Un soir de semaine à 18h30, dans la ligne 13 du métro parisien, près de la station Saint-Lazare. Dans le train, un bruit aigu retentit. Une femme d’une cinquantaine d’années, avec des AirPods dans les oreilles, commence à grimacer. Le cri aigu dure quelques secondes, avant de disparaître… pour revenir à nouveau. Cette Parisienne enfonce plus profondément ses écouteurs et les maintient enfoncés plusieurs secondes. Par-dessus son épaule, un jeune d’une vingtaine d’années l’observe intrigué. A sa droite, une dame un peu plus âgée grimace à son tour et confirme : “C’est insupportable.”
Cette scène est visible à plusieurs reprises dans la ligne 13. Et sur les réseaux sociaux aussi, les Franciliens partagent leur agacement face à ces nuisances sonores. “Je suis ici dans le métro 13 et le bruit que fait cette ligne, c’est de la merde”, constate (un peu agacé) un jeune internaute dans un post sur les tronçons où on ne peut plus le prendre sans putain d’écouteurs antibruit”, témoigne ( encore plus en colère) un autre.
L’équivalent d’une tronçonneuse
Rien d’étonnant, selon un classement réalisé par le parisien en début d’année. Le tronçon de la ligne 13 autour de Saint-Lazare est le plus bruyant de tout le réseau parisien. À l’intérieur du wagon, nos confrères ont enregistré un niveau sonore de 102 décibels. L’équivalent d’une tronçonneuse (oui, oui) ou d’une discothèque à fond (en moins la bonne ambiance). Un problème que la RATP reconnaît. Le groupe a récemment réalisé des prélèvements acoustiques sur 15 quais de la ligne 13. « Il apparaît que les bruits crissements sont fortement marqués dans les stations proches des courbes à petit rayon, ce qui est le cas de la gare Saint-Lazare », explique-t-il. 20 minutes la direction de la communication du groupe. Face à ces bruits, plusieurs explications sont possibles : ces crissements dans les virages à petit rayon, mais aussi le bruit de roulement, les crissements au freinage, le passage d’un aiguillage, ajoutés aux bruits des équipements du train.
Au-delà du fait qu’entendre le doux bruit d’une perceuse après une journée de travail acharné n’est pas la chose la plus agréable qui soit, est-ce dangereux pour nos oreilles ? “Je suis toujours surpris par la différence de traitement entre un bruit vécu, comme celui-ci, et un bruit accepté, comme dans un bar où on dépasse largement les 102 décibels”, commence ironiquement l’ORL Niels Morel. Disons que les amis, la musique qu’on aime et le guacamole contribuent à atténuer le bruit ambiant. Les insultes, l’odeur de sueur et les bousculades dans le métro, un peu moins.
Un danger seulement pour un bruit qui dure
Mais revenons à nos oreilles. « Être exposé à 102 décibels n’est pas dangereux si le bruit ne dure que quelques secondes ou quelques minutes », veut rassurer l’ORL. « La réglementation dans les salles de concert montre qu’au-delà de 100 décibels, il y a un danger pour l’audition au bout d’un quart d’heure », ajoute Matthieu Sineau, chef de projet chez Bruitparif. Au-delà de cette durée, le risque est d’avoir « un traumatisme sonore, avec acouphènes ou perte auditive », ajoute Amine Harichane, chirurgien ORL. En raison du manque d’études, il est difficile pour le médecin de dire si un pic sonore bref mais répété (métro – travail – métro – sommeil) pourrait avoir un impact à long terme sur l’audition.
Si la ligne 13 ne risque donc pas de vous rendre sourd, elle peut en revanche avoir un impact sur le moral. “L’oreille est reliée au système nerveux, donc le bruit va jouer sur notre stress”, souligne l’ORL Nils Morel. Résultat, à terme : une montée en agressivité.
Tous ne sont pas égaux face au bruit
Quant à savoir pourquoi certaines personnes ne supportent pas ce bruit alors que d’autres semblent à peine l’entendre, sachez que nous ne sommes pas tous égaux face à cela. « Les études montrent qu’un tiers de la gêne s’explique par des niveaux sonores réels et les deux autres tiers dépendent de facteurs non acoustiques, liés à l’individu », souligne Matthieu Sineau.
Parmi ces facteurs individuels : le stress, encore une fois. « Si on ne supporte pas le métro et son environnement, on tolérera moins ce bruit », souligne Nils Morel. Mais les personnes plus sensibles à ces nuisances sonores peuvent aussi souffrir d’hyperacousie. “Cela peut être lié à une maladie congénitale, une malformation de l’oreille ou un trouble du spectre autistique”, souligne le médecin. Une oreille déjà traumatisée sera également plus sensible aux nuisances sonores. L’ORL invite donc les personnes qui souffrent à consulter.
Portez des écouteurs pour réduire le bruit
D’autant que les passagers de la ligne 13 devront être patients. La RATP explique que “la situation devrait être améliorée par le futur matériel roulant MF19 qui sera déployé à partir de mi-2027 et qui sera équipé de dispositifs anti-grincement sur les roues”. Ces nouvelles rames MF19, « métros ferroviaires nouvelle génération », remplaceront les actuelles, sur une période s’étendant de mi-2027 à mi-2030. « Le recours à une part plus importante du freinage électrique par le MF19 permettra également de réduire les bruits stridents lors du freinage à l’arrivée en gare », souligne la RATP.
En attendant, Amine Haricane donne quelques conseils aux personnes rencontrant des difficultés dans leurs déplacements quotidiens sur le 13 : « mettre des écouteurs simples réduit le niveau sonore de 15 à 20 décibels, et les réducteurs de bruit peuvent monter jusqu’à 30 décibels de moins. » En passant de 100 à 80 voire 70 dB, plus de soucis (à condition de ne pas mettre sa musique au volume maximum, évidemment). « Si toutes les protections sont bonnes à prendre, pas besoin non plus de mettre des balles de Kyes », prévient Nils Morel. Cependant, nous n’avons pas de solution contre la transpiration. Désolé.
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