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WAGNER, La Valkyrie, acte I – Paris (Philharmonie)

A l’occasion du centenaire de Pierre Boulez (1925-2016), la Philharmonie de Paris et leOrchestre ressortissant français a offert un hommage complet le 17 janvier : au compositeur (Notations pour orchestre), à l’enseignant et au mentor (Maelstromcréation de Philippe Manoury) et au chef (acte I de La Walkyrie).

Lyricomanie oblige, on confiera à d’autres le soin de commenter en détail la première partie du concert. LE Maelstrom de Philippe Manoury est un morceau court (environ cinq minutes) mais dense, dramatique et énergique, qui n’hésite pas à jouer avec les masses sonores, comme lorsque le piano seul dialogue progressivement avec les contrebasses, les violoncelles puis toutes les cordes en pizz, ou jusqu’à la fin, lorsque des éclats sonores entraînent des silences soudains. Le tournoiement incessant de l’intervalle de quinte, véritable moteur de la pièce, inspiré chez Manoury par l’intervalle de quarte qui fonde le Notation VIII de Boulez, vire à une obsession qui emporte tout, jusqu’au final. Nous sommes toujours ravis de pouvoir applaudir le compositeur d’une création, et nous saluerons donc ici la commande de Radio .

Notationsl’une des pièces orchestrales les plus jouées de Boulez, est d’un autre style. Alternant rythmes vifs et lents, ces pièces compactes (à l’exception de la septième « hiératique », toute en longue grisaille flottante, éprouvante et mystérieuse) exigent une polyvalence exemplaire de la part du chef et de son orchestre. Le tout culmine dans un éclat sonore confinant à la stridence en notation II, joué en dernier. Aussi Béotiens que nous soyons, nous sommes frappés par l’effet physique que produit sur nous une au formalisme si marqué et par les possibilités sonores déployées par un Orchestre National de France en grande forme.

Venons-en au premier jour de Anneau ce qui nous a attiré ici. Au bureau, Thomas Guggeisle jeune prodige qui a récemment dirigé l’Opéra de Francfort, retient notre attention. Sans doute influencé par la première partie, il débute par un prélude au tempo assez rapide, très rythmé, où le premier plan est occupé par le motif ondoyant des contrebasses et des violoncelles tandis que les trémolos des violons et altos servent de toile de fond. Son sens du drame l’emporte, tout comme son attention envers les chanteurs. Le parti pris de transparence des plans sonores n’empêche en rien le déploiement du lyrisme que l’on attend dans la troisième scène, ni le formidable climax sur lequel se termine l’acte.

Le trio vocal relève le défi de la partition et parvient à offrir un véritable moment de théâtre musical qui, finalement, dépasse les réserves exprimées ici.

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Le Jeune ténor héroïque de Klaus Florian Vogt est une proposition connue désormais, et chacun a eu le temps de se faire une opinion. Oserons-nous admettre que cette proposition, ce soir du moins, ne nous convainc pas entièrement ? Bien entendu, le ton d’une clarté intacte, la projection aisée, la présence évidente de l’interprète qui connaît les moindres recoins du rôle (il est le seul à chanter sans partition) contribuent à la réussite de la soirée. Mais on s’attend à ce que Siegmund soit, au moins à mi-chemin de l’acte, un peu plus héroïque et, disons-le, érotique. Certes, on peut se passer des (trop) regrets du concours « Wälse » et il n’est pas nécessaire d’avoir un cachet obscur pour être vaillant. Mais lorsque Klaus Florian Vogt s’aventure dans des accents épiques, le son se durcit, devient désagréable dans le bas médium et un relatif manque de soutien empêche souvent le déploiement de la ligne vocale. Par conséquent, même les moments les plus éthérés, comme la chanson printanière (« Winterstürme wichen dem Wonnemond »), ne constituent pas le summum auquel on pourrait s’attendre.

Son amant et jumeau de la soirée est Johanni van Oostrum. Le duo se connaît bien pour avoir chanté plusieurs Lohengrin (par exemple à Munich en 2023), et ça se voit : en quelques regards ils parviennent à construire une admirable tension théâtrale. La soprano sud-africaine semble en pleine forme dans un rôle qu’elle n’a, sauf erreur, jamais chanté sur une grande scène. Sa déclamation, portée par un beau legato et une grande expressivité, répond agréablement aux exigences de cet acte. La voix a une belle rondeur jusque dans les aigus libres et sonores. Le spectacle est parfois un peu tendu, mais il permet de faire de beaux pianissimi sans problème. Notons simplement l’apparition, dans le forteun vibrato un peu large et une tendance à appuyer systématiquement les notes graves avec un accent, bien qu’émises sans lourdeur. Elle offre à Sieglinde l’interprétation la plus détaillée de la soirée : petite femme terrifiée et écrasée au début, elle devient peu à peu l’amante passionnée qui nomme son amant et lui confie une arme. Un peu plus de familiarité avec le rôle et de liberté par rapport à la partition lui permettront de donner une dimension supplémentaire à son Sieglinde.

Falk Struckmann possède les moyens impressionnants d’un Hunding pétrifiant et sombre. Sa présence glaçante a beaucoup à voir avec l’équilibre du trio. On peut néanmoins regretter que ce talent ne soit pas complété par plus de nuances et d’attention au legato et à l’expressivité, les phrases musicales devenant régulièrement une suite de notes fortes, émises avec force, accompagnées d’un coup de tête.

Le concert a été diffusé en direct sur France Musique et est disponible en écoute sur le site de la radio.

 
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