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l’avocat Thierry Moser brise le silence

Le JDD. Grégory disparaît le 16 octobre 1984, il y a exactement 40 ans. Comment vont Jean-Marie et Christine Villemin aujourd’hui ? Voyez-vous régulièrement les parents de Grégory ?

Thierry Moser. Jean-Marie et Christine Villemin se portent bien. Ils sont toujours amoureux, ont trois enfants et petits-enfants. De plus, les médias les laissent tranquilles. Les époux Villemin constatent que la justice dijonnaise fait de son mieux pour élucider ce crime terrible, ce qui leur fait un immense bien et les réconforte. On se voit assez régulièrement, nous sommes devenus amis au fil des années. Nous faisons souvent des balades sur les crêtes vosgiennes lorsqu’ils viennent dans la région. Ce ne sont pas mes clients, ce sont mes amis. En 2020, Jean-Marie Villemin m’a fait l’honneur d’écrire la préface de mon livre. Il m’a donné cette immense joie de me qualifier comme son « grand frère ». C’était un merveilleux mot de la part de ce couple extraordinaire que j’apprécie beaucoup.

40 ans après, comment expliquer l’engouement que suscite encore aujourd’hui l’affaire Grégory ?

Il existe différents ingrédients. C’est d’abord la mort d’un enfant. Et puis il y a eu le suspense. Un premier suspect avec Bernard Laroche avant que l’attention se concentre sur la mère de Grégory, Christine. Les accusations contre Christine Villemin ont fait vendre le journal. L’histoire de la mère « sorcière », qui cache son jeu et trompe son mari, a contribué à une médiation excessive et malsaine. La presse a largement exploité cette affaire. Le journaliste Jean-Michel Bezzina m’a dit un jour avec arrogance et cynisme “Moi, Moser, tout ce qui m’intéresse dans cette affaire c’est de savoir combien d’argent je vais gagner avec ce gamin”. Imaginez entendre ça…

Et puis il y a la rivalité entre la police et la gendarmerie. Le sinistre commissaire Corazzi n’avait qu’une idée en tête : disculper Bernard Laroche et punir la mère tout en démontrant que les gendarmes n’étaient pour lui que des « cornichons ». Je déplore qu’il n’y ait jamais eu de sanctions contre ce trio Bezzina, Corazzi et Gérard Welzer, l’avocat de Bernard Laroche. Enfin, il y avait évidemment la personnalité du juge Lambert, complètement polyvalent et qui pensait que le dernier qui avait parlé avait raison.

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Quelles sont vos dernières nouvelles ?

En 2017, il y a eu la mise en examen de Marcel et Jacqueline Jacob ainsi que celle de Murielle Bolle pour avoir enlevé, détenu et séquestré Grégory Villemin. Malheureusement, cette mise en accusation n’a pas été exécutée selon les règles du droit. Il aurait fallu qu’elle vienne, non seulement du président de la chambre de l’instruction de Dijon, mais des trois magistrats de la Chambre, ce qui a donc abouti à une annulation pour raisons de forme. Mais si d’autres éléments significatifs font surface, ces mises en accusation pourraient éventuellement être à nouveau prononcées.

Le 20 mars 2024, une décision de la Chambre de l’Instruction de Dijon a ordonné de nouvelles expertises ADN ainsi qu’une étude de faisabilité dans le domaine de la biométrie vocale. J’espère qu’au printemps 2025, nous aurons les résultats et que nous obtiendrons de nouveaux éléments substantiels, significatifs. Pourquoi ne pas supposer alors que nous puissions finir sur le chemin de la vérité ?

Qu’en est-il des nouvelles techniques récentes, notamment en termes de vitemétrie ou de graphologie, pour identifier les corbeaux ?

La stylométrie est une nouvelle discipline scientifique. Je ne sais pas vraiment si on peut lui faire confiance. Je n’ai pas tendance à faire des évaluations écrites la reine des preuves, loin de là. Mais si des éléments obtenus grâce à la Stylométrie corroborent des éléments issus des investigations ADN, cela prendra évidemment une nouvelle importance.

Des fausses vérités circulent-elles encore dans la presse ?

Il y aura toujours des imbéciles, des gens qui se croient intelligents et qui pensent avoir tout compris. Et puis il y a ceux qui volontairement, avec méchanceté, diffusent des informations qu’ils savent fausses. Au fond, je m’en fiche de ces fausses vérités. Je m’occupe uniquement de ce qui se passe dans le dossier. Cela ne m’intéresse pas de déclamer ici et là.

Dans votre ouvrage « Parole d’avocat : Les cas Villemin, Bodein, Fourniret, Heaulme et quelques autres » vous disiez « garder bon espoir » d’obtenir un jour la vérité. Votre position reste-t-elle intacte 40 ans plus tard ?

Oui. Je suis convaincu que dans ce village de Lépanges, il y a des gens qui ont des informations, qui savent des choses et qui n’ont rien dit, soit parce qu’ils ont été menacés, soit parce qu’ils ont peur des médias. Si seulement ces personnes se mettaient au service de la justice, ce serait méritoire. Je ne suis pas naïf, mais j’ai un espoir raisonnable qu’un jour nous apprendrons la vérité.

Je pense que l’auteur du kidnapping de Grégory s’appelle Bernard Laroche.

Avez-vous une forte conviction sur ce qui s’est passé ?

Oui. Le jugement de février 1993 dit que la culpabilité de Christine Villemin est impossible pour des raisons matérielles et psychologiques. Des accusations très graves pèsent contre Bernard Laroche concernant l’enlèvement de Grégory. En 1993, le tribunal de Dijon dit également que Murielle Bolle a été témoin de cet enlèvement et que Marie-Ange Laroche, l’épouse de Bernard, a cherché à détourner les soupçons qui pesaient sur son mari. Je pense que l’auteur du kidnapping de Grégory s’appelle Bernard Laroche. Je pense alors que Bernard Laroche a livré cet enfant à des copains qui l’ont mis à mort.

S’agit-il des complices de Marcel et Jacqueline Jacob ?

Je ne vais pas vous contrarier violemment.

 
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