Il y a ceux qui ne voulaient pas rater cette date symbolique, les curieux impatients de toucher une monnaie annoncée pour trois ans, les fanatiques des « collectionneurs », les généreux désireux d’offrir le cadeau tendance de Noël 2001. Les Français ont réservé hier un accueil enthousiaste à leurs premiers euros en espèces sonnantes et trébuchantes.
Peut-on parler de précipitation ? A Paris, les banques, les postes et les bureaux de tabac étaient toujours pleins de monde à longueur de journée, assaillis par des curieux de tous âges qui arrivaient parfois dès l’aube. Dès minuit jeudi, les passionnés traînaient dans le froid chez les buralistes nocturnes. Devant un bureau de tabac, près des Champs-Élysées, de minuit moins le quart, une dizaine de personnes attendaient. Un collectionneur a dépensé 1 500 francs pour acheter quinze sachets.
A la poste de la rue du Louvre, la plus grande de France restée ouverte toute la nuit, près de 200 sacs étaient déjà partis au bout de vingt minutes. Dans un buraliste du centre-ville de Toulouse, près de 400 sachets ont été vendus en trois heures.
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Cependant, au-delà du flux de ceux qui voulaient être les premiers Européens à empocher les pièces, nous avons plutôt vu une foule régulière, sans longues files d’attente. Dans le sud-est de la France, la neige a même relégué au second plan l’achat de kits. A Marseille, les clients ne se pressaient pas aux guichets.
J’ai reçu 50% de clients en plus et, en fin de matinée, la moitié des kits avaient disparu
Hier soir, le stock de sachets de 50 millions d’euros était bien engagé. Les bureaux de tabac en ont vendu 4,3 millions sur les 6 millions mis à leur disposition. Selon Michel Arnaud, président de la Confédération syndicale du commerce de détail, sur 100 clients entrant dans un bureau de tabac vendredi matin, quatre-vingts ont acheté un ou plusieurs sachets. « J’ai reçu 50 % de clients en plus et, en fin de matinée, la moitié des kits étaient partis », raconte Bruno Raphard, à Lanton, dans le bassin d’Arcachon.
A Bordeaux, dès 16 heures, certains buralistes étaient en rupture de stock. Dans le même -, La Poste faisait état de la distribution de 30 % de ses 9 millions de sachets, dont 600 000 en Île-de-France, malgré la grève qui a touché ses bureaux parisiens. Du côté des banques, où la distribution s’effectuait généralement selon la règle d’un sachet par titulaire de compte, les stocks ont été moins épuisés. La Fédération bancaire française estime que 15 % – soit 5 millions – des 33 millions de kits mis en place ont été vendus. Chez BNP Paribas, « 10 à 15 % du stock de 2,7 millions de sachets » ont déjà été écoulés vendredi et la banque s’attend à « un afflux encore plus important samedi ». « Le premier jour de distribution […] s’est déroulé de manière satisfaisante, grâce notamment aux renforts recrutés par le secteur bancaire pour la période transitoire », se félicitent les banques.
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Euro-impatience
Quant à la Banque de France, la distribution n’a guère été perturbée et 98 % des agences ont réalisé des ventes ; trois syndicats ont appelé à la grève mais le mouvement n’a pas eu le succès escompté. Selon la direction, il y avait 9% de grévistes pour le réseau, 7% pour les services centraux et 16% pour les syndicats.
La journée s’est déroulée dans des « conditions satisfaisantes », a sobrement commenté le ministère des Finances. « Il y a une vraie euro-impatience, pas seulement de la curiosité », a constaté François Patriat. “Les gens ont le sentiment de participer à un événement qu’on ne vit qu’une ou deux fois dans sa vie, peut-être même une fois par siècle”, a déclaré le secrétaire d’État chargé des PME. Seul revers de cet euro-enthousiasme, c’est que le président du Rassemblement pour la France (RPF), Charles Pasqua, a annoncé avoir déposé un référé devant le Conseil d’Etat contre la distribution des euros.
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