Simon Depardon. La réserve morale

Simon Depardon. La réserve morale
Simon Depardon. La réserve morale

L’Œil de la Photographie ouvre un nouveau chapitre des « Cartes Blanches » avec le soutien de MPB. Chaque mois, un photographe français présentera une nouvelle série réalisée avec du matériel prêté par la plateforme internationale d’achat, de revente et d’échange de matériel photographique.

Simon Depardon s’est rendu à Deleitosa sur les traces de W. Eugene Smith. Faisant écho aux photographies de l’Américain, sa série capte le déroulement de la vie quotidienne du village de Deleitosa et oscille entre une dignité marquée par la lenteur et l’oisiveté de l’ordinaire.

« En 1951, W. Eugene Smith immortalise pour le magazine LIFE la vie quotidienne des habitants de Deleitosa, un village isolé d’Estrémadure, au sud-ouest de l’Espagne. Cette série emblématique de la ruralité sous le franquisme reste gravée dans la mémoire collective du village. Censuré par le régime, le magazine ne parviendra aux habitants que plusieurs décennies plus tard. Un grand nombre de malentendus et d’interprétations erronées ont marqué son œuvre, faisant de W. Eugene Smith une figure controversée. Aujourd’hui, la polémique continue : le portrait qu’il dresse du village est-il à l’avantage de ses habitants, ou une caricature grossière de la pauvreté qui régnait à l’époque ? Une chose est sûre, son voyage a profondément marqué certains villageois, influençant durablement leur regard sur les photographes et rendant parfois notre travail plus difficile qu’ailleurs.

Verser L’oeil de la photographieJe réalise une série contemporaine, en couleur et parfois avec flash (Leica SF 40 connecté via un câble de synchronisation PC) visant à explorer comment la population locale continue de résister à un déclin marqué par l’exode des jeunes et des sécheresses répétées. A travers ces portraits, j’ai tenté de capter la dualité de ce village : un lieu où cohabitent dignité et farniente, où les regards reflètent à la fois la dureté du quotidien et une tranquille résignation au temps qui passe.

Mon travail consistait à rencontrer les habitants dans leur quotidien, souvent dans la rue, tout en établissant des liens avec les institutions locales comme la mairie, les pompiers et la Guardia Civil. Le flash, utilisé dans certains portraits, m’a permis de révéler la réalité brute des lieux, en accentuant les contrastes et les détails du quotidien.

Cette série parle de l’Espagne rurale, d’un certain abandon de la part des pouvoirs publics, mais aussi d’une vie immuable et empreinte d’une grande dignité. C’est un travail que j’espère poursuivre, afin de continuer à témoigner de la force et de la résilience de ces habitants qui, malgré les difficultés, m’ont accueilli avec une grande générosité et une confiance précieuse.

Simon Depardon

Né en 1991 à Paris, Simon Depardon est réalisateur et photographe. Son travail photographique capture la vie ordinaire des gens et de leur ville à travers des histoires tirées de ses reportages et enquêtes de terrain. Ancré dans une approche documentaire, son travail cherche à capturer les profondeurs les plus profondes de ses sujets, y retrouvant beauté, profondeur et intemporalité.

Il est l’auteur de plusieurs longs métrages documentaires dont Réponse féministe selon laquelle il co-réalisé avec Marie Perrenès (sélection officielle, Festival de Cannes 2022). Il a également récemment exposé des portraits récents des athlètes olympiques et paralympiques de 2024 dans le cadre du programme « Art in the City » avec la Mairie de Paris.

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