En 2024, le président Vladimir Poutine a renforcé son emprise sur le pouvoir et a cherché à contrer l’isolement de la Russie par rapport à l’Occident, provoqué par la guerre en Ukraine. Il est également confronté à des défis persistants, avec une attaque meurtrière perpétrée par des hommes armés à Moscou et une incursion des troupes de Kiev sur son territoire.
Alors que la guerre qui dure depuis près de trois ans entre dans une nouvelle phase potentiellement cruciale, sur fond de nouvelle administration américaine et de son soutien incertain à Kiev, voici un retour sur la façon dont s’est déroulée l’année pour M. Poutine :
Janvier : Une campagne présidentielle sans véritable adversaire
M. Poutine brigue un cinquième mandat alors que ses principaux opposants sont emprisonnés ou exilés à l’étranger. Dans un défi rare, des milliers de Russes ont fait la queue dans le froid de janvier pour signer des pétitions de soutien à un opposant improbable. Boris Nadejdin, député de 60 ans critique de la guerre, a obtenu les 100 000 signatures nécessaires pour se présenter aux élections. Les autorités électorales l’ont finalement empêché de se présenter. Pourtant, le soutien qu’il a reçu reflète le sentiment anti-guerre et le désir de compétition politique du public, ce qui est embarrassant pour M. Poutine.
Février: Alexeï Navalny meurt en prison
Le 16 février, Alexei Navalny, ennemi de longue date de Vladimir Poutine, est décédé dans une colonie pénitentiaire de l’Arctique alors qu’il purgeait une peine de 19 ans de prison pour des accusations largement considérées comme politiquement motivées. La nouvelle de sa mort à l’âge de 47 ans a choqué le monde et a privé l’opposition russe de son leader le plus charismatique. Aucune cause exacte du décès n’a été donnée; sa famille et ses alliés ont blâmé le Kremlin, qui a nié toute implication. Des dizaines de milliers de personnes en deuil ont assisté à ses funérailles à Moscou deux semaines plus tard en signe de défi.
Mars : le massacre d’un concert éclipse la victoire électorale de M. Poutine
Le 17 mars, M. Poutine a remporté son triomphe électoral tant attendu, qui le maintiendra au pouvoir jusqu’en 2030. Cela intervient après la répression la plus sévère contre la dissidence depuis l’époque soviétique. Cinq jours plus tard, des hommes armés ont pris d’assaut une salle de concert dans la banlieue de Moscou, tuant plus de 140 personnes et incendiant la salle. Un groupe affilié au groupe État islamique a revendiqué la responsabilité de l’attaque, même si le Kremlin, sans preuve, a tenté de rejeter la responsabilité de l’attaque la plus meurtrière sur le sol russe depuis près de deux décennies sur l’Ukraine. L’attaque a stupéfié la capitale et a ravivé le souvenir d’autres attaques survenues au cours des premières années de la présidence de M. Poutine.
Juin : M. Poutine se rend en Corée du Nord pour renforcer les liens
M. Poutine a effectué une visite de deux jours en Corée du Nord en juin – sa première en 24 ans – alors que les deux pays approfondissent leurs liens dans un contexte d’affrontements croissants avec Washington. L’accord signé par M. Poutine et le dirigeant nord-coréen Kim Jong Un prévoit une assistance militaire mutuelle si l’un ou l’autre pays est attaqué. Le nouvel accord marque leur lien le plus fort depuis la fin de la guerre froide, renforçant les inquiétudes à Washington et à Séoul.
Juillet : le journaliste Evan Gershkovich condamné lors d’un procès dénoncé comme une mascarade
Le journaliste du Wall Street Journal Evan Gershkovich, arrêté en mars 2023 et accusé d’espionnage, a été reconnu coupable et condamné à 16 ans de prison au terme d’un procès expéditif. Ses employeurs et le gouvernement américain ont dénoncé le processus comme étant une mascarade et ont rejeté les accusations comme étant fabriquées de toutes pièces. Sans présenter de preuves, les autorités ont affirmé qu’il collectait des informations secrètes pour le compte des États-Unis. M. Gershkovich, fils américain d’immigrés soviétiques, a été le premier journaliste occidental arrêté pour espionnage dans la Russie post-soviétique.
Août : échange massif de prisonniers et invasion de l’Ukraine à Koursk
Le 1er août, Washington et Moscou ont procédé au plus grand échange de prisonniers Est-Ouest de l’histoire post-soviétique. Parmi les personnes libérées figuraient M. Gershkovich et son compatriote américain Paul Whelan, ainsi que d’éminents dissidents russes, tels que Vladimir Kara-Murza et Ilya Yashin. L’accord multinational a permis de libérer une vingtaine de personnes, dont Vadim Krasikov, condamné à la prison à vie en Allemagne pour le meurtre d’un ancien militant tchétchène à Berlin.
