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la lutte des personnes handicapées pour payer leur fauteuil roulant

Le remboursement intégral promis par Emmanuel Macron tarde à se concrétiser. Pendant ce -, les personnes à mobilité réduite se retrouvent démunies de plusieurs milliers d’euros, tandis que d’autres renoncent même à des chaises adaptées à leur situation.

« Les personnes valides ne paient pas pour marcher. Pourquoi devrions-nous, nous les personnes handicapées, devoir nous ruiner pour nous déplacer ? Depuis cinq ans, Maud Pochic utilise un fauteuil roulant chaque fois qu’elle sort de chez elle. Atteint du syndrome d’Ehlers-Danlos, une maladie invalidante qui provoque fatigue et douleurs chroniques, cet étudiant de 24 ans a choisi de louer un modèle standard, celui-là même qui aide les accidentés dans les hôpitaux ou les personnes âgées dans les hôpitaux. Ehpad. « C’est entièrement pris en charge par la Sécurité sociale, mais c’est du bas de gamme absolu »décrit-elle.

Son fauteuil manuel est une enclume roulante de 16 kg, “pas du tout gérable”ce qui endommage son corps et l’épuise. « Les trois quarts du -, j’ai besoin que quelqu’un me pousse, alors je renonce à sortir. Cela me prive de mon autonomie et cela nuit à mes études et à ma vie sociale »déplore le jeune habitant de Saint-Avertin, près de Tours (Indre-et-Loire). A l’aube de sa vie professionnelle, elle envisage désormais l’achat d’un modèle adapté à sa situation, toujours manuel, mais deux fois plus léger et maniable.

« Cette nouvelle chaire est simple : c’est la clé de mon inclusion.

Maud Pochic, étudiante

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Mais à quel prix ? Le devis indique 3 700 euros. “Et encore une fois, je vise le minimum d’adaptation, sinon je l’aurais facilement pour 5 000 euros”insiste l’étudiant. Or, pour l’achat d’un fauteuil roulant manuel, la Sécurité Sociale ne rembourse qu’environ 600 euros. « Après ma mutuelle, il me restera 1 700 euros à sortir de ma poche »calcule la jeune femme. “Je ne peux pas me le permettre.” Depuis des mois, elle est condamnée, comme tant d’autres internautes ayant répondu à notre appel à témoignages, à chercher une solution ailleurs. Une aide départementale, peut-être, un coup de main familial ou une réforme gouvernementale.

En ce mardi 3 décembre, Journée internationale des personnes handicapées, la question de la couverture des fauteuils roulants en aurait pu être une vieille affaire. En avril 2023, face aux prix “tellement exorbitant” de ces véhicules, Emmanuel Macron a annoncé qu’ils seraient “entièrement remboursé (…) à partir de 2024”. « Une mesure de justice sociale »avait fait valoir le président de la République. Vingt mois et une dissolution plus tard, la concrétisation est toujours en attente.

Un projet a en effet été présenté en début d’année, mais le texte a fait bondir les acteurs du secteur. Le projet prévoyait une prise en charge complète pour certains modèles (facturés jusqu’à 2 600 euros pour un fauteuil manuel et 18 000 euros pour un électrique) et une absence totale de remboursement pour tous ceux qui dépasseraient ces plafonds. Pourtant, les fauteuils adaptés, comme celui que convoite Maud Pochic, dépassent souvent ces montants.

« De nombreux usagers handicapés auraient été exclus et auraient vu leur situation se dégrader, ne pouvant plus prétendre à rien »assure Malika Boubekeur, de l’association handicap APF France.

« Le système actuel n’est pas satisfaisant. Il faut améliorer la situation, pas l’aggraver. »

Malika Boubekeur, conseillère nationale de l’AFP France handicap

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Que deviendra l’engagement du chef de l’Etat sous le gouvernement de Michel Barnier ? Le cabinet du ministre délégué chargé des Personnes handicapées promet de l’honorer dans les semaines à venir. « La concertation a repris et nous espérons boucler le dossier avant la fin de l’année, pour une mise en œuvre effective d’ici septembre 2025 »détaille les équipes de Charlotte Parmentier-Lecocq. “Nous voulons obtenir un remboursement intégral des chaises, avec des garanties pour éviter les trous dans la raquette.”

Sans attendre de savoir à quelle sauce sera servie la réforme, le député écologiste Sébastien Peytavie a déposé en septembre un projet de loi sur le remboursement intégral des fauteuils roulants par l’Assurance maladie. Quitte à court-circuiter l’exécutif. Elle entend ainsi garantir que chaque modèle, quel que soit son prix, soit pleinement pris en charge. Mais les modalités de financement et d’application de sa mesure restent encore incertaines. Son projet de loi, adopté à l’unanimité en commission le 27 novembre, sera débattu mardi 3 décembre ou mercredi 4 décembre à l’Assemblée nationale.

