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Au Havre, un tiers-lieu d’Église pour accompagner le deuil et réfléchir sur la mort

En cette matinée grise d’octobre, un monsieur d’une cinquantaine d’années salue, sur le seuil de l’église, Florence Gibon, 63 ans, qui vient de célébrer les obsèques de son père. « Merci,tes paroles sont allées droit au cœur, lui confie-t-il. Même si je ne suis généralement pas du genre « tout ça ». (il montre l’église). Les chansons et les textes m’ont touché. » Sa mère âgée, en fauteuil roulant, prend les mains de Florence pour la remercier. “Vous êtes une belle famillerépond ce laïc engagé. Nous ressentons beaucoup d’amour. »

Quelques minutes plus tôt, devant un public peu familier des églises, Florence Gibon présidait les obsèques catholiques du défunt, proposant à ses proches “à qui appartient cette croyance” faire le signe de croix et déposer une bougie sur le cercueil. Et en cherchant à leur permettre, comme elle le dit, « vivre la mort avec une espérance chrétienne ».

Située sur les hauteurs du Havre, l’église Sainte-Jeanne-d’Arc, baptisée « deuil et espérance », est l’un des seuls lieux ecclésiaux en spécialement consacrés aux questions du deuil et de la mort. Il y a quelques années, cette église était quasiment abandonnée lorsque le Père André Recher, responsable de la pastorale du deuil, a eu l’idée d’y investir. A côté de la grande salle, une chapelle latérale et une encore plus petite sont adaptées à la taille d’un enterrement de cinq, vingt ou cinquante personnes. L’espace dispose également d’un bureau pour recevoir les familles, et une salle est mise à disposition pour un apéritif convivial après les funérailles.

Le Père Recher est décédé subitement en 2021, mais des laïcs ont repris le projet à travers deux axes principaux : la préparation et la célébration des funérailles des personnes éloignées de l’Église mais souhaitant une cérémonie religieuse – deux funérailles ont lieu chaque semaine ; et réflexion sur la mort, avec l’organisation de plusieurs conférences au cours de l’année.

“Le deuil est fondamental et on en parle rarement”

Sur la mort, sujet tabou dans nos sociétés, l’existence d’un lieu dédié ouvre un espace de discussion. « Le deuil aujourd’hui est fondamental et on en parle rarement » note le père Bruno Golfier, accompagnateur de l’équipe spatiale Jeanne-d’Arc. « Avoir des espaces où les gens peuvent venir prier et se confier est extrêmement important. » Pour le théologien Arnaud Join-Lambert, qui a vu des initiatives similaires en Allemagne ou à Singapour, c’est un espace « vraiment original » En France.

Parmi l’équipe qui gère ce lieu, plusieurs ont perdu un proche. Un mari, une femme, un fils, une fille. François-Xavier et Béatrice Chaigneau font partie de l’association Jonathan Pierres vivants, qui soutient les parents ayant perdu un enfant ; Nicole Delaune est responsable diocésaine d’Espoir et Vie, un mouvement en faveur des veuves et des veufs. Chacun connaît la nécessité, lorsque l’on est en deuil, de s’exprimer, l’importance de la parole des autres et, dans la mesure du possible, des mots justes.

Avant chaque célébration, Florence Gibon, qui a elle-même perdu l’aîné de ses quatre enfants il y a dix-neuf ans, écoute pendant une heure les familles des défunts, et les guide dans le choix des chants et des textes. Elle pose des questions : « Quelle était sa vie, son métier ? Comment était-il avec sa famille ? Qu’aimait-il faire ? » Une fois rentrée chez elle, elle relit ses notes et consacre deux heures à travailler son commentaire de l’Évangile, faisant des parallèles entre les lectures et la vie du défunt. « J’ai l’impression d’être utile, de soulager, de semer des petites graines d’espoir. » Pour elle, elle fait un travail discret d’évangélisation. « Nous travaillons toujours pour le royaume de Dieu. »

Prolonger le soutien après le décès

Côté réflexion, l’équipe a organisé ces dernières années une conférence sur la fin de vie avec l’ancienne ministre de la Santé Agnès Firmin Le Bodo et l’évêque du Havre, Jean-Luc Brunin, une autre sur la mort d’un prêtre et un curé, un autre sur sainte Thérèse et la mort… « Cela permet aussi aux personnes qui sont loin de l’Église et qui ont des questions de traverser le porche »estime François-Xavier Chaigneau.

Certains ont d’autres rêves pour déployer ce lieu. Offrir régulièrement des chapelets aux familles décédées et en souffrance, imagine Henri Leclerc, responsable des tiers-lieux d’Église dans le diocèse. Ou mettre en place un accompagnement spirituel pour les familles après le décès. Pour lui, c’est la vocation de l’Église qui a « un extraordinaire message d’espoir à transmettre ».

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L’Escale de Rachel à Lille, une initiative d’accompagnement spirituel après un deuil

Il y a trois ans, était fondée à Lille L’Escale de Rachel, une initiative de l’Église qui permet aux personnes endeuillées de parler de leurs souffrances et d’exprimer leurs difficultés avec la parole de Dieu. L’équipe propose un accompagnement personnalisé, avec la lecture d’un texte biblique et une prière, mais aussi des « cafés de deuil », où les personnes endeuillées se retrouvent une fois par mois pour partager et échanger des conseils. Quatre retraites par an sont également organisées, généralement dans un lieu proche de la nature.

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