Un budget de la Sécurité Sociale indispensable ?
Le gouvernement Barnier a été renversé le 4 décembre, après avoir utilisé l’article 49 alinéa 3 de la Constitution pour faire adopter sans vote le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Président de la commission des Finances à l’Assemblée nationale, le député LFI Éric Coquerel juge que l’adoption de ce texte n’est pas indispensable. « Les PLFSS sont des objectifs, on peut fonctionner sans eux », affirme-t-il. Mais la ministre de la Santé Geneviève Darrieussecq a estimé qu’il fallait “construire” ce budget “le plus rapidement possible”, mercredi sur LCI.
Lundi, les fédérations des établissements de santé ont demandé l’adoption du PLFSS “avant fin janvier”, et la fixation d’un objectif de dépenses (Ondam) “garantissant aux établissements de santé le juste financement de leurs frais”. Un vote « crucial pour éviter une crise majeure », ont-ils souligné. Les tarifs hospitaliers sont traditionnellement fixés en mars, sur la base de l’Ondam.
Par ailleurs, le vote d’un budget permettra d’éviter le creusement du déficit de la Sécurité sociale, jusqu’à plus de 30 milliards d’euros en 2025 si aucune mesure législative ou réglementaire n’est prise, selon la commission des Affaires sociales du Sénat. Un tel déficit « serait dangereux pour la pérennité de notre modèle de protection sociale », juge la commission.
Reprise de la navette ou page blanche ?
Pour le budget de la Sécurité sociale, comme celui de l’Etat, deux voies sont possibles : partir de la copie du gouvernement Barnier, ou proposer un nouveau texte. La première option permettrait un examen plus rapide, la seconde peut paraître plus pertinente politiquement, après la censure du gouvernement de Michel Barnier. Le Premier ministre François Bayrou, en affirmant jeudi sur France2 espérer l’adoption d’un budget d’ici la mi-février, a marqué sa préférence pour la première solution, au moins pour le budget de l’Etat.
Le rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale, Charles de Courson (Liot), s’est prononcé mardi pour l’élaboration de « deux nouveaux textes ». “Je vois mal comment on pourrait voter un projet de loi de financement de la Sécurité sociale qui a fait l’objet d’une censure au titre de l’article 49.3”, a-t-il souligné. Charles de Courson se veut rassurant sur les délais, soulignant qu’en 1925 le budget de l’État avait été voté… le 13 juillet.
Le député Mathieu Lefèvre, vice-président du groupe Ensemble pour la République, penche pour la première solution : « ma préférence politique n’est pas forcément ma préférence technique. Je comprends que s’il faut refaire un budget (de l’Etat) de zéro, cela veut dire qu’on arrive fin mars, début avril. Et si nous ne l’adoptons pas, nous courons des risques à bien des égards. […] Je ne veux prendre aucun risque, donc je pense qu’il faut revenir aux textes existants quitte à les amender », dit-il. Cette solution « augmente son risque de censure, mais elle va plus vite. Cela me semble plus rationnel », note Éric Coquerel.
Au Sénat également, de nombreuses voix réclament que les débats sur le projet de loi de finances reprennent là où ils se sont arrêtés. « Cela permettrait de tout rediscuter, mais dans des délais plus raisonnables », souligne le président socialiste de la commission des finances, Claude Raynal. Concernant le budget de la Sécurité sociale, la commission des Affaires sociales du Sénat note que la présentation d’un nouveau texte semble le « scénario le plus susceptible de ramener le déficit à un niveau soutenable ».
Quid d’un projet de loi pour des mesures consensuelles et urgentes ?
Attendu que le projet de loi de finances ne serait pas adopté avant plusieurs mois, Charles de Courson et Éric Coquerel ont adressé une lettre au Premier ministre pour lui proposer d’inscrire à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale à partir de la semaine du 13 janvier un projet de loi contenant divers des dispositions économiques, financières et sociales, permettant l’entrée en vigueur de mesures budgétaires urgentes et consensuelles – dont l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu à l’inflation.