une première saison plutôt prometteuse mais inachevée

La sortie de la nouvelle série Zorro en 2024, avec Jean Dujardin dans le rôle titre, a immédiatement attisé la curiosité des fans de l’emblématique justicier masqué. Comment ne pas être intrigué par ce projet, surtout avec une figure aussi charismatique et talentueuse que Dujardin pour reprendre le flambeau de ce personnage mythique ? Ce Zorroréalisé par Benjamin Charbit et Noé Debré, est à la fois une réinterprétation ambitieuse du héros et une tentative de le moderniser pour un public contemporain. Cependant, la série se heurte à des contradictions qui, malgré de nombreux points forts, empêchent cette première saison d’atteindre tout son potentiel. Il est indéniable que Jean Dujardin est fait pour le rôle de Zorro. Avec son look, son humour subtil et son charisme naturel, il incarne à merveille un Zorro vieillissant, désillusionné, mais toujours capable de se transformer en héros.

Ce Zorro n’est plus le jeune justicier intrépide que nous avons connu ; c’est un homme qui a mis son masque de côté depuis deux décennies, mais qui est obligé de le ressortir face à l’injustice croissante dans la ville de Los Angeles. Dujardin joue sur plusieurs registres : il alterne entre mélancolie, ironie et moments de pur héroïsme, tout en restant profondément humain et crédible. Il y a une authenticité dans sa prestation qui donne du relief à ce Zorro un peu fatigué mais toujours prêt à se battre. Pour autant, la série ne se contente pas d’un simple retour nostalgique. Le Zorro de Dujardin est un personnage qui a évolué, qui en a assez du combat et de sa double identité. La série flirte parfois avec l’ironie, jouant sur le décalage entre un héros vieillissant et l’image du justicier intouchable que l’on a dans notre mémoire. Cette relecture postmoderne du personnage, où l’humour et le second degré sont omniprésents, permet à Dujardin de s’épanouir pleinement dans ce rôle.

Pourtant, cette approche ironique soulève une question : Zorro peut-il encore être un héros sans tomber dans la caricature ? Le scénario de cette première saison, bien qu’inventif, souffre parfois d’une certaine dispersion. La série vise à toucher un large public, en mélangeant les genres : comédie, action, satire politique et sociale. Cette diversité est à la fois une force et une faiblesse. D’une part, cela permet d’éviter l’ennui et de renouveler l’intérêt à chaque épisode. Les moments de comédie de situation, notamment avec le personnage de Bernardo interprété par Salvatore Ficarra, apportent une légèreté bienvenue. Les interactions entre Don Diego, sa femme Gabriella (interprétée par la géniale Audrey Dana) et Zorro créent des scènes dignes du vaudeville, qui rappellent les classiques de la comédie. En revanche, cette diversité de tons et d’approches nuit à la cohérence d’ensemble.

La série oscille entre scènes d’action, réflexions politiques et moments d’humour burlesque, sans toujours trouver le bon équilibre. Le triangle amoureux entre Don Diego, Gabriella et Zorro, bien que plein de potentiel comique, finit par devenir un peu trop marquant, au détriment du reste de l’intrigue. On peut regretter que cette première saison s’attarde parfois trop sur des situations comiques un peu répétitives, alors que des problématiques plus profondes, comme la lutte contre l’injustice et la dualité du personnage de Zorro, sont laissées au second plan. Une des dimensions les plus intéressantes de cette nouvelle série Zorro C’est sans doute la satire politique qu’il développe. Don Diego, qui devient maire de Los Angeles, se retrouve rapidement confronté à des intrigues politiques corrompues, orchestrées par des notables véreux qui exploitent le système à leur propre profit. Cette satire de la société moderne, où les riches et les puissants manipulent les lois à leur avantage, est pertinente et bien pensée.

