En Suisse, 48 attaques contre des distributeurs automatiques ont été recensées en 2024, soit +50% par rapport à 2023. Une augmentation du recours aux explosifs alarme les autorités.
Kari Kälin / ch médias
A la toute fin de l’année, ils ont encore frappé. Dimanche dernier, peu avant 3 heures du matin, des inconnus ont fait sauter un distributeur automatique à Zizers (GR). Ils ont volé de l’argent liquide et causé des dégâts matériels considérables, a indiqué la police cantonale. Elle a ouvert une enquête auprès de l’Office fédéral de la police (Fedpol) et sous la direction du Parquet fédéral. Ce dernier est responsable de délits liés aux explosifs.
Des inconnus ont fait sauter un distributeur automatique à Zizers.Image : Police des Grisons
Depuis 2018, les distributeurs automatiques de billets sont de plus en plus dans la ligne de mire des criminels en Suisse. En 2022, Fedpol a enregistré un pic de 57 attaques. L’année suivante, la situation s’améliore quelque peu (32 attentats) avant de se dégrader à nouveau en 2024 (48 attentats). Les malfrats opèrent avec des explosifs ou des gaz. Ils forcent également les machines, arrachent les cassettes de billets à l’aide d’une corde ou trafiquent le logiciel, qui donne alors l’ordre de recracher les billets.
Les récents événements de Zizers illustrent une évolution inquiétante : cette année, des explosifs ont été utilisés dans 28 cas – un record. Ce type de braquage moderne est particulièrement dangereux car les débris éjectés lors de l’explosion peuvent atteindre des passants non impliqués. Certains guichets automatiques sont situés dans des immeubles à appartements.
L’encre rend l’argent inutilisable
En moyenne, cela représente une attaque par semaine dans notre pays. De quoi inquiéter les politiques. «Les statistiques montrent que nous ne parvenons pas à endiguer ce phénomène», a déclaré le conseiller national vaudois Olivier Feller (PLR) lors de la session d’automne. Une solution existe cependant : il suffirait d’équiper les machines d’un antivol, notamment d’encre qui pulvériserait automatiquement les billets et les rendrait ainsi inutilisables :
« Plusieurs pays comme l’Irlande, la Belgique, la France et la Suède ont introduit une telle obligation, qui s’avère efficace »
En 2022, l’Institut médico-légal de Zurich et Fedpol ont effectué des tests d’explosion sur des distributeurs automatiques, c’est violent. Image : fedpol
-Par 146 voix contre 36, le Conseil national a approuvé un postulat d’Olivier Feller qui appelle à une meilleure protection contre ce phénomène. Le ministre de la Justice, Beat Jans, a estimé qu’une seule mesure ne suffisait pas à accroître la sécurité. C’est pourquoi Fedpol poursuit sa collaboration en matière de prévention avec les banques, les exploitants de distributeurs automatiques et la police cantonale. Objectif : développer ensemble des « bonnes pratiques ». Le Conseil fédéral déclare observer des tendances positives et rejette donc l’intervention de Feller.
Fedpol, de son côté, a récemment rendu compte de ces tendances positives sur Linkedin. Ainsi, en 2024, les liquidités pourraient être récupérées dans moins de la moitié des cas. Et Fedpol a élucidé, en septembre, l’une des plus grandes enquêtes contre les auteurs d’attaques de distributeurs automatiques de billets, en coopération avec Paris et Berlin. La police française a arrêté treize hommes soupçonnés d’avoir fait exploser des dizaines de machines en France, en Allemagne et en Suisse. Ils avaient mis la main sur plusieurs centaines de milliers de francs.
Ce gang organisé a son siège aux Pays-Bas. C’est là qu’agissent les réseaux criminels, dont les membres sont généralement issus de l’immigration marocaine. Ce sont ces groupes et gangs roumains qui commettent la plupart des attentats à l’explosif en Suisse.
Dès leur arrivée, ils sont immédiatement éclipsés
Selon les autorités, les opérations sont de plus en plus violentes. Elles ne durent que quelques minutes et sont réalisées par trois ou quatre personnes. Les enquêtes indiquent que ces spécialistes du crime louent des locaux à l’étranger, presque comme une base logistique, puis traversent la frontière dans des voitures volées : ils arrivent, ils font tout sauter et disparaissent en un clin d’œil.
Les banques ne restent pas les bras croisés. Certains misent déjà sur une encre anti-vandalisme, protègent mieux leurs distributeurs avec des volets roulants ou y déposent moins de liquide. En mai, après une série d’attentats, les banques cantonales de Neuchâtel et du Jura n’ont pas hésité à fermer plusieurs appareils situés pour la plupart en périphérie. La Suisse semble néanmoins intéresser particulièrement les voleurs. Selon l’Office fédéral de la police, l’exiguïté du territoire et la densité du réseau de distributeurs expliquent cet attrait.
(Adaptation française : Valentine Zenker)
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