- Auteur, Isidore Kourwonou avec Simon Gongo
- Rôle, BBC Afrique
- Rapport de Dakar et Ouagadougou
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il y a 15 minutes
Le Burkina Faso connaît une situation particulière ces dernières semaines, avec la flambée des prix des produits de première nécessité. Le coût de certains produits sur le marché est passé du double au double, voire plus, laissant le citoyen moyen dans un désarroi total.
Au marché Paglayiri, au sud de Ouagadougou, la capitale burkinabè, les allées sont clairsemées, soulignant la rareté des clients qui ont énormément de mal à venir faire leurs courses.
Selon Lucie Yerbanga, propriétaire d’un magasin sur ce marché, le phénomène a débuté en octobre dernier. «Cela nous dépasse. Le riz, le pétrole, tout a augmenté. Nous ne savons même pas où aller », confie-t-elle au correspondant de BBC Afrique dans le pays. Ces augmentations sont hors de portée du Burkinabè moyen.
Le litre d’huile, selon elle, valait 1 000 FCFA. Mais depuis octobre, le prix a grimpé en flèche et se situe désormais à 1 400 FCFA. « Nous avons payé 22 000 FCFA pour 50 kg de riz. Aujourd’hui, c’est devenu 25 ou 26 000 FCFA », raconte-t-elle.
La situation semble intenable pour les revendeurs eux-mêmes qui ne parviennent pas à écouler correctement leurs produits. « Vous nous voyez assis ici, nous ne travaillons pas, nous ne vendons pas. C’est compliqué», ajoute Mme Yerbanga.
“Rien n’explique la fluctuation des prix”
Dans un magasin de céréales un peu plus loin, dans le même marché de Paglayiri, Marturin Zida repart très déçu de ce qu’il vient de constater. Selon lui, il n’y a aucune explication à la fluctuation quotidienne des prix.
« À chaque fois, il n’y a pas de prix fixe », regrette-t-il. Pour lui, le Burkinabè moyen qui gagne moins de 100 000 FCFA ne peut pas s’en sortir. Le maïs, le riz et le pétrole ont vu leurs prix augmenter sur le marché.
« La vie est devenue chère ici. Vous pouvez acheter aujourd’hui et le lendemain, vous revenez et ils vous disent que le prix a augmenté, au même endroit », explique M. Zida.
Le débat sur l’augmentation des produits de première nécessité concerne principalement le prix des pétroles. En effet, le Burkinabè est un gros consommateur de pétrole, qu’il s’agisse de l’huile de coton, de l’huile d’arachide ou de l’huile de palme, selon les responsables de la Ligue des consommateurs burkinabè (LBC).
Malheureusement, le prix du pétrole a augmenté de façon exponentielle, laissant les ménages sans voix. « Le bidon d’huile coûtait 17 000 FCFA. Mais aujourd’hui, on le trouve chez certains vendeurs à 22 000 ou 23 000 FCFA. C’est trop », souligne Maturnin Zida, qui ajoute ne pas comprendre d’où vient une augmentation aussi surprenante.
« Tout a augmenté sur le marché. Mais en ce qui concerne le prix du pétrole, c’est trop », renchérit Lucie Yerbanga.
Les raisons invoquées par les autorités burkinabè
Les autorités du pays ne sont pas indifférentes à cette situation qui devient de plus en plus insupportable pour la population. D’ailleurs, le standard du Ministère en charge du Commerce, selon le service du contrôle des prix, n’a cessé de sonner, les gens voulant comprendre ce qui se passe réellement.
Olivier Kiema, directeur général du contrôle économique et de la répression des fraudes au ministère du Commerce, indique que la flambée des prix des produits de première nécessité n’est pas la faute des commerçants. “Il ne s’agit pas d’une augmentation unilatérale pour les commerçants”, a-t-il d’emblée déclaré.
« Après avoir recherché les origines, nous avons découvert que par exemple en matière d’huiles, seulement 20 % des huiles sont produites localement, même s’il s’agit principalement d’huile de coton. Actuellement la campagne n’a pas encore commencé», dit-il, précisant que 70% des huiles que les Burkinabè utilisent sont des huiles importées qui viennent notamment d’Indonésie, du Togo et de Côte d’Ivoire, même si elles arrivent à 5% de ces deux derniers pays. .
“C’est pour dire que les augmentations que nous avons observées se situent principalement au niveau international”, ajoute-t-il.
M. Kiema note qu’en Côte d’Ivoire, c’est principalement l’huile de palme qui est importée au Burkina. « Là, on a constaté que c’était dû à une mauvaise saison des palmiers. La production n’était pas bonne. Cela signifie qu’il existe des restrictions à l’exportation à ce niveau.
