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« Mon ambition de diriger un jour la Côte d’Ivoire n’est plus un secret »

« Aujourd’hui je suis un homme mûr », déclare l’Ivoirien Charles Blé Goudé, qui fut ministre de la Jeunesse de Laurent Gbagbo. Il y a deux ans, après son acquittement par la Cour pénale internationale, ce leader de l’opposition est revenu en Côte d’Ivoire et a fondé un nouveau mouvement, le Congrès panafricain pour la justice et l’égalité des peuples (Cojep). Mais pour lui, le chemin vers l’élection présidentielle d’octobre 2025 est encore semé d’embûches. De passage à Paris, l’ancien « général de la rue » from Côte d’Ivoire answers questions from Christophe Boisbouvier and launches an appeal to President Alassane Ouattara.

RFI : Vous dites souvent que l’élection présidentielle de l’année prochaine ne se fera pas sans votre parti. Serez-vous candidat ?

Charles Blé Goudé: Mon ambition de diriger un jour la Côte d’Ivoire n’est plus un secret. Tout le monde le sait en Côte d’Ivoire et j’y travaille. J’ai un projet pour les Ivoiriens et mon parti a décidé lors de son congrès que les élections n’auraient pas lieu sans ce projet. Maintenant, il faut se rendre à une convention, laquelle convention désignera celui qui portera les couleurs du projet. J’aurais aimé que ce soit moi et je suis prêt pour cela.

Vous êtes donc rentré en Côte d’Ivoire il y a deux ans, mais vous restez inéligible car vous êtes toujours sous le coup de la justice ivoirienne. Cela ne fait-il pas obstacle à votre avenir politique immédiat ?

Ce n’est pas moi qui ai dicté la règle du droit pénal qui stipule qu’on ne peut ni poursuivre, ni punir, ni condamner quelqu’un qui a déjà été jugé pour les mêmes faits. N’est-il pas vrai que le gouvernement de mon pays m’a traduit devant la Cour pénale internationale pour que ma responsabilité soit localisée dans la crise post-électorale qui a endeuillé mon pays ? J’ai été acquitté pour ces faits et ne peux donc être condamné pour ces mêmes faits, pour m’empêcher de participer à la vie politique de mon pays. Je dénonce cela, non seulement parce que je trouve qu’il s’agit d’une manipulation politique, mais en même temps, j’en appelle au Président de la République, Alassane Ouattara, pour qu’il calme la situation, pour que l’on puisse tourner cette page douloureuse et adopter une loi d’amnistie pour ouvrir le processus démocratique. Veiller à ce que ceux qui pensent être prêts à participer à la compétition et à diriger leur pays, y compris moi-même, puissent être autorisés à se porter candidats.

Alors, si vous n’êtes pas gracié, si vous restez inéligible, qu’allez-vous faire ? Allez-vous mobiliser la rue comme vous l’avez fait à l’époque où vous étiez « le général de la jeunesse » sous la présidence de Laurent Gbagbo ?

C’est une époque qui est derrière moi. Mon pays a trop souffert pour que je puisse l’enflammer pour une candidature. Dix jours avant les élections au Sénégal, Ousmane Sonko était prisonnier, Diomaye Faye était prisonnier. Dix jours plus tard, l’un se retrouve au palais présidentiel, l’autre au bureau du premier ministre. Tout est dynamique en politique. J’espère que tout cela changera et que tout cela sera derrière nous. Je ne suis pas pressé, mais je suis déterminé.

La jeunesse enflammée générale des années 2000 a-t-elle changé ? Vous êtes-vous calmé ?

Aujourd’hui, je prône le pardon. Je vais vers ceux avec qui je m’étais brouillé, car je pense que, dans le respect de nos différences, nous pouvons diriger ce pays. Il faut calmer la situation en Côte d’Ivoire et il faut rassurer les Ivoiriens. Oui, le général de la rue est aujourd’hui un homme mûr qui veut diriger la Côte d’Ivoire, qui veut plutôt être jugé sur le projet politique qu’il porte pour le peuple de Côte d’Ivoire et pas seulement sur son trop jeune passé. .

Vous êtes devenu un « homme mûr », comme vous le dites, ce discours de modération est-il peut-être aussi parce que vous ne voulez pas contrarier les autorités ivoiriennes au moment où vous espérez un geste politique de leur part ? pour que tu puisses te présenter ?

Non pas du tout. Je ne suis pas dans une stratégie visant à cajoler les autorités de mon pays. Non, je veux plutôt rassurer le peuple de Côte d’Ivoire, qui est seul juge.

Oui, mais si on veut être amnistié, mieux vaut ne pas saper le pouvoir…

Mais ce n’est pas ce qui guide ma démarche car je pense au peuple de Côte d’Ivoire et tous les acteurs devraient faire comme moi.

Vous avez longtemps été le compagnon politique du président Gbagbo, puis le compagnon de détention du prisonnier Gbagbo. Mais aujourd’hui, vous semblez confus. Laurent Gbagbo vous a même énervé il y a quelques mois en affirmant que, durant vos années de prison à La Haye, vous n’aviez pas à ses côtés l’importance que vous prétendiez avoir. C’est quand même blessant, n’est-ce pas ?

Oui, mais ce n’est pas grave. Je suis africain. Un père peut gifler même son fils au visage et même en plein village. C’est vrai pour un père. Mais je vais vous le dire, j’ai une histoire avec ma génération et je n’ai pas du tout l’intention de figurer parmi les dauphins. Je veux construire ma propre histoire comme la rivière fait son propre lit.

Du côté du RHDP, qui voyez-vous comme candidat ?

Ils ont déclaré vouloir que leur candidat soit l’actuel président, le président Alassane Ouattara. Il n’a pas encore dit oui. Il n’a pas encore dit non.

Quelle est votre intuition ? Est-ce que ce sera le cas ou non ?

[Rire] Je ne sais pas. Je ne pense même pas que ses partisans le sachent.

Selon vous, avez-vous plus de chances d’être amnistié si Alassane Ouattara est candidat ou s’il ne l’est pas ?

La situation que je vis ne doit pas être conditionnée par la candidature ou non du Président Ouattara. C’est une question de droit. J’ai été jugé et acquitté pour des faits liés à la crise post-électorale dans mon pays. Ce n’est pas normal qu’on puisse m’empêcher de participer à l’élection présidentielle car on risque de priver la Côte d’Ivoire de quelqu’un qui a aussi des idées. Qu’est-ce que les autres ont de plus que moi ou qu’ai-je fait de plus que les autres ?

Ou pire ?

Ou pire que les autres ? J’ai soutenu un candidat, cela m’a valu tout ce que vous savez jusqu’à la Cour pénale internationale. J’ai été acquitté. Laurent Gbagbo est gracié, son ex-femme est amnistiée, son général, qui était commandant de la Garde républicaine, est gracié. Je ne sais pas. C’est une injustice que je vis.

 
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