L’objectif de réduire les émissions de gaz à effet de serre de l’UE de 55 % entre 1990 et 2030 est « réalisable », en accélérant le développement de technologies matures comme le solaire, l’éolien ou les voitures électriques, Engie avance dans son nouveau scénario de décarbonation pour l’Europe présenté mardi. 12 novembre.
« L’Europe doit maintenir le cap », a insisté Catherine MacGregor, directrice générale de l’énergéticien français Engie, principale société gazière européenne.
Plus que les objectifs de décarbonation à l’horizon 2030, l’incertitude pèse surtout sur 2050. A cette date, la neutralité carbone sera inaccessible sans le recours à des technologies encore à un stade précoce de développement, comme le captage et le stockage du carbone, observe Engie dans son scénario. s’appuyant sur quinze pays européens, qui couvrent 85 % de la consommation énergétique du Vieux Continent.
Pas d’objectif pour 2040
Pour éviter toute confusion dans les messages, Catherine MacGregor recommande de ne pas fixer pour l’instant d’objectif européen de réduction des émissions à l’horizon 2040.
A ce jour, la Commission européenne, en plein renouveau, n’a pas d’objectif officiel. Seules des discussions fructueuses au début de l’année ont laissé entrevoir un objectif possible de -90 % pour 2040.
Mais selon Nicolas Lefèvre-Marton, directeur de la stratégie chez Engie, « Atteindre -90 % impliquerait un surcoût important ». La société énergétique a plutôt présenté un « trajectoire optimisée » -84%.
Flexibilité de la demande
Engie insiste également sur la nécessité de développer la flexibilité de la demande, c’est-à-dire l’optimisation de la consommation énergétique. Un déficit dans ce domaine pourrait entraîner un coût supplémentaire de décarbonation d’environ 150 milliards d’euros par an, insiste l’énergéticien.
Sans garantir la véracité des montants annoncés, « Ne pas développer la flexibilité à sa juste valeur coûtera très cher, et probablement à partir de 2030, si l’UE s’oriente vers un mix à 69 % d’énergies renouvelables. [dans la production d’électricité, comme inscrit dans le plan REPowerEU] »Andreas Rudinger, chercheur en énergie au think tank français IDDRI, assure pour Euractiv.
Par ailleurs, Engie table plutôt sur 60 % de sources renouvelables dans la production électrique de l’UE en 2030, tandis que le groupe de réflexion bruxellois spécialisé dans l’énergie, Ember, table sur 66 %.
Électricité, gaz et hydrogène
Ces chiffres sont plus ou moins en ligne avec le taux d’électrification du mix proposé par Engie de 48 % en 2050, également partagé par TotalEnergies dans sa dernière étude de novembre. Le reste est assuré à 32 % par du gaz (méthane décarboné, hydrogène décarboné) et à 15 % par de la chaleur résiduelle.
Concernant l’hydrogène notamment, Engie voit les objectifs de mise en œuvre antérieurs baisser. Pour rappel, la Cour des comptes de l’UE a demandé une « retour à la réalité » sur les objectifs 2030 d’importer et de produire à parts égales 20 millions de tonnes d’hydrogène décarboné.
D’ici 2050, l’énergéticien prévoit que 70 % de l’hydrogène sans carbone sera produit en Europe. ” Les importations seront principalement destinées aux e-carburants », veulent croire les stratèges de l’entreprise.
Prix minimum du carbone
Pour accompagner et encourager la décarbonation, Engie préconise la mise en place d’un prix minimum du carbone, qui comprend « l’objectif est au moins de décourager l’utilisation du charbon », estiment les stratèges.
Cela serait possible à partir d’environ 30 euros la tonne, calcule Euractiv Phuc-Vinh Nguyen, chercheur en politique énergétique à l’Institut Jacques Delors. Pour décarboner efficacement, nous préconisons cependant un prix d’environ 60 euros en 2030, puis 110 euros en 2050, comme le préconise Engie.
L’inconvénient est que l’ouverture du marché du carbone aux transports et au chauffage résidentiel à partir de 2027 impliquerait une convergence des prix à la tonne dans tous les domaines couverts par les marchés du carbone. Toutefois 110 euros la tonne pour ces deux dernières zones” c’est impensable », note Nicolas Goldberg, expert en énergie au think tank progressiste TerraNova, pour Euractiv.
« Le risque économique et politique d’atteindre ce niveau dans un délai court est trop grand pour les Européens », conclut.
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