Presque 25 ans. C’est le temps qu’il a fallu à la société spatiale Blue Origin, créée par le fondateur d’Amazon Jeff Bezos en septembre 2000, pour effectuer son premier vol en orbite. Une prouesse réalisée grâce à sa nouvelle fusée New Glenn. Haut de 98 mètres, soit la taille d’un immeuble d’environ 30 étages, il a décollé avec succès ce jeudi de la base spatiale de Cap Canaveral en Floride, aux Etats-Unis, vers 2h03 heure locale (8h03 Paris).
La mission a atteint son « objectif principal »à savoir la mise en orbite du deuxième étage de la fusée, a indiqué Ariane Cornell, une responsable de Blue Origin lors d’une émission en direct. C’était l’ambition de l’entreprise. « Tout ce qui dépasse (cet objectif) est un bonus »a annoncé son PDG, David Limp, avant le lancement.
En plus de la mettre en orbite, Blue Origin prévoyait de tenter de récupérer le premier étage de sa fusée, le booster. Pour ce faire, elle a prévu de le débarquer de manière contrôlée sur une barge en mer, une manœuvre très complexe. Mais quelques minutes après le lancement, Ariane Cornell confirmait que les équipes avaient “J’ai perdu l’hélice”. Blue Origin a ensuite donné plus de détails dans un post sur le réseau social X. « Nous savions que décrocher la première étape du premier coup était ambitieux. Nous apprendrons, affinerons et appliquerons ces connaissances lors de notre prochain lancement au printemps. Nous sommes ravis du résultat d’aujourd’hui”elle a écrit.
A noter également que le vol n’était pas vide. Le deuxième étage du New Glenn, qui a atteint l’orbite, transportait un prototype du remorqueur polyvalent Blue Ring. Ce vaisseau spatial est destiné à effectuer des opérations dans l’espace et à déplacer les satellites vers leurs orbites finales. Ses fonctions techniques devaient être testées lors de cette première mission.
Rattraper SpaceX
Avec New Glenn, Blue Origin ambitionne de rattraper son grand rival SpaceX. L’entreprise d’Elon Musk a pourtant une bonne longueur d’avance. Elle domine le marché spatial commercial depuis des années avec ses fusées Falcon 9 et Falcon Heavy. Et développe aujourd’hui la fusée la plus grande et la plus puissante jamais créée : Starship. Coïncidence de calendrier (ou pas), SpaceX doit également procéder ce jeudi à un vol d’essai de sa mégafusée. Ce sera cependant son septième.
Blue Origin compte également sur New Glenn pour concurrencer SpaceX dans son domaine : la mise en orbite de satellites commerciaux et militaires, mais aussi de navires et d’astronautes. L’entreprise a déjà signé des contrats avec plusieurs clients, dont l’agence spatiale américaine (Nasa) pour une mission sans pilote vers Mars, et le gouvernement américain pour des missions de sécurité nationale. Côté commercial, la société de Jeff Bezos envisage de déployer des satellites internet pour plusieurs entreprises.
Une compétition qui n’empêche pas Elon Musk d’apparaître comme un bon joueur. Le milliardaire s’est en effet félicité de ce premier lancement réussi de New Glenn sur X. “Félicitations pour avoir atteint l’orbite du premier coup!” »il a posté sur Jeff Bezos. « Merci ! »répondit ce dernier.
Les deux personnalités de la Silicon Valley ont chacune fondé leur société spatiale au début des années 2000. Mais Blue Origin a progressé à un rythme beaucoup plus lent que SpaceX, en partie à cause d’une approche plus prudente en matière de conception. Ce vol inaugural était attendu depuis longtemps et avait été reporté à plusieurs reprises. Cependant, Blue Origin emmène depuis plusieurs années des touristes spatiaux dans l’espace avec un autre modèle de fusée, la New Shepard.
Bon pour le secteur spatial
Pour George Nield, président d’une société promouvant les activités spatiales privées, ce lancement est une bonne nouvelle pour l’ensemble du secteur spatial. « C’est une bonne chose d’avoir de la concurrence, d’avoir le choix. C’est très important pour l’industrie spatiale commerciale, mais aussi pour le gouvernement et la NASA. »il croit. Parce que cela nous permet de proposer un plan B « en cas de problème avec un appareil »a-t-il expliqué à l’AFP avant le vol.
Un avis partagé par de nombreux experts. Dont Scott Hubbard, ancien cadre de l’agence spatiale américaine et professeur à Stanford. “Si j’étais encore un haut responsable de la NASA, je serais ravi d’avoir enfin de la compétition pour le Falcon 9” de SpaceX est entré en service au début des années 2010, a-t-il indiqué dimanche dernier. En plus d’offrir aux autorités américaines la sécurité d’un plan de secours, une concurrence accrue pourrait faire baisser les coûts de lancement, a-t-il estimé.
Il n’en demeure pas moins que la multiplication des lancements est pointée du doigt par les associations environnementales en raison des impacts qu’ils génèrent sur l’environnement. Notamment des pollutions et des nuisances sonores importantes.
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