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Le « plaisir presque sadique » de Netanyahu, les otages, l’avenir du territoire… Guillaume Ancel analyse la situation

l’essentiel
Après 15 mois d’une guerre d’une violence inouïe, les contours d’un accord de cessez-le-feu entre Israël et le Hamas se dessinent. Lenteur des négociations, poursuite du conflit, avenir de Gaza… Guillaume Ancel, ancien officier et auteur de Saint-Cyr, at the Grande Muette school, analyse les enjeux de cet éventuel accord de paix.

La Dépêche du Midi : Malgré de nombreux espoirs de cessez-le-feu depuis le début du conflit, aucun ne s’est concrétisé jusqu’à présent. Pourquoi les négociations sont-elles dans une meilleure position maintenant, après 15 mois ?

Guillaume Ancel : C’est une question de timing avec le retour de Donald Trump. Les discussions ont commencé il y a 13 mois. Depuis décembre 2023, Washington nous dit que nous sommes très proches d’un accord, soutenu par les Américains qui savent très bien qu’un cessez-le-feu à Gaza permettrait d’arrêter la guerre au Moyen-Orient.

Mais (Benjamin) Netanyahou a pris un plaisir presque sadique à faire constamment tomber l’accord, car il sait que si la guerre s’arrête, il risque de perdre le pouvoir et la société israélienne l’interrogera sur le désastre. du 7 octobre et la guerre menée à Gaza…

Donald Trump a déjà déclaré qu’il souhaitait que la guerre prenne fin dès son entrée en fonction. Pour moi, il n’y aura pas d’accord avant celui-ci, Netanyahu ne ferait pas ce cadeau à (Joe) Biden. En face, Biden espère remporter au moins une victoire dans le conflit du Moyen-Orient avant son départ. Il a passé les 15 derniers mois à critiquer Netanyahu tout en fournissant toutes les munitions à Israël pour poursuivre le conflit, le plaçant ainsi dans une position d’incohérence totale.

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Quel est le contenu de cet accord de cessez-le-feu et quelles sont les conditions à respecter par chaque partie ?

Il n’y a rien d’innovant dans cet accord de cessez-le-feu. Nous en sommes exactement au même point qu’en décembre 2023 : l’accord prévoit la fin des combats, un échange d’otages israéliens contre des prisonniers palestiniens, ce qui n’est pas choquant puisque le pays a emprisonné des milliers de Palestiniens sans jugement.

Guillaume Ancel est un ancien officier de l’armée française.
Wikipédia de photos

Quelles conséquences peut-on imaginer pour la bande de Gaza ? Un retour sous occupation israélienne est-il possible ?

Personne n’a de solution durable pour Gaza pour le moment. La cessation des combats ne signifie pas la paix. Le cessez-le-feu sera temporaire. L’Égypte tente de relancer une conférence avec en tête une solution à deux États, mais ni les États-Unis ni Israël n’y sont pour l’instant favorables.

Le Premier ministre veut y imposer un contrôle militaire. L’armée s’y oppose car elle sait que cela entraînerait des pertes quotidiennes. Reste l’option de confier le territoire à un intermédiaire mais Netanyahu ne veut pas en entendre parler, l’extrême droite avec laquelle il mène refusant de négocier avec le Hamas.

Existe-t-il un plan de reconstruction du territoire et qui le financerait ?

Il n’y a pas de plan de reconstruction. On se demande même si les Israéliens ont l’intention de voir Gaza reconstruite, étant donné l’acharnement qui règne sur le territoire. Sans compter que les investisseurs potentiels ne sont pas intéressés à reconstruire quelque chose qui pourrait être détruit en quelques mois par les frappes israéliennes.

Le territoire n’est actuellement pas vivable. Deux solutions se présentent : soit on suit le plan de Netanyahou, soit les Palestiniens se retirent faute de capacité à y vivre. Soit on reconstruit… mais qui commande ? Il ne peut pas s’agir du Hamas, alors quelle autorité prendra le relais ? Israël semble totalement hostile à cette option. Certains veulent même en faire une colonie israélienne.

Ce cessez-le-feu peut-il apaiser les autres conflits israéliens au Moyen-Orient ?

S’il y a un cessez-le-feu à Gaza, les autres conflits cesseront. Les Israéliens se retirent de la frontière avec le Liban. Ils ont déjà détruit à l’explosif tout ce qu’ils pouvaient sur 4 km. La Syrie n’a aucune raison de poursuivre la guerre. L’Iran a été tellement affaibli par cette séquence qu’il a intérêt à ce que le conflit prenne fin. Les Houthis du Yémen ont toujours déclaré qu’ils cesseraient de frapper Israël s’il y avait un cessez-le-feu à Gaza.

Avec la fin du conflit, Israël autorisera-t-il à nouveau les ONG et les journalistes à entrer dans la bande de Gaza ?

Netanyahou sera obligé de le faire. Et je pense que même si la destruction de Gaza est déjà bien documentée, ce sera un choc. Quand on voit l’intensité de la campagne israélienne et le type de munitions utilisées, on ne peut que parler de carnage. Le bilan de 46 000 morts du Hamas se base uniquement sur les décès qui ont pu être enregistrés. En réalité, selon mes calculs, nous sommes plutôt entre 100 000 et 120 000 morts et le nombre de blessés est normalement multiplié par 3,5. La moitié des morts à Gaza sont toujours sous les décombres. Et là on ne compte même pas les morts dus à la situation humanitaire.

 
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