Pierre Calamusa, figure du poker français, revient sur la réalité de sa vie de joueur professionnel. A 36 ans, ce grenoblois évoque les enjeux financiers de l’industrie et la révolution de ce jeu.
Pierre Calamusa est une référence dans le monde du poker. Depuis plus de dix ans, il vit de sa passion, jonglant entre les tournois en ligne et en face-à-face. Exilé au Portugal pour bénéficier d’une « meilleure qualité de vie », il parcourt le monde en participant à de nombreuses compétitions tout au long de l’année.
Rencontré à Lyon à l’occasion de Winamax Poker TourTournoi auquel il a participé en tant qu’ambassadeur de la marque, l’actuel 478ème joueur mondial dévoile ses méthodes de travail et les réalités parfois méconnues de son métier. Des bouleversements introduits par l’intelligence artificielle aux défis financiers auxquels est confronté un joueur professionnel, il lève le voile sur un univers où l’expertise rencontre l’incertitude.
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Comment devient-on joueur de poker ?
Pierre Calamusa : « On ne se le dit pas. Cela se passe un peu comme ça. Je pense qu’il y a peu d’enfants qui se disent : « Je veux devenir un joueur de poker professionnel ». Quand tu débutes dans les petits jeux, que tu te rends compte que tu es bien meilleur que les autres, que tu gagnes beaucoup d’argent, c’est là que tu arrêtes les études pour te consacrer entièrement à ça. Pour ma part, je me suis pas mal plongé là-dedans. naturellement.
“Aujourd’hui, l’IA a révolutionné le poker”
Quel est le rythme de vie d’un joueur de poker ?
Le rythme est binaire. En ligne, c’est un travail de nuit. Les tournois commencent vers 20 heures et se terminent entre 1 heure et 2 heures du matin. Les tournois en direct, comme ceux de Las Vegas, commencent généralement vers 10 heures et peuvent se terminer après minuit. En ligne, je fais environ 1 500 tournois par an, une dizaine par soir, ce qui demande beaucoup de concentration. Sur terrain dur, je participe à une soixantaine de tournois par an. C’est un rythme intense, mais quand on est passionné, ça passe.
Où joues-tu le plus ?
Les championnats du monde de Las Vegas sont incontournables chaque année. C’est un mois et demi de poker intense. Il y a ensuite le circuit européen, avec des étapes à Monaco, Prague ou Paris. Il existe également des destinations plus exotiques comme Macao ou Hong Kong. Le circuit ressemble beaucoup à celui du tennis, avec des tournois partout dans le monde.
Qu’est-ce qui différencie un joueur professionnel d’un amateur ?
Mathématiques, mathématiques, mathématiques. Aujourd’hui, l’IA a révolutionné le poker. Un logiciel permet d’avoir des solutions précises en quelques secondes. Quand j’ai commencé, c’était beaucoup plus intuitif. Mais nous avons réalisé que le cerveau humain joue instinctivement très mal au poker. Il s’agit désormais d’un pur apprentissage, proche des échecs.
« À court terme, un joueur amateur peut définitivement gagner »
Est-il possible pour un amateur de battre un professionnel ?
À court terme, un joueur amateur peut tout à fait gagner, notamment dans les tournois en face-à-face où la chance peut jouer un rôle crucial. Mais sur une longue période, notamment en ligne, cela est impossible. Là-bas, les mathématiques gagnent toujours.
Quels sont les risques financiers pour un joueur de poker ?
Ils sont énormes. Cela fait deux ans que je n’ai pas perdu dans des tournois durs. Par exemple, à Vegas, vous pouvez miser 100 000 euros dans des tournois et revenir avec 80 000 euros de pertes. Pour ma part, j’ai dû perdre 200 000 € en deux ans sur de vrais tournois. C’est difficile, surtout quand ta famille compte sur toi. Mais en ligne, les pertes sont compensées : j’ai gagné 300 000 euros dans un tournoi à 125 euros d’inscription, avec 47 000 participants. Ce métier nécessite de garder la tête froide quoi qu’il arrive. Mais c’est plus difficile à dire qu’à faire (sourire).
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