Cette comédie délicieuse et élégante, mise en scène par Philippe Lefebvre, revient sur la mystification de Gary-Ajar. Sur France 2 ce lundi soir.
Paris, 1975. Romain Gary (Charles Berling), le célèbre auteur de La promesse de l’aubevient de publier La vie à venir sous un pseudonyme, Émile Ajar. Ce n’est pas la première fois qu’il utilise un nom d’emprunt mais, à ce moment charnière de sa carrière, où le monde littéraire dit qu’il est fini, il veut prouver sa capacité à se renouveler et pousse la mystification jusqu’à avoir cet écrivain de fiction joué par son cousin germain Paul Pavlowitch (Pierre Perrier, Jeux d’influence). En jeu, le prix Goncourt, qu’il a déjà reçu et qu’un romancier ne peut obtenir qu’une seule fois…
A Nice, une petite étudiante, Adèle (étonnante Claire de la Rüe du Can, pensionnaire de la Comédie Française) prépare son sujet de thèse : « Le réenchantement du réel dans l’œuvre de Romain Gary ». La jeune femme, enthousiaste, passionnée, est dans tous ses états : mais qui est cet Ajar qui plagie son auteur préféré ? Pour elle les similitudes sont flagrantes : des personnages construits de la même manière, avec les mêmes obsessions, caractérisés par leur solitude… Ni une, ni deux, la voilà qui « monte » dans la capitale jouer les détectives amateurs pour aller au fond des choses. de cela. Elle est engagée comme serveuse dans le café préféré de l’écrivain et entre bientôt dans sa vie…
Un esprit libre
Ce jeune doctorant aurait existé. Didier Van Cauwelaert le mentionne dans son ouvrage Le père adoptif. Maria Pourchet (Prix de Flore 2023 pour Occidentalelle dit travailler comme romancière grâce à Gary) et François-Henri Desérable (Un certain M. Piekielnyenquête littéraire sur un personnage de Gary dans La promesse de l’aube), duo chic et talentueux, a romancé sa rencontre avec l’écrivain, sa quête de vérité. Avec une grande spiritualité et une légèreté qui n’exclut pas la profondeur. ” Quand j’ai lu le scénario, j’y ai vu quelque chose de ludique qui faisait écho au personnage de Gary. Il est bâti comme ses flashs, avec un côté joueur », confie Philippe Lefebvre, dont la production est juste, fluide, élégante.
“ J’ai ressenti quelque chose de très puissant, simple, essentiel, analyse pour sa part Charles Berling. Gary, c’est tout le temps du désespoir et de l’humour. Cette période où l’esprit est si libre est bonne. Cela donne matière à réflexion. J’ai compris comment ce résistant, immigré, au courage énorme, entretenait une vision élevée qui m’a beaucoup inspiré. Jusqu’à sa note de suicide (dans lequel il révèle officiellement la supercherie, en 1980, NDLR), prodigieux en humour noir. »
Quand Adèle lui fait part de ses doutes, il se défend avec ironie : « D’une manière générale, l’influence de mon travail sur la nouvelle génération n’est pas assez soulignée ! » La jeune femme, qui ne manque ni de culot, ni de charme, ni de fantaisie, mène sa barque sans rien lâcher. Et fait preuve d’un sacré caractère dans cette mi-temps des années 70. Elle côtoie Gisèle Halimi (Anne Charrier), l’avocate de Romain Gary, figure du féminisme, ou encore Jean Seberg (Miranda Raison), son épouse. Chez Gary, la séduction joue forcément un rôle, mais tout n’est, encore une fois, que délicatesse. “ Il avait un énorme appétit sexuel pour les femmes, poursuit l’acteur. Mais ce n’était pas un prédateur. Evidemment, il a du désir pour elle mais il reconnaît son esprit et c’est ce qui prime « .
Charles Berling, qui incarnait Jean Moulin, Robert Badinter ou Léon Blum, n’a pas recherché la ressemblance avec le romancier, arguant du goût de ce dernier pour la fiction. “ Nous avons construit un personnage aussi fantastique que Gary. Je ne voulais pas être trop respectueux, et surtout pas hagiographique», conclut Philippe Lefebvre.
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