En août également, l’Ukraine a lancé une incursion surprise dans la région russe de Koursk, le plus grand raid transfrontalier mené par les forces de Kiev. L’événement a mis en lumière les vulnérabilités de la Russie et a porté un coup embarrassant au Kremlin, puisque des dizaines de milliers de civils ont fui la région. Le gros de l’armée russe étant engagé dans l’est de l’Ukraine, il restait peu de troupes pour protéger la région de Koursk. Les forces russes ont depuis repris le contrôle d’une partie du territoire, mais n’ont pas encore réussi à déloger complètement les troupes de Kiev.
Septembre : M. Poutine se rend en Mongolie sans crainte d’être arrêté
M. Poutine s’est rendu en Mongolie, un allié régional, dans une démarche largement considérée comme une tentative de contrer les efforts occidentaux visant à l’isoler. La Mongolie fait partie des pays qui ont ratifié un traité établissant la Cour pénale internationale, qui a émis en 2023 un mandat d’arrêt contre M. Poutine pour des crimes de guerre présumés en Ukraine. La Mongolie a ignoré les appels à l’arrestation du dirigeant russe et lui a réservé un tapis rouge, les deux pays signant des accords sur l’approvisionnement en énergie et la modernisation des centrales électriques.
Octobre : les États-Unis affirment que les troupes nord-coréennes sont en Russie
En octobre, le Pentagone a annoncé que la Corée du Nord avait envoyé environ 10 000 soldats en Russie pour participer aux combats contre l’Ukraine – une décision qui, selon les dirigeants occidentaux, va intensifier la guerre et bouleverser les relations en Asie. Moscou et Pyongyang sont restés silencieux sur les allégations de déploiement.
M. Poutine a également accueilli un sommet du bloc des nations BRICS, auquel ont participé les dirigeants ou représentants de 36 pays, ce que beaucoup ont considéré comme une preuve de l’échec des efforts menés par les États-Unis pour isoler la Russie.
Novembre : victoire de Trump et nouveau missile russe meurtrier
L’ancien président Donald Trump a remporté un nouveau mandat à la Maison Blanche en novembre, faisant craindre que son administration ne réduise son soutien militaire à l’Ukraine et la force à négocier avec Moscou. L’actuel président Joe Biden a autorisé Kiev à utiliser des armes à longue portée fournies par les États-Unis pour des frappes plus approfondies sur le sol russe.
La Russie a répondu en tirant un nouveau missile balistique hypersonique de portée intermédiaire – appelé Oreshnik – sur une ville du centre de l’Ukraine. M. Poutine s’est vanté que le missile ne pouvait pas être intercepté par la défense aérienne. Il a averti que Moscou pourrait l’utiliser pour de nouvelles frappes contre l’Ukraine et potentiellement pour frapper les installations militaires des pays de l’OTAN fournissant un soutien militaire à l’Ukraine.
Décembre : un allié tombe, une bombe secoue Moscou et un accident d’avion suscite des excuses
Le gouvernement du dirigeant syrien Bachar al-Assad s’est effondré après une offensive éclair des rebelles. M. Poutine a accordé l’asile à M. Assad, un allié de longue date de Moscou, et à sa famille. L’échec du Kremlin à empêcher sa chute neuf ans après son intervention militaire pour soutenir son régime a révélé les limites de la puissance de la Russie et entaché son influence internationale à un moment crucial de sa guerre en Ukraine.
Puis, une attaque embarrassante ramena la guerre dans les rues de Moscou. Le lieutenant-général Igor Kirillov, chef des forces russes de protection contre les radiations, la protection biologique et chimique, a été tué aux côtés d’un de ses collaborateurs par une bombe placée à l’extérieur de son bâtiment. M. Poutine a qualifié l’assassinat de M. Kirillov d’« erreur majeure » des agences de sécurité.
Le dernier week-end de l’année, M. Poutine a présenté ses excuses pour ce qu’il a qualifié d’« incident tragique » dans l’espace aérien russe. Il s’agit du crash, le 25 décembre, d’un avion de ligne azerbaïdjanais qui a tué 38 personnes au Kazakhstan voisin. Sa déclaration intervient alors que les allégations se multiplient selon lesquelles l’avion aurait été abattu par les défenses aériennes russes qui tentaient d’arrêter une attaque de drone ukrainien près de Grozny, en Tchétchénie. Même si les responsables russes ont reconnu que les systèmes de défense aérienne fonctionnaient, les excuses présentées par M. Poutine au dirigeant azerbaïdjanais ne vont pas jusqu’à affirmer que Moscou en assume la responsabilité.
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