comment Invader s’est emparé de la Côte Basque

Pau en 2000, Contis en 2010, Cap-Ferret en 2018, cela fait six ans que vous n’êtes pas revenu dans le Sud-Ouest. Pourquoi avez-vous envahi le Pays Basque ?

Tout simplement parce que j’y suis allé l’été dernier et que j’ai réalisé que Biarritz, et le Pays Basque en général, était un territoire d’une grande richesse culturelle et d’une grande beauté, et que je n’y avais jamais travaillé. C’est désormais chose faite !

Bayonne défend le street art à travers son festival Points de Vue. Envahir le BAB, est-ce une validation de ce travail ?

Pas directement. Mais, peut-être grâce à lui, j’ai ressenti un très bon accueil de mon travail, ce qui est très motivant et enrichissant.

A ce propos, Maider Arosteguy, maire de Biarritz, a émis une réserve sur les sites patrimoniaux, comme la Plaza Berri ou Le Royal. Est-ce que tu comprends ?

Je comprends qu’il peut être partagé entre la préservation du patrimoine existant et la conservation de mes œuvres. Mais on peut aussi considérer que mes œuvres sont comme une nouvelle couche de patrimoine qui fait partie de la ville. Nous verrons quelle sera sa décision.


Envahir Anglet. Comme Banksy, le street artiste valorise son anonymat.

Envahisseur


Les mosaïques sont composées en atelier avant d’être collées sur les murs.

Envahisseur

Aviron bayonnais, surf, l’ikurriña (le drapeau basque) : certaines mosaïques font référence à la culture locale. Comment travaillez-vous en amont ?

Il y a eu évidemment un gros travail de repérage, de recherche et de préparation avec l’idée de créer des pièces faisant écho à la culture et au patrimoine locaux. Le temps de préparation dépend de l’ampleur de l’invasion. Celui du BAB m’a pris plusieurs mois.

Des sites emblématiques comme la Côte des Basques, la Villa Belza ou les abords de la cathédrale de Bayonne, aux rues plus discrètes : quelle est votre stratégie visuelle ?

C’est assez subjectif. J’étudie les lieux, je fais des repérages et j’interviens sur les points qui ont retenu mon attention. Je compare souvent ce procédé à une sorte d’acupuncture urbaine. Après avoir travaillé seul pendant des années, j’ai désormais une petite équipe qui me prête main forte, tant pour la préparation que pour l’installation.

Pourquoi avoir choisi de représenter les extraterrestres du jeu vidéo « Space Invaders » ? Êtes-vous un geek?

Pas vraiment, mais je fais partie de cette génération qui a vu naître les premiers jeux vidéo comme « Pong », « Space Invaders », « Breakout » ou « Pac Man ». Et « Space Invaders » correspond parfaitement à mon projet. Non seulement je représente ses personnages pixels à l’aide de carreaux de céramique, mais surtout, son nom colle parfaitement à mon projet : envahir l’espace (urbain).

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Deux jours – ou plutôt deux nuits – ont suffi, les 8 et 9 novembre, pour voir Bayonne, Biarritz et Anglet envahies par les aliens emblématiques d’Invader, la star internationale du street art. Question subsidiaire : ces villes choisiront-elles de conserver ces œuvres spontanées qui ont fleuri dans des lieux emblématiques comme la Côte des Basques ou la Villa Belza ?

Vue de l'atelier Invader : les thèmes utilisés pour l'invasion du Pays Basque collent à l'identité locale. Surf, soleil, rugby et ikurriña.


Vue de l’atelier Invader : les thèmes utilisés pour l’invasion du Pays Basque collent à l’identité locale. Surf, soleil, rugby et ikurriña.

Envahisseur

Pour coller à l'identité d'un lieu, certaines œuvres s'éloignent du motif récurrent des extraterrestres de « Space Invaders ».


Pour coller à l’identité d’un lieu, certaines œuvres s’éloignent du motif récurrent des extraterrestres de « Space Invaders ».

Envahisseur

Comment envisagez-vous la dimension ludique de votre travail ?

Pour les personnes attentives, découvrir mes interventions, c’est un peu une chasse au trésor qui permet de porter un nouveau regard sur une ville ou un territoire. Et encore plus depuis que j’ai développé l’application Flashinvaders qui permet de jouer avec son smartphone.

Les mosaïques marquent un engagement fort, comme « Protéger l’océan », en référence à la demande de libération de Paul Watson. Que peut faire l’art, et en particulier le street art, dans le monde d’aujourd’hui ?

Le street art véhicule, à mes yeux, l’idée d’une totale liberté d’action, de création et d’exigence. Je suis rarement directement politique dans mon travail, mais la défense de la planète et la préservation de ses écosystèmes me semblent être une cause importante à soutenir. Étant un grand admirateur de l’œuvre de Paul Watson, il me semblait important de revendiquer mon soutien à cet homme qui, à mes yeux, est plus un héros qu’un hors-la-loi.

Certaines de vos œuvres sont parfois détruites, volées ou copiées…

Leur destruction m’attriste bien sûr. Concernant les copies, il est vrai que certains artistes s’inspirent tellement de mon travail que cela prête à confusion.

Toutes les mosaïques du BAB ont-elles été retrouvées ?

Oui. Il existe aujourd’hui une telle communauté d’aficionados qui suivent mon travail que mes œuvres sont découvertes en un temps record.

Rien à Bordeaux : quand revenez-vous dans le Sud-Ouest ?

Travaillant à l’échelle mondiale, ce projet est sans fin. Mais j’espère que l’invasion de Bordeaux aura lieu un jour.

Pas vu, mais connu

Ne montrez pas votre visage, n’utilisez pas votre vrai nom, communiquez uniquement par écrit. E-mail ou messagerie instantanée. Invader a posé des conditions avant d’accepter de répondre aux questions du « Sud Ouest ». Comme Banksy, le street artiste valorise son anonymat. « Cette idée fait partie du projet depuis mes débuts. Cela ajoute un élément de mystère et permet au public de projeter sa propre imagination. » La lumière est pour les envahisseurs.

 
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