Le géant danois de la biométhanisation Nature Energy – qui prévoyait construire dix usines pour fournir le tiers du gaz naturel renouvelable dont a besoin Énergir – quitte le Québec. Le marché québécois n’est pas assez rentable, estime cette filiale de Shell.
« L’environnement réglementaire [et] les complexités de la chaîne d’approvisionnement des matières premières» seraient parmi les facteurs qui expliquent le retrait du Québec de Nature Energy, mentionne dans un courriel Stephen Doolan, porte-parole de la compagnie pétrolière Shell qui possède la multinationale danoise. Le géant pétrolier affirme également « que les aspects économiques […] n’a pas répondu aux exigences d’investissement de Shell.
Il s’agit d’un revirement à 180 degrés pour Nature Energy, qui présentait ses projets dans la province comme une porte d’entrée sur le marché nord-américain. En décembre 2022, l’entreprise a annoncé un partenariat majeur avec Énergir, affirmant planifier la construction de 10 méga-usines de biométhanisation pour produire du gaz naturel renouvelable (GNR) agricole à partir de lisier et de fumier.
Ces installations devaient permettre la production de 200 millions de mètres cubes de GNR et ainsi « atteindre le tiers de l’objectif québécois de 2030 en matière de GNR, ce qui réduirait les émissions de CO ».2 d’un maximum de 400 000 tonnes, ce qui équivaut au retrait de la route d’environ 100 000 voitures à essence.
« Ils nous ont fait part de cette décision récemment », affirme Jean-François Jaimes, directeur du développement et des énergies renouvelables chez Énergir : « Peut-être que le potentiel n’était pas aussi grand qu’ils l’espéraient initialement, du moins la vitesse à laquelle ils pourraient développer ces projets. »
Le projet Farnham – dont Énergir prend le contrôle à 100 % avec le départ de son partenaire – est bien avancé. Plus de 80% de la biomasse nécessaire à la production de RNG est actuellement sécurisée, assure M. Jaimes, précisant que cela va certainement avancer. L’inauguration de l’usine était prévue jusqu’à récemment pour 2026.
Énergir Développement n’exclut pas la possibilité d’encadrer d’autres initiatives. « On pourrait refaire les projets, mais seul ou avec de nouveaux partenaires. Avec le départ de Nature Energy, cela nous donne l’opportunité de relancer le projet avec une nouvelle gouvernance”, résume M. Jaimes, assurant “nous croyons vraiment en ce secteur”.
En juillet, La presse avait constaté qu’il y avait déjà de l’eau dans le gaz des ambitions québécoises de l’entreprise. « On ne se met pas le couteau sous la gorge en se disant qu’il faut à tout prix construire 10 usines. Nous y allons projet par projet. S’il n’y a que six usines, ce ne sera que six usines. », a déclaré le responsable de l’approvisionnement en biomasse chez Nature Energy, Philippe Lamote.
Ce responsable confirmait alors les difficultés de collecte des 700 000 tonnes d’intrants – principalement des déjections animales – nécessaires à chaque projet. Ceux-ci proviennent généralement d’une centaine d’exploitations agricoles réparties sur un vaste territoire. Les projets ne peuvent pas être rentables si les camions doivent parcourir une centaine de kilomètres pour collecter le lisier ou le fumier nécessaire à la production de gaz.
C’est pour cette raison que la multinationale avait mis de côté, en 2023, son projet d’usine à Louiseville, dans la MRC de Maskinongé. Dès lors, il ne restait en effet plus que deux projets sur la planche à dessin d’Énergie Nature : la centrale de Farnham en Estrie et la centrale de Saint-Joseph en Beauce prévue pour 2027. Énergir n’exclut pas la possibilité de reprendre également ce projet qui, d’ailleurs, , est moins avancé.
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