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La France est-elle de droite ou de gauche ? Avec Vincent Tiberj et Jérôme Fourquet

Y a-t-il un glissement à droite dans la société française ? Pour son livre « La droitisation française, mythe et réalités », à paraître le 4 septembre, le sociologue Vincent Tiberj, politologue français spécialisé en sociologie électorale, valeurs et immigration, a analysé des dizaines de sondages d’opinion. Selon lui, les résultats des dernières élections démontrent que les valeurs conservatrices véhiculées lors des campagnes sont en décalage avec la société.

« Quand on parle de déplacement à droite, il y a plusieurs dimensions : la scène politique, une partie de la scène médiatique ont évolué vers la droite. Mais la question est de savoir s’il y a un déplacement à droite parmi les citoyens. »explique Vincent Tiberius. « Le but du jeu pour moi était de reprendre tous les sondages d’opinion qui auraient pu être réalisés, par des instituts de sondage ou des institutions européennes et françaises. Quand on agrège toutes ces séries de questions, sur le racisme, l’homosexualité, les questions de genre, le rôle de l’État, le poids des impôts, on se rend compte que ce n’est pas si simple. »

« Conservatisme atmosphérique »

Selon le chercheur, « La France a fait des progrès considérables, notamment sur les questions de genre et de minorités sexuelles. On passe d’un monde très hétéronormatif, centré sur les hommes, et cela a considérablement changé. C’est aussi la tolérance envers la diversité, envers le multiculturalisme »Il croit qu’un « conservatisme atmosphérique » existe en France.Il y avait des intellectuels et des médias conservateurs avant. Certaines de ces figures étaient là dans les années 80 et sont encore là aujourd’hui, on en entend simplement beaucoup plus parler. Le monde des médias a aussi beaucoup changé : avec les téléspectateurs de CNEWS par exemple, il y a une sorte de boucle de confinement.

« Sur les questions économiques ou sociétales, on ne peut pas diagnostiquer un glissement à droite. Là où il peut y avoir un débat, c’est sur des sujets plus régaliens, l’insécurité ou l’immigration. Sur la question de la peine de mort, dans les sondages récents, on a encore un Français sur deux qui reste favorable à la peine de mort. »estime Jérôme Fourquet, sondeur et analyste politique, directeur du département « Opinion » de l’Institut français d’opinion publique (IFOP).

« L’importance des sondages »

Vincent Tiberj souligne également « L’importance des sondages » qui deviennent « élément de débat politique ». « Sur la peine de mort, on voit que les enquêtes qui se font sur Internet arrivent à 50/50 quand celles qui sont faites par les enquêteurs, au téléphone ou en face à face, on voit une progression continue du refus de la peine de mort »il ajoute.

« La préoccupation est aussi de poser la question de la représentativité des élections »il indique en outre. « Quand on regarde le vote, le placement à gauche ou à droite, la proximité partisane. On se rend compte qu’aujourd’hui, les élections se gagnent avec une minorité d’électeurs et de citoyens. Il fut un temps où les abstentionnistes étaient considérés comme des gens qui n’étaient pas intégrés, qui ne comprenaient pas. Aujourd’hui, une majorité de millennials et de post-baby-boomers sont désormais des électeurs intermittents. Non pas parce qu’ils ne s’intéressent pas à la politique, mais parce que le système ne leur convient plus. Globalement, le système politique ne fonctionne plus. »

« Nous n’avons jamais été confrontés à des citoyens aussi compétents pour jouer leur rôle qu’aujourd’hui, à condition de leur permettre de le faire »le sociologue souligne également. « Les conventions citoyennes sont un exemple typique de la façon dont, quand on rassemble des citoyens qui commencent à travailler ensemble, ils arrivent à trouver des choses. Mais d’un autre côté, on se retrouve avec un exercice du pouvoir très descendant, parfois méprisant envers les citoyens. »

 
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