Publié23 novembre 2024, 14h00
Conflit au Moyen-Orient: Au sud du Liban, Israël tente de créer un no man’s land
Avec la destruction systématique de villages au sud du Liban, Israël tente, selon les experts, de créer une zone tampon inhabitable afin d’empêcher un retour du Hezbollah après l’arrêt des combats.
Afin d’empêcher un retour du Hezbollah dans les zones frontalières après la cessation des combats, Israël détruit systématiquement des villages dans le sud du Liban.
Selon des responsables libanais, près d’une vingtaine de villages proches de la frontière entre le Liban et Israël ont été détruits à 70 % depuis le 23 septembre, début de la campagne de bombardements lancée par Israël au Liban contre le Hezbollah. Elle est suivie le 30 septembre d’une offensive terrestre qui dynamite de nombreux bâtiments.
« Israël semble créer un no man’s land inhabitable tout le long de la frontière », déclare Peter Harling, fondateur de Synaps, un centre de recherche basé à Beyrouth.
Les analystes israéliens interrogés à Jérusalem estiment que l’objectif d’Israël n’est pas de conquérir le sud du Liban, mais de repousser la menace du Hezbollah dans le nord du pays. «Il s’agit simplement d’avoir une certaine garantie que le Hezbollah ne sera plus proche de la frontière et ne pourra plus lancer d’attaques contre le nord d’Israël. C’est l’objectif principal (…), nous ne voulons pas du Hezbollah là-bas», explique l’experte et ancienne militaire israélienne Orna Mizrahi.
Interrogée, l’armée israélienne a accusé le Hezbollah d’avoir placé ses sites militaires et ses dépôts d’armes dans des zones civiles densément peuplées.
45 000 bâtiments détruits
L’objectif d’Israël est de créer une zone tampon inhabitable. “Les destructions israéliennes (…) visent à transformer la région frontalière en terre brûlée”, déclare Abdel Monhem Choucair, maire de cette localité qui comptait près de 30 000 âmes avant la guerre. “Ils ont détruit des écoles, des mosquées et des infrastructures, même les cimetières n’ont pas été épargnés”, ajoute-t-il.
Dans le petit village voisin de Mheibib, plus de 84% des bâtiments avaient été rasés au 7 novembre, selon un comptage de l’AFP basé sur les mêmes données de Microsoft Maps et d’analyses satellites. Plus au sud, à Yaroun, sur les quelque 500 bâtiments que comptait le centre du village, 380 ont disparu.
L’expert militaire Hassan Jouni explique qu’en détruisant ces villages et en brûlant les zones boisées qui les entourent, Israël veut nettoyer ses points d’observation.
Points d’observation
« Cette zone tampon sera exposée au contrôle et à la surveillance israéliens », a déclaré M. Jouni, ancien commandant de l’école de guerre de l’armée libanaise. Cela rendra impossible « de répéter l’expérience du 7 octobre à Gaza, à la frontière libanaise », ajoute-t-il.
Israël a accusé l’unité d’élite du Hezbollah, al-Radwan, qu’il a décapitée lors de frappes ciblées, de vouloir attaquer le territoire israélien.
Israël s’est retiré du sud du Liban en 2000 après de nombreuses attaques du Hezbollah, après 22 ans d’occupation. En 2006, une guerre l’avait déjà opposé au groupe pro-iranien, qui n’avait jamais respecté une résolution de l’ONU prévoyant son retrait de la région.
Aujourd’hui, les négociations à travers les États-Unis pour parvenir à un cessez-le-feu se concentrent sur la pleine mise en œuvre de cette résolution selon laquelle seules l’armée libanaise et des casques bleus doivent être déployés dans cette partie du sud.
Calev Ben-Dor, ancien analyste au ministère israélien des Affaires étrangères, explique que les « roquettes à longue portée » constituent l’une des « principales menaces ».
Hassan Jouni estime cependant que la tactique israélienne est vouée à l’échec, « car les gens reviendront et reconstruiront leurs maisons en cas d’accord politique ».
(AFP)
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