Par
Pierre-Yves Gaudart
Publié le
28 novembre 2024 à 6h40
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Les 29 novembre et 13 décembre 2022, un bateau malouin a été contrôlé avec 1,3 tonne de coquilles Saint-Jacques pêchées dans les eaux de Jersey. Ni l’armateur ni le capitaine du navire n’ont contesté les faits devant le tribunal judiciaire de Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), mardi 26 novembre 2024.
Une vingtaine de marins
L’armateur, qui emploie une vingtaine de marins, estime qu’il était dans son droit puisqu’il disposait d’un permis de pêche de Jersey. Le capitaine, un trentenaire qui avait alors peu d’expérience, assure qu’il n’a pas eu à remettre en question les instructions de son patron.
L’armateur de 61 ans affirme n’avoir rien à cacher : « Je suis allé à l’inspection le 29 novembre et l’administration a reconnu que les textes sur la pêche à Jersey étaient vagues. »
« Nous pensions que nous serions autorisés à le faire »
En résumé, les pêcheurs doivent être titulaires d’une licence dite « Ouest Cotentin », en plus de l’autorisation de Jersey, pour pratiquer le dragage d’excréments dans cette zone. En pleine négociation avec les Britanniques lors de leur sortie de l’Union européenne, la France a publié un arrêté ministériel fixant de nouvelles règles provisoires en février 2021 et a clarifié la question dans un autre arrêté en novembre 2022.
« Nous n’avons pas accepté qu’on nous impose ce permis Ouest Cotentin puisque Jersey ne faisait plus partie de l’Union européenne. Par contre, nous avons remarqué que de nombreux bateaux possédant uniquement un permis Jersey se rendaient également dans cette zone. Nous pensions donc être autorisés à le faire», justifie le propriétaire de la compagnie maritime malouine qui est également accusé d’avoir exercé ces activités de pêche à des horaires non autorisés.
Une armée de témoins
La question est complexe d’un point de vue réglementaire. Il le deviendra en tout cas tout au long de l’audience lorsque différents témoins se présenteront les uns après les autres devant la juge Annabelle Buron. Un gendarme contrôleur des pêches aux Affaires Maritimes sort une carte pour expliquer les zones délimitées entre Normands, Bretons et Jersiais. Il retrace l’histoire des décrets successifs.
Vient ensuite une chef de service de la DDTM d’Ille-et-Vilaine qui a procédé au « recoupement » avec son homologue des Côtes d’Armor. Selon elle, nul doute que l’armateur, en tant qu’élu du comité départemental des pêches, a été informé, par l’Administration, lors de plusieurs réunions trimestrielles, de la nécessité de détenir une licence Ouest Cotentin.
Le flou des arrêtés ministériels ?
Le flou des arrêtés ministériels ? » L’arrêté préfectoral normand de novembre 2022 précise clairement que ce permis est nécessaire pour pêcher dans les eaux de Jersey. Ce 2e Un ordre a peut-être été produit pour clarifier le premier», concède le responsable face aux questions de l’avocat de l’amateur.
Quant aux horaires, “la pêche aux coquillages est autorisée de 10h à 20h. En débarquant à 10h50 à Saint-Malo, force est de constater que la règle n’a pas été respectée.”
Pour continuer à décortiquer l’affaire, qui prend une tournure courtesque, un représentant du DDTM 22 ainsi qu’un ancien équipier du bateau incriminé, qui n’avait pas grand-chose à dire, témoignent à leur tour.
Un affichage de la sanction possible
Le procureur adjoint reconnaît que « cette période de négociations était particulière. Mais le bateau devait suivre une réglementation que l’armateur ne pouvait ignorer. Quant au capitaine, il aurait dû vérifier s’il était autorisé ou non à pêcher dans les eaux de Jersey. Adrien Nantel réclame 4 000 € d’amende (dont 2 000 € avec sursis) avec obligation de détachement pendant deux mois aux Comités locaux des pêches de Mer Littoral et des directions d’Ille-et-Vilaine et des Côtes-d’Armor contre le capitaine. Et 10 000 € d’amende et même mise en demeure contre la Sarl de l’armateur, avec suspension du permis de pêche pour un mois.
L’avocat de l’amateur dénonce le flou du décret de février 2021 qui en a nécessité un deuxième en novembre 2022 pour le rendre plus explicite. « Jersey n’a pas interdit la pêche dans sa zone. C’est la France qui n’a pas voulu faire de vagues lors des négociations sur le Brexit. » Elle demande la libération de son client qui « a déjà été sanctionné administrativement et a perdu une subvention, soit 10 874 €, ce qui correspond au prix de trois tonnes d’obus ».
“Nous sommes des idiots”
Cyril Baron, qui défend le capitaine, demande également sa libération. Il peste contre les « 3h06 » qui viennent de monopoliser ce court. La France impose donc des mesures plus restrictives que celles imposées aux mêmes pêcheurs par les autorités de Jersey ?
Ces derniers n’ont rien trouvé à redire sur ce bateau malouin. Nous sommes stupides, nous avons le don de nous tirer une balle dans le pied. De lourdes sanctions administratives ont déjà été imposées. Je vois qu’il en faut beaucoup pour maintenir l’acte d’accusation à flot. On nous dit que les règles étaient compliquées, mais claires. Et bien non, une règle compliquée ne peut pas être claire. »
L’avocat malouin a rappelé le droit français : « Pour qu’une infraction commise en territoire étranger soit jugée en France, il faut qu’elle soit également punie dans le ressort de l’État où elle a été commise. »
Le tribunal rendra sa décision le 14 janvier 2025.
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