C’est lors d’une mission à Papeete d’un autre temps, en 1936, que Laurent Le Bihan pose son hydravion. À Tahiti, l’aviateur constate que les foyers utilisent presque exclusivement le pétrole comme Source d’énergie, tandis que la métropole a pris le train des bouteilles de gaz. Après la Seconde Guerre mondiale, Laurent n’a qu’une idée en tête : retourner en Polynésie française, et mettre en place le système d’importation de gaz qu’il développe depuis dix ans.
C’est chose faite en 1948. Laurent revient au Fenua, et avec lui, les premières bouteilles de gaz importées. En provenance de la Terre de Feu, le gaz est mis en bouteille : ceux de 50 kilos viennent des États-Unis, et ceux de 13 kilos du Canada. Les grandes bouteilles, une fois retournées, servent à remplir les plus petites, grâce à un système de pompe manuelle.
Fille de l’entrepreneur, Hélène Le Bihan se souvient du début de l’aventure. ” Au tout début, (Laurent) faisait du porte-à-porte avec des poêles plats, à deux ou un brûleur, avec la bouteille, le détendeur, le tuyau. Et il a posé ceci à des particuliers, dit-elle. Il a dit : « D’accord, eh bien, essayez, vous voyez, et je reviendrai dans une semaine. Neuf fois sur dix, les gens n’ont jamais voulu revenir au pétrole » .
Petite particularité : les bouteilles de gaz étaient vidées le samedi après-midi et le dimanche, lorsque les ouvriers ne travaillaient pas. ” Très souvent, on voyait quelqu’un arriver avec une bouteille vide. « Hé, grand-mère, peux-tu pomper ? » Ma mère se levait, nous allions avec la bouteille de gaz et nous commencions à pomper. Parfois, nous demandions même au client de nous aider » , continues Hélène.
Vers la fin des années 1960, le développement est tel qu’un premier dépôt de gaz est envisagé à Phaëton Bay, à Taravao, loin des dépôts de produits pétroliers. Mais les autorités de l’époque s’y sont opposées et le projet a finalement abouti à Fare Ute, à Papeete.
Affaire de famille
« Au départ, il s’agissait de trois gros cylindres. Et puis, pour en finir, mon beau-frère est venu voir mon père, avec courtoisie. Il a dit : « Écoutez, M. Le Bihan, j’ai l’intention de rivaliser avec vous. » remembers Hélène. Mais Laurent voit les choses différemment. ” Mon père a dit : ça ne sert à rien de rivaliser avec moi, parce que je n’ai personne pour me succéder. Alors, il vaut mieux que vous m’achetiez l’entreprise. Ainsi est née de cette transaction entre Laurent Le Bihan et Victor Siu, en 1974, la marque Gaz de Tahiti.
L’entreprise reprend son essor, tout en restant aux mains de la famille. Petit-fils de Laurent Le Bihan et fils de Victor Siu, Georges Siu – actuel PDG de Gaz de Tahiti – interrompt ses études et contribue à la construction d’un nouveau terminal gazier dans la zone récifale de Papeete, à Motu Uta. ” Lorsque nous avons repris l’entreprise, nous connaissions le premier choc pétrolier en 1973, qui provoquait des ruptures d’approvisionnement entre l’Australie et la Polynésie. On a tout de suite vu que le dépôt à l’époque n’était pas suffisant pour les besoins de la population.il se souvient. Nous avons immédiatement pensé à construire un nouveau dépôt de gaz » . Avec les autorités administratives et le port autonome, il a localisé le fameux terrain de son terminal, initialement attribué à EDT pour une nouvelle centrale électrique.
Un terminal qui fait aujourd’hui partie intégrante du paysage de Papeete. Pourtant, un nouveau chapitre de l’histoire du gaz à Tahiti vient de s’ouvrir avec ManaGaz. Sur l’autre côte de l’île, le paysage d’Hitiaa abrite discrètement les réservoirs de 45 mètres du groupe Moux, nouvel acteur du marché du gaz avec sa branche Mana ito.
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