Le personnage de Don Emmanuel, magnifiquement interprété par Éric Elmosnino, incarne à merveille cette classe de dirigeants sans scrupules, prêts à tout pour accroître leur pouvoir, quitte à écraser les plus faibles. Cependant, malgré ce potentiel de critique sociale, la série ne poursuit jamais vraiment cette réflexion. Les aspects politiques de l’intrigue, bien que présents, sont souvent éclipsés par l’humour ou les scènes d’action. On aurait aimé que la série prenne plus de temps pour explorer ces thèmes plus en profondeur, au lieu de se contenter de quelques débordements humoristiques ou caricatures. Zorro, symbole de la lutte contre l’oppression, aurait pu devenir un porte-parole plus puissant dans cette série, mais cette dimension reste finalement trop superficielle. Visuellement, Zorro la version 2024 est un régal. Les décors, tournés en Andalousie, rappellent des westerns spaghetti à l’ampleur et à l’ambition indéniables. La série joue également sur une esthétique légèrement kitsch, qui fait écho aux séries Disney des années 1950.

Cette approche est rafraîchissante et donne un charme particulier à la série. De plus, les scènes où Zorro, cape au vent, galope dans la nuit étoilée, ont une dimension presque poétique, renforçant l’aura mythique du personnage. Cependant, là où la série déçoit, c’est dans l’exécution des scènes d’action, notamment les combats à l’épée. Ces derniers manquent souvent de dynamisme et d’intensité, ce qui est regrettable pour une série centrée sur un héros réputé pour sa maîtrise du combat. La chorégraphie des combats est parfois lente et peu convaincante, ce qui nuit à l’impression générale. Dans une série comme Zorrolà où l’action est une composante essentielle, ces faiblesses sont particulièrement visibles et regrettables. L’une des grandes forces de cette série est d’avoir tenté de moderniser le mythe de Zorro sans trahir son essence. La figure du justicier masqué, protecteur des opprimés, résonne encore aujourd’hui avec force. Pourtant, la série semble hésiter entre hommage respectueux et pastiche comique, sans jamais vraiment trouver son ton.

Où les films OSS117 réussi à parodier un genre tout en restant fidèle à ses codes, Zorro la version 2024 peine à maintenir cet équilibre. La caricature est souvent poussée à l’extrême, notamment dans la relation entre Don Diego et Zorro, qui sont presque présentés comme deux entités distinctes. Cette scission entre les deux personnalités d’un même homme aurait pu être une métaphore intéressante sur la dualité de l’être humain et le poids de la responsabilité héroïque. Or, dans la série, cette approche finit par créer une distance artificielle entre le héros et son alter ego, au point de rendre certaines situations illogiques. Don Diego est présenté comme incompétent et indifférent aux problèmes du peuple, tandis que Zorro est exactement son contraire. Cette dichotomie, bien que cocasse, manque de profondeur et nuit à la cohérence du personnage.

Finalement, la première saison de Zorro en 2024 est une tentative audacieuse de réinventer un héros légendaire, avec des résultats mitigés. Jean Dujardin brille dans le rôle, apportant une touche d’humanité et d’humour à ce Zorro vieillissant et désillusionné. Le scénario, riche d’idées, manque cependant de cohérence, alternant comédie, satire et action sans toujours trouver le juste équilibre. Les thèmes politiques, bien qu’intéressants, sont trop souvent éclipsés par des situations comiques quelque peu répétitives. Enfin, les scènes d’action, essentielles dans une série centrée sur un héros comme Zorro, manquent cruellement d’énergie. Cette première saison pose néanmoins des bases intéressantes pour une éventuelle suite. Avec une meilleure maîtrise du ton et une compréhension plus approfondie des thèmes abordés, Zorro pourrait véritablement se hisser au rang des grandes séries modernes. Mais pour cela, il faudra dépasser le simple pastiche et explorer plus en profondeur la complexité de ce justicier mythique.

Remarque : 6/10. Bref, une réinvention audacieuse mais imparfaite.

Disponible sur Paramount+

 
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