«Je savais que l’art ne m’abandonnerait jamais»

«Je savais que l’art ne m’abandonnerait jamais»
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Anna Maria Maiolino, lors de la Biennale de Venise, en avril 2024. LEE PRÉTIEUX

Sculptrice, designer, vidéaste et poète, Anna Maria Maiolino a remporté le Lion d’or à la Biennale de Venise, tout comme l’artiste Nil Yalter. Longtemps resté dans l’ombre, ce Brésilien d’origine italienne a grandi dans l’art avec la génération des néoconcrets, participant à l’avant-garde qui a fait vibrer Rio de Janeiro dans les années 1960. Combinant de manière singulière dessin et sculpture, elle réinvente sans cesse sa pratique, tissant en s’inspirant de son expérience d’ouvrière textile en « photo-poème-action ». Depuis les années 1990, elle travaille principalement l’argile, dans de grandes installations. Le dernier d’entre eux a été dévoilé à la Biennale de Venise : l’artiste a envahi une des cabanes du Giardino delle Vergini de dentelles de terre ocre qui composent comme un organisme vivant. Enfin fêtée, à 81 ans, elle évoque avec nous six décennies de carrière et d’exil.

A 81 ans, vous êtes consacré au Lion d’Or. Comment vivez-vous cette reconnaissance tardive ?

J’ai toujours cru en mon art et je savais qu’il serait reconnu tôt ou tard, car je suis très sincère et l’art a sa magie particulière. C’était difficile, mais les choses me sont venues sans que je me précipite. En soixante-quatre ans de travail artistique, je n’ai jamais été invité à Venise. Revenir, à l’occasion de la Biennale, en Italie, sur cette terre que j’ai dû abandonner, est très émouvant.

La Biennale se concentre, entre autres thématiques, sur les migrations et notamment sur la diaspora italienne : comment définiriez-vous votre appartenance à cette communauté ?

Je suis né en pleine guerre mondiale, en 1942, en Italie, j’ai connu la faim et la guerre, mes parents sont partis pour y échapper. J’étais Italien au Brésil, un pays construit par les migrants, comme toute l’Amérique. J’ai quitté ma terre, ce fut une grande souffrance, comme pour tous ceux qui ont quitté leur pays. Mais, en nous rappelant que nous sommes « des étrangers partout », pour reprendre le titre de la Biennale, cette proposition du directeur artistique Adriano Pedrosa transforme cette souffrance en bénédiction. D’un autre côté, je ne me sens pas comme un Italien émigré : je suis une personne très multiple. Je ne suis pas un artiste linéaire, mais agité et changeant. Dès que je m’ennuie, j’ai envie de nouveaux défis, d’autres discours, de nouveaux médiums.

Vous avez vécu dans différents pays : l’Italie, le Venezuela avant le Brésil, puis New York dans les années 1970. Quel a été l’impact de ces exilés sur votre art ?

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