Depuis plusieurs années, Moscou, qui fut un acteur majeur en Afrique à l’époque soviétique, pousse ses pions dans les pays africains, qui n’ont pas adhéré aux sanctions occidentales adoptées contre la Russie après l’attentat en Ukraine en février 2022.
“Notre pays continuera d’apporter tout son soutien à nos amis africains dans divers secteurs”, a assuré le président russe Vladimir Poutine dans un discours lu dimanche devant de hauts responsables d’une cinquantaine de pays africains, réunis à Sotchi pour une conférence ministérielle Russie-Afrique. .
« Obstacles artificiels ». Il peut s’agir du « développement durable, de la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme, des épidémies, de la résolution des problèmes alimentaires ou des conséquences des catastrophes naturelles », selon le message lu aux participants par le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. “Le continent africain doit être et sera l’un des centres du monde multipolaire”, a déclaré M. Lavrov lors de la cérémonie de clôture de cette conférence, qui fait suite aux deux sommets Russie-Afrique de 2019 et 2023.
Selon Lavrov, la Russie et les pays africains voient des “progrès sur tous les axes” de leur coopération, “malgré les obstacles artificiels” auxquels s’oppose “l’Occident collectif”, terme utilisé par Moscou pour désigner les Etats-Unis et leurs alliés. Il a également assuré que Russes et Africains estiment “qu’il est nécessaire de se libérer de la dépendance à l’égard des mécanismes mondiaux contrôlés par nos collègues occidentaux”, notamment dans le domaine financier.
Cette conférence intervient après le sommet des BRICS d’octobre à Kazan (Russie), où Vladimir Poutine a voulu démontrer l’échec de la politique d’isolement et de sanctions initiée par l’Occident.
Dans sa stratégie d’influence de l’information, notamment sur les réseaux sociaux, le gouvernement russe dénonce le « néocolonialisme » en Afrique, une rhétorique reprise par certains dirigeants africains.
“Pas une puissance coloniale.” “La Russie n’est pas une puissance coloniale” et “n’a jamais été une puissance coloniale”, a assuré samedi le chef de la diplomatie malienne, Abdoulaye Diop, en marge de la conférence Russie-Afrique. « Au contraire, elle s’est tenue aux côtés des Africains et d’autres peuples du monde pour les aider à échapper au système colonial », a-t-il déclaré.
De nombreux responsables occidentaux accusent Moscou de mener un conflit impérialiste en Ukraine, une ancienne république soviétique.
En Afrique, des groupes de mercenaires russes comme Wagner, ou son successeur Africa Corps, soutiennent les autorités locales et des « conseillers », selon Moscou, travaillent avec les responsables. Cela est particulièrement vrai en République centrafricaine et au Sahel, où l’influence croissante de la Russie s’est accompagnée du déclin rapide de celle de la France.
Matière première. En 2023, Moscou a également livré des armes d’une valeur de plus de 5 milliards de dollars (4,7 milliards d’euros) au continent africain, selon l’entreprise publique russe Rosoboronexport. Mais pour les responsables réunis à Sotchi, le soutien doit aller au-delà des questions de sécurité.
“Il faut développer le numérique, le numérique en Afrique centrale”, avec le soutien de la Russie dans ces secteurs, a déclaré à l’AFP Marie Thérèse Chantal Ngakono, commissaire à l’aménagement du territoire et aux infrastructures de la Communauté économique africaine (CEEAC).
De grands groupes russes sont également très intéressés par les matières premières africaines : ALrosa en Angola et au Zimbabwe (diamants) ; Lukoil au Nigeria, au Ghana, au Cameroun et en République du Congo (pétrole) ; Rusal en Guinée (bauxite)…
Intérêt circonstanciel ? « Nous possédons plus de 75 minéraux en Afrique. Et ils ne sont pas bien utilisés», explique à l’AFP le jeune Piero Omatsaye, fondateur de l’organisation Jet Age Nation Builders visant à promouvoir le progrès sur le continent africain.
“Grâce au partenariat avec la Russie”, l’un des plus grands exportateurs de gaz, de pétrole et de diamants, “nous pourrons bien utiliser ces ressources”, a estimé l’homme politique nigérian.
Pour Bakary Sambé, directeur de l’Institut Tombouctou de Dakar, interrogé cette semaine par l’AFP, la question d’un partenariat à long terme se pose cependant : « La Russie accorderait-elle le même intérêt à l’Afrique si la guerre en Ukraine prenait fin ? », s’agit-il d’une « véritable priorité stratégique » ou d’un intérêt passager lié à l’impasse avec l’Occident ?
© Agence France-Presse
Related News :