Deux arrosoirs pour enfants rouges et verts sont suspendus devant un bidon en plastique de 300 litres dans une cour d’école : à Chevreuse, comme partout en France, la récupération des eaux de pluie gagne du terrain au sein d’une population marquée par des épisodes successifs de sécheresse hydrique.
En habituant les écoliers à puiser l’eau aux collecteurs plutôt qu’au robinet pour arroser leurs potagers, la maire Anne Héry-Le Pallec veut “sensibiliser” les quelque 6 000 habitants de sa ville, concernés par les restrictions d’usage de l’eau en les étés 2022 et 2023.
Ces dernières années, grâce à une subvention régionale, elle a distribué environ 150 récupérateurs d’eau de pluie aux habitants de la ville qui compte « 2.800 logements, dont 1.400 pavillons » et presque autant de pelouses « que certains ne supportent pas de voir jaunir entre juillet et juillet ». et juillet ». et août.
Preuve de cette frustration grandissante des jardiniers amateurs ou de la prise de conscience de la fragilité de la ressource en eau, les ventes de récupérateurs d’eau de pluie ont explosé ces dernières années. « Depuis 2019, nous avons enregistré une croissance de 26,3 % en cinq ans. Il y a de très fortes variations selon les années, car c’est un marché qui dépend beaucoup des conditions climatiques », selon Chloé Grave, responsable de gamme des marques Gamm Vert et Jardiland.
Le produit phare de ce marché qui pèse 44 millions d’euros en 2023, soit “un peu moins de 5% du marché total du jardin”, est le collecteur mural de 300 litres, relié à la gouttière.
Si cette pratique est millénaire, les sécheresses de 2003 et 2005 ont poussé les autorités à légiférer et le Grenelle de l’environnement a abouti au premier texte encadrant cette pratique, le décret du 21 août 2008, qui « a un dogme est un un peu cassé», explique Thomas Contentin, président de l’Union française des industriels des eaux pluviales (Ifep). Ce texte «autorisait l’introduction dans les bâtiments d’une autre ressource que l’eau potable, en complément de l’eau de pluie», précise Contentin.
Laver les sols ou tirer la chasse d’eau
Un décret de juillet a élargi les usages et autorisé également l’utilisation des eaux grises (rejets des douches, baignoires, éviers, machines à laver) pour des usages externes, comme l’irrigation, mais aussi pour des usages internes, comme le lavage des sols ou la chasse d’eau des toilettes. Toutefois, les usages hygiéniques (bain, douche) et alimentaires restent interdits. «C’est vraiment de l’eau non potable pour des usages non potables», confirme M. Contentin.
Même si la consommation privée d’eau a diminué ces dix dernières années, un Français consomme toujours en moyenne 148 litres d’eau par jour, selon le Centre d’Information sur l’Eau, créé par des professionnels.
Les toilettes, aujourd’hui majoritairement alimentées en eau potable, représentent, selon cette Source, 20 % de cette consommation. Mais les usages évoluent, notamment dans les bâtiments publics, qui sont de plus en plus équipés de systèmes de récupération.
«Excellente solution»
Chez les particuliers, les systèmes de récupération des eaux de pluie à usage intérieur font généralement appel à un réservoir enterré de 6 000 à 8 000 litres équipé d’un filtre et relié à un système de pompage. Selon Thomas Contentin, « on estime qu’entre 15 000 et 20 000 logements sont équipés chaque année, soit un peu moins de 10 % des logements neufs », une demande qui « croît régulièrement ».
Outre les économies budgétaires potentielles et la préservation des cours d’eau, il souligne le rôle potentiel de la valorisation dans la gestion des eaux pluviales, « pour contribuer à prévenir les inondations » et appelle à des réglementations plus restrictives : « Cettele minimum toute nouvelle construction doit être équipée dès le départ d’un réseau de séparation” afin qu’un système de récupération puisse ensuite être installé.
Mais « un problème qui est mondial »
« C’est une excellente solution » pour récupérer l’eau de pluie « dans le cadre de l’irrigation » des particuliers, des entreprises ou des collectivités, estime Mélanie Dajoux, avocate et coordinatrice de projets eau et biodiversité pour France Nature Environnement Auvergne/Rhône-Alpes.
« Mais c’est une solution hyperlocale à un problème mondial », ajoute-t-il. Elle plaide pour des solutions plus ambitieuses en matière de gestion des eaux pluviales, comme laisser un lopin de terrain au pied des immeubles « au lieu de tout asphalter » et permettre ainsi à l’eau de s’écouler plus facilement dans les nappes phréatiques ou, à minima, limiter les sécheresses des sols.
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