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Inflation. Comment le bio tente de se débarrasser de son « image-prix » négative

Si la consommation alimentaire a diminué en 2022, c’est encore plus vrai pour les produits bio (-4,6% en 2022), et plus prononcé dans les magasins spécialisés (-8,6%) que dans les grandes surfaces. A tel point que leur part de marché dans la consommation bio recule légèrement (26,89 % en 2022 contre 32 % en 2013), et 224 magasins ont fermé quand 111 ont ouvert.

Pour Béatrice Sommier, chercheuse en ethnomarketing, qui étudie les consommateurs bio, notamment ceux de Breton Biocoop, les consommateurs fidèles aux marques spécialisées ne sont pas en reste. Ils les fréquentent et achètent du bio par conviction, qu’elle soit environnementale (souvent des personnes au pouvoir d’achat assez élevé) ou sanitaire (notamment des personnes au pouvoir d’achat limité qui y voient du ” un investissement » quitte à limiter les autres dépenses).

L’élasticité de la demande est pour eux assez faible : le prix n’est pas leur priorité. C’est ce que confirment tant Tanguy Le Gall, président de Biocoop, que Christelle Le Hir, présidente du directoire de La Vie Claire et administratrice de SynadisBio, le syndicat des distributeurs bio.

Une image prix négative

Le problème, ce sont les consommateurs occasionnels. Pour Tanguy Le Gall, ils ont commencé à déserter en 2021 : après les restrictions Covid – qui ont entraîné une forte augmentation de la consommation alimentaire à domicile, et donc des performances records en bio -, les gens » voulait revenir à la vie d’avant, avec des décisions de consommation au détriment du bio » pour dépenser plus dehors.

L’inflation continuait de les effrayer car ils étaient convaincus que les prix avaient augmenté bien plus pour les produits biologiques. ” Notre image prix est encore plus élevée que la réalité », reconnaît le président de Biocoop. En effet, si les produits bio sont en moyenne plus chers que ceux issus de l’agriculture conventionnelle, l’inflation a été plus faible dans les produits bio (4% contre 7,2% en 2022).

Par ailleurs, l’idée se développe selon laquelle l’agriculture locale est plus intéressante pour la santé et l’environnement que les aliments biologiques qui ont voyagé à travers la planète, hautement transformés, dans du plastique. Toutefois, ces pratiques sont principalement l’œuvre de la grande distribution. Ce qui a également entraîné l’industrialisation des produits biologiques au cours des dernières décennies, ce qui fait que « le bio est devenu plus populaire, c’est une bonne chosese réjouit Christelle Le Hir, mais cela a peut-être brouillé la question : qu’est-ce que ce bio bon marché ? »

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Avec plusieurs dizaines d’ouvertures de magasins par semaine les bonnes années, les dizaines de fermetures de ces derniers mois ne sont pour certains qu’un rééquilibrage : des magasins trop fragiles économiquement, dans des zones trop compétitives, ferment, ce qui profitera aux concurrents locaux. ” Tout le monde a ouvert tellement de magasins même quand il n’y avait aucun potentiel de clientèle, il peut aussi y avoir eu des erreurs dans le choix stratégique, l’emplacementanalyse Christelle Le Hir. Les indépendants sont ceux qui ont le plus souffert et ont fermé « .

Travailler le prix

D’autant que certains estiment qu’une sorte de plafond de verre pour la consommation bio a été atteint en , les chiffres de consommation restent bien inférieurs à ceux de certains de nos voisins.

Longtemps tabou en agriculture biologique, le prix devient un élément de stratégie. La Vie Claire propose désormais des promotions à succès et « croissance à deux chiffres sur les opérations anti-inflationnistes », assure Christelle Le Hir. La marque, tout comme Biocoop avec son « prix engagés », met également en avant une centaine de produits à petits prix, parfois moins chers que les produits bio à marque distributeur des supermarchés. Biocoop affiche la volonté de réduire les coûts sans diminuer le prix payé aux producteurs.

Béatrice Sommiers prévient cependant qu’axer sa communication sur les prix est périlleux, car « les prix bas sont associés à une qualité inférieure. Jouer sur l’image-prix, c’est aussi risquer de perdre des consommateurs fidèles « .

Les marques jouent donc l’équilibriste. ” Il est plus important de parler de rapport qualité-prix » pour Christelle Le Hir. ” Nous ne serons jamais des discounters, nous acceptons d’être plus chers que le marché car nous apportons une autre valeurassure Tony Le Gall. Mais nous devons combattre cette image selon laquelle nous sommes des magasins pour l’élite. « .

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Mettre en avant les spécificités du bio et communiquer localement

Biocoop met l’accent dans ses campagnes sur la notion de bon sens avec « des messages plus forts mais avec un ton et des solutions rassurants ». D’autres, comme La Vie Claire, visent une communication davantage tournée vers le plaisir. ” Nous devrons peut-être réenchanter des consommateurs déjà fidèles. Pour ceux qui ne le connaissent pas très bien, cela doit être simple et pédagogique, pas exclusif. Pendant longtemps, nous avons eu une communication quelque peu coupable. Il faut briser le côté anxiogène, austère. Dans nos magasins, on privilégie la gourmandise, on met en valeur les recettes « . Et la marque travaille également sur le nutriscore et le planetscore, pour montrer la valeur nutritionnelle et environnementale de ses produits.

Il est trop difficile de savoir si cette stratégie fonctionne, mais Biocoop constate une amélioration des chiffres avec le retour de la croissance en volume depuis l’été. Avec la fin de la flambée des prix alimentaires, 2024 sera-t-elle l’année de la reprise du bio ?

 
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