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Budget de la 1re année pour un Québec souverain

L’indépendance ne serait pas le « jackpot budgétaire et économique » prédit par le Parti québécois, notent des économistes dans un document obtenu par La presse.


Publié à 1h06

Mis à jour à 5h00

« Un regard critique »

L’analyse d’une vingtaine de pages, intitulée Finances d’un Québec indépendant : un regard critiqueexamine le budget de l’année 1 du Parti québécois. C’est l’œuvre de Robert Gagné, professeur au département d’économie appliquée de HEC Montréal, de Louis Lévesque, économiste et ancien sous-ministre fédéral, et d’Alain Paquet, ancien ministre délégué aux Finances du Québec sous Jean Charest et professeur titulaire de sciences. économie à l’ESG UQAM. L’analyse a été préparée à titre personnel par ses auteurs, qui affirment n’être responsables que d’eux-mêmes. L’ancien sénateur André Pratte a également participé à sa rédaction et, bien qu’il fasse désormais campagne pour le Parti libéral du Québec, le parti politique n’a ni initié ni endossé la démarche, précise-t-on.

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PHOTO MARIKA VACHON, LA PRESSE ARCHIVES

Co-auteur de l’analyse, professeur au département d’économie appliquée de HEC Montréal Robert Gagné

Des prévisions « très conservatrices »

Reportée à plusieurs reprises, notamment en raison de l’élection partielle dans Jean-Talon, la présentation du budget de la 1re année du Parti québécois a finalement eu lieu en octobre 2023. De manière « très conservatrice », son chef Paul St-Pierre Plamondon a alors fait valoir que l’élimination des chevauchements de ministères et de programmes entre Québec et Ottawa entraînerait des économies qui gommeraient pratiquement le déficit créé par la fin de la péréquation. Le document a été vérifié par une demi-douzaine d’experts, a-t-on précisé.

Pourquoi avoir la souveraineté ?

Les économistes ne contestent pas le fait qu’un Québec indépendant « pourrait être « viable » économiquement et financièrement ». Cependant, « la viabilité ne devrait pas être la norme de réussite d’un projet » d’une telle importance, affirment-ils. Car « pourquoi se séparer du Canada si ce n’est pour permettre aux Québécois de vivre mieux ? « . À cet égard, le budget de la première année du PQ « ne résiste pas à l’épreuve des faits », affirment les experts, soulignant plusieurs exemples de coûts sous-estimés, qu’ils qualifient d’« arguments politiques, dont les fondements économiques sont extrêmement fragiles ».

Une dette d’environ 50 milliards supérieure

Selon les auteurs, la dette d’un Québec souverain pourrait être de 53 milliards supérieure aux prévisions du PQ. Notamment parce que le Canada n’accepterait probablement pas les demandes du Québec lors d’éventuelles négociations pour décider quelle proportion de la part fédérale reviendrait à la province. Selon cette hypothèse, et puisqu’un Québec indépendant subirait a priori des taux d’intérêt plus élevés que s’il était resté dans la fédération, les auteurs estiment qu’il pourrait avoir à payer jusqu’à 4 milliards par année pour financer cette dette, « autant d’argent cela ne serait pas disponible pour investir dans les services publics ».

Programmes coûteux

Aux affirmations du PQ, qui soutient qu’Ottawa « ne fournit presque aucun service direct » aux Québécois, les auteurs de l’analyse répondent par une liste exhaustive : défense nationale, services de renseignement, contrôle des frontières, approbation des médicaments. Sans compter les fonds acheminés vers le Québec par l’intermédiaire de divers programmes, comme l’assurance-emploi et le régime de pensions de la Sécurité de la vieillesse, pour un total de 68,3 milliards. Un Québec souverain devrait payer des sommes importantes pour mettre en œuvre des programmes similaires, soutiennent les auteurs. Du moins, plus que ce qui est dépensé par le gouvernement fédéral puisque celui-ci réalise d’importantes économies d’échelle en les administrant au nom de 40 millions de personnes.

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PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE ARCHIVES

Contrairement au PQ, les auteurs de l’analyse soutiennent qu’Ottawa offre encore plusieurs services directs aux Québécois, comme le contrôle des frontières. Un Québec souverain devrait payer des sommes importantes pour mettre en œuvre des programmes similaires, soutiennent les auteurs.

Le prix de l’armée sous-estimé

En matière de défense nationale, les économistes soulignent une autre contradiction coûteuse. Le PQ calcule qu’il en coûterait au nouveau pays 3,6 milliards par année pour se doter d’une armée. Or, cette somme ne correspond qu’à 0,65 % du PIB estimé d’un Québec souverain, alors que les pays membres de l’OTAN doivent viser un objectif de 2 % de leur PIB en dépenses destinées à la défense. Le Québec devrait dépenser au moins 8 milliards de plus par année pour éviter de se retrouver en queue de peloton, même s’il aurait un territoire à protéger immensément plus grand que de nombreux pays de l’OTAN.

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PHOTO SEAN KILPATRICK, ARCHIVES DE LA PRESSE CANADIENNE

Le montant pour doter le nouveau pays d’une armée correspond à seulement 0,65 % du PIB estimé d’un Québec souverain, alors que les pays membres de l’OTAN doivent viser un objectif de 2 % de leur PIB en dépenses. destinés à la défense, affirment les auteurs.

L’exemple du Brexit

Les auteurs critiquent également le budget de la première année pour avoir éliminé tout scénario de turbulences économiques au lendemain de l’indépendance. Cependant, « il n’existe aucun fait historique dans les pays développés pour étayer cette thèse », écrivent-ils. Selon eux, l’exemple du Brexit suffit à convaincre du contraire. Trois ans après la séparation du Royaume-Uni de l’Union européenne, la perte de revenu par habitant des Britanniques s’élève à 1 485 dollars canadiens, soulignent les auteurs, citant l’Institut national de recherche économique et sociale. Ce qui leur fait dire que, pour plus de rigueur, le PQ aurait dû envisager « des scénarios moins rose bonbon ».

Lire « Budget de la 1re année » du Parti Québécois : Une situation financière très difficile

A corriger
Une version précédente de ce texte avait omis le mot « mieux » dans la citation suivante : « pourquoi se séparer du Canada si ce n’est pour permettre aux Québécois de vivre mieux ? « . Nos excuses.

 
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