(Ottawa) L’ancien gouverneur de la Banque du Canada Mark Carney a tout fait sauf confirmer explicitement sur les ondes d’un réseau américain lundi soir qu’il se présentera à la direction du Parti libéral du Canada.
Le véhicule choisi pour le faire – un spectacle satirique, Le spectacle quotidienanimé par Jon Stewart – en a surpris plus d’un. M. Carney était à New York lundi alors que les jeux en coulisses se multiplient dans les rangs libéraux à travers le pays et que la course à la direction commence.
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Au cours de l’entrevue de près de 20 minutes, Mark Carney a parlé de sa vaste expérience dans le domaine de l’économie et de la finance, de son opinion défavorable du chef conservateur Pierre Poilievre et du très peu d’appétit des Canadiens pour que leur pays devienne le 51e l’État américain et l’importance de lutter contre les changements climatiques sans imposer un lourd fardeau financier aux Canadiens qui ont déjà du mal à joindre les deux bouts.
Il l’a fait en plaisantant, en échangeant astucieusement avec l’animateur Jon Stewart, en affirmant qu’il est un bon libéral, mais qu’il n’a rien à voir avec le bilan du gouvernement de Justin Trudeau.
A plusieurs reprises, il a reçu les applaudissements du public présent dans le studio.
Généralement, les critiques de sa performance ont été positives. Beaucoup ont noté qu’on ne savait pas que ce grand banquier possédait un sens de l’humour si aiguisé et un sens de la répartie capables de séduire un public. Certains ont soutenu que les comparaisons entre lui et l’ancien chef libéral Michael Ignatieff, qui a mené le parti à la pire défaite de son histoire, ne tiennent pas la route.
Cela dit, combien de partisans libéraux ont vu cette première grande sortie médiatique de Mark Carney depuis la démission de Justin Trudeau ? Combien d’entre eux ont été convaincus de le soutenir lors de la course à la direction ? Un grand mystère, même pour les stratèges libéraux les plus rusés.
Certes, de nombreux Canadiens anglophones adorent cette comédie. Mais s’il veut remporter la course à la direction qui se déroulera dans des délais très serrés – le prochain chef du PLC sera connu le 9 mars – et s’il veut par la suite permettre aux libéraux de sauver les meubles lors de la campagne électorale qui suivra rapidement, Mark Carney devra également trouver un moyen de communiquer plus directement avec les électeurs du pays, et en particulier les électeurs du Québec.
Que l’aspirant au trône libéral fasse preuve de son sens de l’humour auprès Spectacle quotidien risks leaving the voters of Jonquière, Trois-Rivières or Charlevoix indifferent.
Certains d’entre eux auront cependant leur mot à dire dans la course à la direction du CLP. Mais surtout, ils auront le droit de voter aux prochaines élections fédérales.
Si Mark Carney veut prouver rapidement aux Québécois qu’il a un bon sens de l’humour, les plateformes plus familières aux gens d’ici ne manquent pas. Comme Infomanpar exemple, dont 2,4 millions de téléspectateurs ont fait le bilan de l’année le 31 décembre à -.
En coulisses, d’influents libéraux se sont amusés ces dernières semaines à décrire l’ancien gouverneur en termes peu flatteurs : « le fantôme Mark Carney ». Ces libéraux sont irrités de le voir se présenter comme un sauveur du parti alors qu’il a refusé à plusieurs reprises les invitations de Justin Trudeau à se joindre au Cabinet au fil des années.
La dernière tentative fut aussi celle qui conduisit à sa chute. En offrant à Mark Carney le poste de ministre des Finances sur un plateau d’argent au début décembre, le premier ministre a provoqué la démission de Chrystia Freeland le jour même où elle devait présenter l’énoncé économique. La crise politique qui a éclaté a forcé Justin Trudeau à annoncer sa démission le 6 janvier.
Pendant une semaine, La presse et d’autres médias francophones se mettent en quatre pour contacter l’équipe de Mark Carney afin d’obtenir des informations sur ses intentions et son organisation dans le pays. Les appels et les messages sont restés sans réponse.
Parallèlement, la presse anglophone, notamment le quotidien Le Globe et Mail et le réseau CBC, ont été exposés quotidiennement aux agissements et aux agissements de l’ancien gouverneur de la Banque du Canada.
Des doubles standards ? Mardi en début d’après-midi, un responsable des communications nouvellement embauché par l’équipe Carney a finalement répondu aux messages de La presse. Ce responsable s’est excusé, plaidant le manque de personnel pour une organisation qui prend forme. Les effectifs réduits ont cependant eu le temps de communiquer avec la presse anglophone.
Au cours des 75 dernières années, le Parti libéral du Canada a pu accéder au pouvoir en grande partie grâce à un chef québécois à sa tête et à des bases importantes dans la Belle Province. Louis Saint-Laurent, Pierre Trudeau, Jean Chrétien et Justin Trudeau ont mené leurs troupes à la victoire plus d’une fois grâce à ces facteurs.
« Quand on connaît le Québec et ses régions, on peut conquérir le reste du pays. Mais l’inverse n’est pas vrai », soulignait récemment une source libérale. De quoi réfléchir, à quelques jours de l’ouverture officielle de la course à la direction.
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