Les incendies destructeurs qui font rage autour de Los Angeles mettent en lumière le rôle des assureurs. Mais aussi les risques qu’ils devront supporter à cause du changement climatique. Une menace qui va continuer à faire grimper les tarifs des réassureurs, à qui les compagnies d’assurance, notamment belges, peuvent transférer une partie des risques.
« Les assureurs pourront absorber les pertes » liées à Des incendies dramatiques ravagent actuellement la région de Los Angelesen Californie. Cette déclaration rassurante est venue de l’agence de notation Standard & Poor’s (S&P) la semaine dernière, alors que les dégâts causés par l’incendie étaient estimés entre dix et quinze milliards de dollars. Wells Fargo a depuis refroidi ses affirmations, gonflant l’estimation à 30 milliards de dollars, soulignant le coût colossal de la catastrophe en termes de biens détruits.
Les incendies qui ravagent Pacific Palisades et Malibu, deux quartiers huppés de Los Angeles, ont détruit plusieurs milliers de bâtiments, dont la grande majorité vaut en moyenne trois millions de dollars. Cela devrait rendre ces incendies les plus coûteux jamais enregistrés en Californie.estiment plusieurs experts de JPMorgan et S&P, qui s’attendent à une hausse des primes dans un avenir proche. région déjà négligée par de nombreux assureurs, car jugée trop risquée.
L’impact de la catastrophe sur le monde de l’assurance dépassera largement le contexte californien. Les risques financiers liés au changement climatique ne font que s’accentuer partout sur la planète. Les catastrophes survenues à un endroit du globe ont des conséquences en cascade au niveau mondial, notamment via les réassureurs.
Assurance assurance
Ces grandes compagnies internationales sont « l’assurance des compagnies d’assurance ». «Ils permettent de transférer une partie des risques supportés par une compagnie d’assurance. L’assureur se protège contre les risques excessifs pouvant conduire à son insolvabilité. Tous les assureurs qui proposent une assurance habitation le font. Les réassureurs permettent de mutualiser et d’équilibrer les risques sur l’ensemble de la planète», explique Nevert Degirmenci, porte-parole d’Assuralia, la voix du secteur de l’assurance en Belgique.
Ce système coûte évidemment aux assureurs et si les catastrophes se multiplientdans l’un des lieux pris en charge par le réassureur, ses primes augmenteront également. « Les années où il y a eu de nombreuses catastrophes naturelles dans le monde, les prix ont inévitablement augmenté. Ils augmentent donc au fil des années, puisqu’il faut constater que ces événements sont désormais plus fréquents et plus intenses. Mais cela ne signifie pas automatiquement que les compagnies d’assurance répercuteront directement les augmentations des primes de réassurance sur leurs clients. Ils restent libres de les adapter. C’est un choix commercial», explique le porte-parole d’Assuralia.
Pour les réassureurs, 2024, troisième année la plus coûteuse depuis 1980estime Munich Re, l’un des géants allemands du secteur de la réassurance. Celui-ci estime les dommages assurés à environ 140 milliards de dollars, proche de l’estimation de Swiss Re, autre leader mondial, à 135 milliards de dollars. Des montants auxquels il faut ajouter les pertes économiques liées aux catastrophes, qui multiplient ces chiffres par plus de deux.
Un système encore viable ?
Avec l’intensification des phénomènes climatiques destructeurs, il est difficile d’envisager une possible réduction drastique des risques encourus. A court et moyen terme, les montants définitifs à payer pour assurer les assureurs ne devraient donc pas diminuer.
Le système de réassurance a-t-il survécu et reste-t-il supportable ? Les assureurs ne peuvent guère s’en passer, admettent-ils. Ils cherchent tous à se diversifier, à répartir les risques, afin de pouvoir supporter le remboursement en cas de sinistre. “Le système est stable. Il permet d’absorber les risques et d’offrir une couverture aux assurés à des prix raisonnablesrassure Nevert Degirmenci. Mais pour la Belgique, il est temps d’établir un véritable partenariat public-privé, pour répartir les compensations entre assureurs et pouvoirs publics. Lorsqu’il s’agit de dommages climatiques, il est difficile d’avoir une vue d’ensemble des montants et la Belgique, avec son plafond d’indemnisation, pourrait se retrouver dans une situation ingérable. C’est ce qui s’est passé lors des inondations dramatiques de juillet 2021, à la suite desquelles il a fallu établir un protocole exceptionnel pour pouvoir indemniser davantage les victimes, en dépassant ce plafond.
-Il est temps d’établir un véritable partenariat public-privé, pour répartir les compensations entre assureurs et pouvoirs publics.
L’accord public-privé est aussi un souhait exprimé directement par les compagnies d’assurance. Ethias va encore plus loin dans la réflexion en appelant à un « modèle de fusée à quatre étages » pour l’assurance: les assureurs, les réassureurs, les différents niveaux des pouvoirs publics belges et le niveau européen. « Au troisième étage, il faudrait imaginer la création d’unun nouveau fonds régional de réassurance. Elle serait constituée d’une petite partie prélevée sur l’ensemble des primes, afin de pouvoir intervenir en cas de sinistre majeur», explique la porte-parole Albane Lairesse. Le plus haut niveau, au niveau européen, participerait à une solidarité sur le continent, qui serait plus solide et plus durable. Nouvelle façon de répartir les risques.
La Belgique prête en cas de catastrophe majeure ?
En Belgique, la couverture contre les risques de catastrophes naturelles se trouve dans assurance habitation dite « incendie ». Cette assurance, non obligatoire, est abonnés par environ neuf foyers sur dixselon les données de la fédération des assureurs. Une couverture dont les primes ont effectivement augmenté ces dernières années. Mais il a plutôt évolué en fonction de l’indice ABEX, qui suit l’évolution des prix dans le secteur de la construction, et non en fonction de la hausse des primes de réassurance. Cet indice permet, en cas de sinistre, de calculer la valeur du bien à l’état neuf, aux prix actuels, et non le prix payé au moment de l’achat. Ce qui profitera donc également aux assurés, in fine.
Les risques d’inondations et de tempêtes sont parmi les plus fréquents en Belgiquedétaillent plusieurs entreprises. Les assureurs jouent également un rôle d’information lors d’un événement attendu et prévisible. «AG Insurance communique au maximum lors d’événements importants, avec des suggestions sur les mesures préventives de dernière minute qui peuvent encore être prises», explique Lars Vervoort, en charge de la communication de l’assureur. AG travaille également à l’amélioration structurelle des logements à risque.
Au-delà de ces mesures, les assureurs ont compris leur rôle, et leur intérêt direct, pour limiter les effets du changement climatique. En soutenant des investissements plus vertueux, en limitant leurs propres émissions de CO2 et en encourageant les changements de comportement de leurs assurés, ils participer aux efforts nécessaires pour réduire les impacts humains sur l’environnement et le climat. Donc, potentiellement, sur les dégâts causés par les bouleversements affectant le globe dans son ensemble. Et pas seulement des dégâts matériels.
Si les impacts économiques des catastrophes climatiques permettent de constater froidement les sommes perdues, ils ne disent évidemment rien de la catastrophe humaine qui se joue en même temps. La prévention s’est améliorée, notamment grâce à la communication ou aux évacuations préventives, permettant de sauver davantage de vies. Ce qui n’a pas empêché le bilan humain des catastrophes naturelles en 2024 restera lourd, avec quelque 11 000 personnes ayant perdu la vie.
Un chiffre qui rappelle que résumer la lutte contre le changement climatique à la préservation de la planète détourne probablement l’attention du véritable objectif, qui sera toujours de sauver ceux qui y vivent.
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