m² de vitraux de Chartres (Eure-et-Loir), cachés dans Dordogne.
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