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que vaut la mini-série de Max sur le mythomane du Bataclan ?

P.Pour sa première création originale française, la plateforme de streaming Max, filiale de Warner Bros Discovery, a voulu frapper fort. C’est fini avec la mini-série Un ami dévouédisponible à partir du vendredi 11 octobre, qui revient sur les événements post-13 novembre, à un peu moins d’un an de l’anniversaire des attentats de 2015.

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Un sujet délicat, déjà exploré au cinéma en Novembre (sur la lutte contre le terrorisme) et Revoir Paris (sur le traumatisme d’une victime), ou à la télévision en Les espions de la terreur (à la recherche des cerveaux de l’opération, déjà sur M6+ et bientôt sur M6), mais qui trouve dans cette nouvelle version une réflexion remarquable sur la fabrication du mensonge, le sentiment de solitude et la force du collectif.

Ce thriller psychologique est vaguement adapté de Le mythomane du Bataclan (aux éditions La Goutte d’or), le livre du journaliste d’investigation Alexandre Kauffmann sur Florence Monjault, alias Flo Kitty, une arnaqueuse récidiviste, membre de l’association Life for Paris, qui s’est fait passer pour une victime des attentats pendant plus de deux ans. Et qui a été condamné en 2018 à quatre ans et demi de prison pour escroquerie.

It’s Just Philippot, un réalisateur du cinéma de genre (Acide, Le nuage) qui a été choisi pour raconter l’histoire dans quatre épisodes de ce Ami dévouéjoué par la beaucoup plus populaire Laure Calamy, (10 pour cent, Antoinette in the Cévennes).

Le portrait d’une femme en quête d’appartenance

Dédié. Apparemment, rien ne pourrait mieux définir Christelle Blandin, qui, dès le soir des attentats, faisait office de confidente pour tous les survivants du Bataclan. Célibataire et sans emploi, cette quadragénaire vit avec sa mère, dans sa chambre d’adolescente recouverte d’affiches des groupes glam rock qu’elle idolâtre et suit assidûment. Parmi eux, les Eagles of Death Metal, dont elle a assisté aux concerts à Paris. Sauf celle du 13 novembre 2015…

Pourtant, sincèrement bouleversée, elle a contacté les victimes via les réseaux sociaux, s’inventant une amie dans le coma après le massacre. Très empathique, Chris écoute sans relâche ces hommes et ces femmes brisés, les soutient, les réconforte, les encourage. Infatigable, elle trouve les mots pour apaiser la souffrance et recréer du lien.

A LIRE AUSSI Les armes de la plateforme Warner Bros. Max pour détrôner Netflix et Disney+ Petit à petit, elle se rend indispensable, au point de participer à la création de l’association Stand up Paris et de devenir l’un de ses piliers, sous les yeux horrifiés de sa mère (Anne Benoît) qui ne supporte plus ses mensonges : « Ils ne se soucient pas de la vérité. Ce qu’ils veulent, c’est être aidés, se justifie Chris lorsqu’elle se retrouve expulsée. Ils ont besoin de moi. Je suis utile. » Et c’est sans doute la première fois pour cette femme, dont le profond besoin d’aimer et d’être aimée est jusqu’alors resté insatisfait.

Voiture Un ami dévoué est d’abord le portrait d’une femme désespérément seule, en marge d’une société dans laquelle elle peine à exister.

En prêtant une oreille attentive aux victimes du Bataclan, Chris trouve un but dans sa vie, une place dans la communauté, une reconnaissance. Et comble ainsi son besoin d’appartenance, et son manque émotionnel. Stand up Paris est aussi sa bouée de sauvetage et elle est prête à tout pour y rester. Quitte à menacer ou faire chanter ceux qui commencent à douter.

L’usine à mensonges

«Tu es un monstre», lui reproche le compagnon d’un de ses nouveaux amis, qui l’a démasquée malgré son incroyable virtuosité à manipuler la vérité pour construire sa légende et préserver son secret. C’est là aussi que réside le deuxième tour de force de la mini-série : décortiquer la construction du mensonge, tout en revenant aux sources de la mythomanie révélées dans le dernier épisode.

Tout au long de son parcours, Chris multiplie les tromperies savamment élaborées et s’approprie les témoignages des survivants pour nourrir sa fausse identité. Et même de saisir l’opportunité de profiter du fonds d’indemnisation des victimes, amorçant ainsi sa chute. Mais il ne s’agit pas là d’un simple opportunisme. Chris a besoin de cet argent pour se loger et continuer à agir pour le bien de la communauté des survivants.

Ironiquement, elle n’a pas son pareil pour dénoncer les tromperies de ses pairs, qui tentent de tromper le système, et pour les pousser vers la sortie : « La confiance est notre seul capital. Il faut être exemplaire», plaide-t-elle avec assurance lors d’une réunion.

En fin de compte, c’est seulement lorsqu’elle parle de sa passion pour la musique que Chris est vraiment sincère. Et c’est grâce à la musique qu’elle trouve une forme de rédemption en organisant le premier concert de l’association. Une manière pour tous ses membres de se réapproprier leur vie, en s’appuyant sur le collectif.

Un thriller psychologique oppressant

La fin justifie-t-elle les moyens ? Le mensonge est-il acceptable lorsqu’il est raconté pour le bénéfice des autres ? Telles sont les questions que pose cette mini-série ambitieuse, portée par un casting impeccable. On citera notamment Arieh Worthalter (César pour son rôle dans Le procès Goldman) qui incarne Léon, le président de Stand up Paris, et bien sûr, la magistrale Laure Calamy, dans presque tous les sens.

Filmée au plus près par la caméra de Just Philippot, l’actrice se révèle à la fois vulnérable et inquiétante dans la peau de cette héroïne au psychisme troublé, provoquant chez le spectateur autant de compassion que de malaise.

Paradoxalement, la sobriété de la mise en scène accentue l’atmosphère oppressante qui entoure sa trajectoire jusqu’à son inéluctable déclin. Même si l’issue est connue dès le départ, la tension continue de monter à mesure que l’étau se resserre autour d’elle. C’est étouffant et éprouvant. Mais c’est aussi bouleversant.

 
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