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« Il est urgent de rendre plus flexible le système électrique français »

Pour notre chroniqueur Maxence Cordiez, expert associé énergie et climat à l’Institut Montaigne, si l’électricité renouvelable a un rôle important à jouer dans la décarbonation, sa diffusion doit s’accompagner du développement des assouplissements nécessaires à son intégration.

La , comme le reste de l’Europe, s’est engagée à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. C’est un impératif pour limiter le réchauffement climatique à moins de 2°C et donc limiter également les effets sur les écosystèmes et notre société. Atteindre cet objectif nécessite une refonte en profondeur de notre système énergétique afin de s’éloigner des combustibles fossiles – charbon, pétrole et gaz – qui représentent encore environ 80 % de l’énergie consommée dans le monde.

Même en France, ces carburants fournissent environ 60 % de l’énergie consommée, à commencer par le pétrole (notamment dans les transports) et le gaz (notamment pour le chauffage et l’industrie). Pourtant, l’électricité française est déjà peu dépendante des énergies fossiles importées et émet peu de gaz à effet de serre, grâce au nucléaire, à l’hydraulique, à l’éolien et au solaire. Pour atteindre la neutralité carbone en 2050, c’est-à-dire ne pas émettre plus de gaz à effet de serre que les écosystèmes et les éventuels futurs systèmes de captage et de stockage du carbone ne peuvent en absorber, la France s’est dotée d’une stratégie nationale bas carbone (SNBC).

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La SNBC prévoit une augmentation de la consommation électrique par rapport à aujourd’hui, tant en termes absolus (la France devrait consommer plus d’électricité en 2050 qu’aujourd’hui) qu’en termes relatifs. Si l’électricité représente actuellement un quart de l’énergie consommée en France, elle devrait augmenter jusqu’à environ 55 % en 2050. Cela s’explique par le fait qu’il est bien plus facile de produire de l’électricité bas carbone que de l’électricité liquide liquide bas carbone gazeuse. carburants, même si cela sera nécessaire.

De là découlent deux conclusions directes : il faut favoriser les usages de l’électricité et en même temps augmenter la production d’électricité bas carbone. Les nouvelles centrales électriques (nucléaires et renouvelables) devraient suffire à la fois à renouveler une partie des centrales actuelles et à augmenter la production d’électricité. Autrement dit : le développement de nouvelles capacités de production devra être massif dans les décennies à venir. Mais cela ne suffira pas… et c’est justement là que réside le problème !

Rendre le système électrique plus flexible

En effet, alors que la plupart des unités de production d’électricité étaient jusqu’à présent pilotables (fossile, nucléaire et hydraulique) et adaptées à une demande inflexible, une partie des nouvelles capacités dépendent des conditions extérieures : le vent pour l’énergie éolienne et le soleil pour les panneaux photovoltaïques. Il faut donc rendre le système électrique plus flexible et en même temps installer ces capacités pour en tirer le meilleur parti et éviter de déstabiliser le système. Cette flexibilité viendra en partie de la production, mais de plus en plus de la demande et du stockage.

L’intégration du solaire photovoltaïque – qui produit tous les jours de midi à la fin de l’après-midi – nécessite une flexibilité de l’ordre de quelques heures. Cela peut être assuré du côté de la demande en mettant à jour les tarifs de pointe et hors pointe (HP/HC) afin de réorienter les heures de pointe vers les moments où le réseau est réellement le plus sollicité. On pourrait imaginer par exemple avoir deux périodes d’heures creuses (nuit et après-midi), plus d’heures creuses mais des heures de pointe plus coûteuses (ce qui inciterait à plus de consommation en heures creuses, tout en réduisant l’effort pour atteindre cet objectif).

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La compétitivité des tarifs HP/HC par rapport aux tarifs fixes pourrait également être accrue. Côté stockage, il est urgent de développer la recharge bidirectionnelle des véhicules électriques, ce qui implique d’uniformiser le système à l’échelle européenne et d’accompagner le déploiement de telles bornes et véhicules. Ainsi, les familles équipées pourraient utiliser la batterie de leur voiture pour éviter les heures de pointe. Avec une consommation domestique moyenne d’environ 6 kWh d’électricité par jour et une batterie de véhicule électrique ayant souvent une capacité supérieure à 50 kWh, son usage domestique pendant quelques heures consommerait peu, tout en fournissant un service important au réseau.

Flexibilité intersaisonnière

L’intégration de l’énergie éolienne nécessite une flexibilité hebdomadaire, soit de l’ordre de plusieurs jours. À cette fin, plusieurs barrages hydroélectriques pourraient être transformés en barrages réversibles permettant de stocker l’électricité pendant cette période. La France a du potentiel, mais cela nécessiterait de surmonter deux obstacles majeurs : la question des concessions (la réalisation des travaux nécessite une concurrence renouvelée, etc.) et l’acceptabilité de la population, la question de l’eau est devenue particulièrement délicate ces dernières années.

Côté demande, les tarifs de type TEMPO qui proposent trois types de jours par an (300 jours bleus très bon marché, 43 jours blancs bon marché et 22 jours rouges très chers) contribuent également à la flexibilité hebdomadaire en hiver.

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Enfin, la consommation électrique étant plus élevée en hiver qu’en été en raison du chauffage, une flexibilité intersaisonnière est également nécessaire. Ceci est déjà assuré par l’électricité nucléaire à travers la mise en place d’arrêts de réacteurs pour maintenance et ravitaillement en été. Ce service est d’autant plus précieux qu’il existe peu d’autres leviers éprouvés de flexibilité intersaisonnière qui présentent un potentiel important sans recourir aux énergies fossiles…

Ainsi, si l’électricité renouvelable a un rôle important à jouer dans la décarbonation, sa diffusion doit s’accompagner du développement des flexibilités nécessaires à son intégration. Sans cela, le système électrique sera de plus en plus déséquilibré – nous le constatons déjà – ce qui ne sera pas optimal d’un point de vue économique et écologique et mettra finalement en danger la sécurité de l’approvisionnement.

 
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