Soutien total «à partir de 2024» ? La promesse présidentielle a trouvé un écho jusqu’à l’Isle-Aubigny, petite commune rurale de l’Aube. Claire Andriot s’y est accrochée. Depuis huit ans, cette femme de 49 ans utilise la même chaise manuelle, qui grince, perd des morceaux et se brise le dos. “Je ne le vois plus en peinture”elle fait rage. En théorie, ce survivant d’un accident de la route aurait pu bénéficier d’un renouvellement au bout de cinq ans, comme le permet la Sécurité sociale. Sauf que la facture allait être salée et elle a décidé de retarder l’échéance.

“Quand on nous promettait un remboursement intégral, j’ai attendu en me disant que ça prendrait quelques mois”dit cette mère célibataire. En vain. En septembre, elle a fini par commander une nouvelle chaise. Le même modèle, pas de folie. « Son prix est de 5 500 euros. Une fois la Sécurité Sociale et la Mutuelle terminées, il me reste 3 600 euros à payer »elle halète. « J’ai dû suspendre la commande dix jours plus tard car une panne de voiture m’a mis dans le rouge. Comment comptez-vous faire avec 1 000 euros d’allocation pour adultes handicapés, une maison à finir de payer et trois enfants étudiants pour aider ?

« Comment comptez-vous vivre correctement dans un fauteuil ? J’en ai marre, c’est humiliant.

Claire Andriot, mère

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Avec les modèles électriques, la facture est encore plus lourde, les restes à charge pouvant atteindre cinq chiffres. Marceau Steinbach en sait quelque chose. Après avoir “demandé toute l’aide possible” pour sa chaise à 34 000 euros, ce jovial Marseillais de 60 ans s’est retrouvé avec un coût pénible d’environ 18 000 euros. « Je n’ai pas le choix : depuis que je suis en fauteuil roulant, j’ai développé une obésité morbide. J’ai besoin de modèles bariatriques, qui coûtent trois fois plus cher. Je rêverais de conduire une 2 CV, mais non, je dois m’acheter un tracteur. Ce chargé de clientèle en situation d’invalidité a dû puiser dans son pécule et contracter un emprunt bancaire “plus de 10 000 euros” avec son épouse. « Sans lui, je ne sais pas où je serais. »il témoigne.

Fabienne Bénassis a décidé de lancer une cagnotte en ligne pour acquérir un modèle pour 29 000 euros. « Ma chaise est tellement fatiguée qu’elle se fige et m’envoie n’importe où, sans compter que les piles sont à plat. Je n’ose plus prendre le bus ou le métro”témoigne cet habitant de Cesson-Sévigné, dans l’agglomération rennaise. Elle a déjà reçu près de 9 000 euros de dons de sa famille, de ses amis et de son entourage, ce qui ne suffira pas à couvrir ses dépenses restantes. A 51 ans, elle envisage d’emprunter à ses proches. « Les chaises deviennent de plus en plus chères, mais les aides ne bougent pas »déplore ce bénéficiaire de l’allocation pour adultes handicapés. « Ces contraintes financières me rendent très anxieuse et le stress aggrave ma maladie. »

Plus que le reste du fardeau, c’est parfois la lutte administrative pour obtenir un financement qui pèse le plus sur les personnes en fauteuil roulant. Assurance maladie, mutuelle, centre départemental des personnes handicapées, fonds d’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, etc. “C’est un parcours du combattant”soupire Isabelle Terrasson, infirmière hospitalière de 40 ans, qui raconte avoir dû se battre pendant deux ans et demi jusqu’à ce que son fauteuil soit entièrement pris en charge en 2022. “Entre--, je me déplaçais avec une chaise totalement inadaptée, ce qui me causait plusieurs blessures aux articulations”she emphasizes, from Dammartin-en-Serve, in Yvelines.

« J’ai travaillé sous morphine avec une chaise qui m’a détruit l’épaule. J’ai pleuré tous les jours.

Isabelle Terrasson, nurse

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Les plus jeunes ne sont pas épargnés. Chaque jour, Séverine Sucra voit son fils Maceo, 19 ans, se déformer dans une chaise électrique qui ne lui va plus. “Il l’a eu à 15 ans et a connu depuis une très forte poussée de croissance.”décrit ce psychothérapeute toulousain qui a initié des démarches de renouveau il y a deux ans. « L’Assurance maladie a d’abord refusé d’en financer une nouvelle »se lamente-t-elle.

« J’ai dû faire appel et menacer d’intenter une action en justice pour finalement obtenir gain de cause fin septembre. »

Séverine Sucra, maman d’un garçon handicapé

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Et à regretter : “Entre--, son dos s’est tordu, ses hanches ont bougé et les efforts du physiothérapeute ont été vains.”

Pour couvrir les dépenses liées au handicap de leur fils, Séverine Sucra et son compagnon ont fondé une association, Hissez Haut Maceo. «C’est beaucoup de charge mentale pour moi, mais cela nous permet d’organiser des événements caritatifs et de bénéficier de dons défiscalisés»décrit-elle. Grâce à cette organisation, le couple paie les factures et survit. « Mais comment faire pour y parvenir seul, sans moyens, sans énergie ? Je me demande si tout n’est pas fait pour sortir de l’épuisement et pour que nous abandonnions.

 
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