Si la rumeur de son licenciement circulait depuis l’été, c’est sa temporalité qui surprenait. En pleine journée des élections américaines, Benjamin Netanyahu a limogé mardi 5 novembre son ministre de la Défense, Yoav Gallant, arguant que le lien de confiance qui les unissait avait disparu. En désaccord avec le premier ministre sur la gestion de la guerre, Yoav Gallant fut le dernier partisan, au sein du cabinet, d’un accord pour libérer les otages, et fit campagne pour la conscription des ultraorthodoxes.
La colère a immédiatement poussé les Israéliens à descendre dans la rue mardi soir. “C’était le moins pire des fascistes du gouvernement, il se souciait vraiment des gens”fustige Shai, un jeune étudiant en sociologie allé manifester dans la soirée près de la résidence de Netanyahu à Jérusalem. « Il licencie ou renvoie ceux qui pensent différemment de lui, c’est le début de la dictature. En plus, « Bibi » a bien choisi son moment : avec les élections américaines, il avait les mains libres. »
« Continuer la guerre coûte que coûte »
L’actuel ministre des Affaires étrangères, le très à droite Israel Katz, a été nommé pour le remplacer. «Nous nous posons de vraies questions sur les raisons pour lesquelles Gallant a été congédié et ce qui motive cette décision»» ont confié des responsables de l’administration américaine au journaliste Barak Ravid du site Axios, ne cachant ni leur surprise ni leur inquiétude.
Ce nouveau coup de poker rebat les cartes de la politique israélienne, alors que Donald Trump, considéré comme l’allié ultime, a été officiellement élu président le 6 novembre. « En remerciant Gallant, Netanyahu signale son désir de poursuivre la guerre à tout prix. Trump, en revanche, a régulièrement suggéré qu’Israël devait mettre fin à sa guerre. La relation entre les deux peut devenir conflictuelle. »estime Ephraim Sneh, qui a été ministre ou vice-ministre dans quatre cabinets israéliens différents. Le député travailliste souligne qu’avec le départ de Yoav Gallant, les Américains perdent un partenaire : « Katz n’a pas d’expérience, c’est Netanyahu qui décidera de tout. »
Netanyahu ne peut pas dire non à Trump
Benjamin Netanyahu a été parmi les premiers chefs d’État à féliciter Donald Trump pour “le plus grand retour de l’histoire”, Parlant “d’amitié” et de « un réengagement fort en faveur de la grande alliance entre Israël et l’Amérique ». Pour le Premier ministre israélien, il s’agit de prouver aux Israéliens, largement pro-Trump, qu’avec le soutien du républicain, il peut assurer une « victoire totale » à Gaza et au Liban.
« Trump II sera différent de Trump I, notamment en termes de politique étrangère, car il ne sera pas obsédé par le retour »anticipe Hasni Abidi, directeur du Centre d’études et de recherches sur le monde arabe et méditerranéen (Cermam) à Genève.
« Il voudra poursuivre ce qu’il a commencé avec les accords d’Abraham, en consolidant les acquis et en élargissant les liens avec l’Arabie saoudite, ce qui impliquera la signature d’un accord pour la fin de la guerre à Gaza. Netanyahu n’aura pas autant de liberté qu’il le pense. Contrairement à Biden, Trump n’hésitera pas à utiliser des outils économiques ou militaires pour exercer des pressions. Ce sera plus clair. » Et contrairement à Biden, Netanyahu ne peut pas dire non à Trump. Deux mois et demi séparent les élections américaines de l’investiture du 47e président. Au Moyen-Orient, c’est long pour faire des prédictions.
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