Le plus grand fournisseur de pétrole du Burkina Faso est l’Indonésie, selon lui. Le Directeur Général du Contrôle Economique et de la Répression des Fraudes indique qu’il y a trois phénomènes auxquels nous assistons chez le fournisseur.
« Premièrement, il y a la hausse du dollar. En octobre, le prix était de 597 CFA. Aujourd’hui nous sommes à 637 CFA», explique-t-il. Ensuite, poursuit-il, il y a le pétrole lui-même qui a vu son prix augmenter. Et enfin le coût du transport. « Il semblerait que nous ne trouvions même pas de conteneurs pour importer les huiles au Burkina Faso. »
Le ministère du Commerce suit donc régulièrement ces augmentations à travers ses contrôles. « C’est souvent justifié », selon Olivier Kiema qui dit de se méfier des commerçants tentés d’exagérer en termes de prix sur le marché burkinabé.
Une police derrière les commerçants
Dans ce type de situation, les autorités reconnaissent qu’il y a des commerçants qui surenchérissent. C’est pourquoi le ministère du Commerce est vigilant pour limiter l’exagération des prix des produits.
« Dès l’arrivée des importateurs, nous allons prendre leur fiche de composition des prix. Nous examinons leurs tarifs et les prix qu’ils proposent. Si ce n’est pas justifié, nous pouvons les sanctionner pour cela», précise Olivier Kiema.
Ce dernier met en garde les commerçants car, dit-il, son institution a reçu des instructions fermes pour les contrôler et les sanctionner. « Tout dérapage sera sanctionné conformément à la loi. Autrement dit, en cas d’augmentation exagérée des prix ou de réduction des quantités de produits, nous serons fermes. Le magasin sera fermé jusqu’à nouvel ordre. »
Il ajoute que si le ministère découvre des produits susceptibles de menacer la vie des populations, l’auteur « ira en prison ».
Au niveau du ministère burkinabè du Commerce, il y a des produits dont les prix sont fixes et, pour d’autres, les marges sont fixes. « Par exemple au niveau des importations, l’État accorde 12 % des marges pour les huiles importées, 12 % pour le riz, 15 % pour le sucre. Ce sont donc les marges qui sont fixes», explique M. Kiema.
Et donc les importateurs sont contrôlés sur ces marges. Et il y a des produits pour lesquels l’État a jugé nécessaire de fixer des prix pour ne pas perturber le marché. C’est l’exemple du carburant.
« Au niveau des céréales, l’Etat ne peut pas fixer les prix sans consulter les principaux acteurs. C’est dans un cadre de concertation que l’Etat parvient à fixer ces prix.
Olivier Kiema indique également que le gouvernement a donné le pouvoir aux gouverneurs de fixer les prix des céréales dans leurs localités respectives.
Soulager le panier ménager
Le gouvernement dit avoir pris des mesures pour que les Burkinabè puissent avoir accès, sans trop de difficultés, aux produits dits de consommation.
Avec le contrôle des prix mis en place par les autorités du pays, Olivier Kiema indique qu’il y aura une tendance à la hausse mais raisonnable, avant de connaître « une tendance à la baisse au bout de quelques instants ». Il souligne qu’en matière de céréales, le pays connaît une tendance à la baisse en raison de la campagne agricole qui « est très bonne ».
« Avec l’initiative présidentielle et grâce à l’offensive agrosylvopastorale du ministère de l’Agriculture, en octobre dernier nous étions à 38 000 FCFA le sac de 100 kg de maïs. Aujourd’hui nous en sommes à 30 000 FCFA pour le même sac », informe le directeur général du Contrôle économique et de la répression des fraudes.
Il informe également que le gouvernement sera ferme sur les exportations non réglementées. Pour lui, les céréales du Burkina qui ont connu une bonne campagne cette année. Mais les gens seront tentés d’exporter cette céréale vers les pays voisins qui connaissent des difficultés avec leurs campagnes agricoles. C’est là que l’Etat va intervenir, selon lui.
« Si nous attrapons des gens qui exportent des céréales, ils seront punis conformément à la loi. L’exportation de céréales est interdite jusqu’à nouvel ordre», prévient M. Kiema.
Un appel au calme
Le service de contrôle des prix du marché poursuit ses investigations et est à pied d’œuvre pour enrayer le phénomène. Selon le directeur général du contrôle économique et de la répression des fraudes, cette hausse des prix des produits de première nécessité est temporaire.
« Avec la production de pétrole en Indonésie, nous espérons que d’ici un mois, nous verrons une baisse de ces prix. Nous demandons aux consommateurs d’être patients », projette-t-il.
Il reconnaît qu’il s’agit d’une période très difficile que traverse la population, mais appelle les consommateurs « à soutenir le gouvernement et surtout à éviter les accusations aléatoires », étant donné, selon lui, que le ministère du Commerce joue son rôle dans contrôle des prix.
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