«L’envie de rire ne disparaîtra jamais ! assure le journal satirique français Charlie Hebdo10 ans après l’attentat jihadiste qui a décimé une partie de sa rédaction, dans un numéro spécial consacré notamment au « rire de Dieu » à travers une quarantaine de caricatures.
Dans ce numéro, que l’AFP a pu retrouver en kiosque lundi, l’hebdomadaire se dit “indestructible”, avec, dans un dessin en première page, un lecteur assis sur un fusil d’assaut, lisant, ravi, ce que Charlie « histoire » de 32 pages.
« La satire a une vertu qui nous a aidé à traverser ces années tragiques : l’optimisme. Si nous voulons rire, c’est parce que nous voulons vivre. Le rire, l’ironie, la caricature sont des manifestations d’optimisme. Quoi qu’il arrive, qu’il soit dramatique ou joyeux, l’envie de rire ne disparaîtra jamais”, souligne son directeur, Riss, dans l’éditorial qui revient sur les 10 dernières années marquées, selon lui, par une “situation géopolitique” qui s’est “aggravée”. ».
« Aujourd’hui, les valeurs de Charlie Hebdocomme l’humour, la satire, la liberté d’expression, l’écologie, la laïcité, le féminisme, pour ne citer qu’eux, n’ont jamais été autant remis en question […] Peut-être parce que c’est la démocratie elle-même qui se trouve menacée par un regain de forces obscurantistes », affirme-t-il.
Le 7 janvier 2015, 12 personnes avaient été tuées dans l’attentat mené par les frères Kouachi, deux Français ayant prêté allégeance à Al-Qaïda.
Parmi eux, huit membres de la rédaction : les dessinateurs Cabu, Charb, Honoré, Tignous et Wolinski, la psychanalyste Elsa Cayat, l’économiste Bernard Maris et le correcteur Mustapha Ourrad.
“Je suis Charlie”
Charlie était la cible de menaces jihadistes depuis la publication de caricatures du prophète Mahomet en 2006.
L’attentat a suscité une émotion mondiale et donné lieu à un slogan de soutien : « Je suis Charlie ».
Le 11 janvier 2015, des manifestations ont rassemblé près de quatre millions de personnes à travers la France, avec de nombreux chefs d’État et de gouvernement étrangers dans le cortège parisien.
A la veille du dixième anniversaire de l’attentat, le président Emmanuel Macron a appelé lundi à poursuivre sans « répit » la lutte contre le terrorisme. Il a souligné que le risque “reste important dans nos sociétés”, ce qui “implique qu’il n’y ait pas de relâchement et de vigilance collective”.
Les commémorations auront lieu mardi en présence de M. Macron, de plusieurs ministres et de la maire de Paris, Anne Hidalgo.
Ils débuteront à 11h30 (10h30 GMT) dans le XIe arrondissement de Paris, où Charlie Hebdo avait ses locaux en 2015, et se poursuivra boulevard Richard Lenoir, où le policier Ahmed Merabet a été abattu. Elles se termineront à 13h10 (12h10 GMT) par un hommage aux victimes du magasin Hyper Cacher, porte de Vincennes : quatre personnes de confession juive y ont été tuées le 9 janvier 2015.
Dessiner sa « colère »
Dans son numéro spécial, Charlie Hebdo publie une série de caricatures sur le thème #LaughingatGod. L’hebdomadaire, dont la ligne anticléricale n’a jamais varié, a lancé fin 2024 un concours international pour les dessinateurs de presse, les invitant à « dessiner[r] votre colère contre l’influence de toutes les religions sur vos libertés.
Parmi 350 dessins reçus, près de 40, « les plus efficaces et les plus aboutis », ont été publiés.
Parmi eux, l’un représente un Christ en croix se filmant avec un téléphone, avec un sous-titre prévenant que « le petit oiseau va sortir » ; une autre montre une mère et son enfant dans un paysage de ruines se disant : « un dieu, ça va, trois, bonjour dommage » ; et dans une troisième, un designer se demande si dessiner « un gars qui dessine un gars qui dessine Mohammed, est-ce que ça va ? »
Le journal publie également les résultats d’une étude de l’institut Ifop pour la Fondation Jean-Jaurès réalisée en juin 2024 indiquant que 76 % des Français estiment que « la liberté d’expression est un droit fondamental » et que « la liberté de caricature est l’un d’eux. Par ailleurs, 62% des personnes interrogées se déclarent favorables au « droit de critiquer outrageusement une croyance, un symbole ou un dogme religieux ».
Lundi, le procès de l’homme qui a attaqué deux personnes avec un hachoir en septembre 2020 devant les anciens locaux de Charlie Hebdo ainsi que cinq de ses proches, soupçonnés de l’avoir motivé et soutenu, ouverts devant la cour d’assises spéciale pour mineurs de Paris.
Zaheer Mahmood pensait s’en prendre aux employés de Charlie Hebdoignorant que le journal avait quitté ses locaux après l’attaque de 2015. Les six accusés viennent tous de la même région rurale du Pakistan.
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